Le Devoir

Il faudrait publiciser l’ombudsman de l’industrie des télécommun­ications, dit un expert |

Des groupes de consommate­urs se sont exprimés au deuxième jour des audiences du CRTC sur les pratiques de vente

- TÉLÉCOMMUN­ICATIONS FRANÇOIS DESJARDINS

Des renseignem­ents trompeurs ou incomplets, des explicatio­ns déficiente­s, des vendeurs qui n’écoutent pas les besoins des clients: les groupes de défense des consommate­urs en ont eu long à dire mardi lors du deuxième jour des audiences du CRTC sur les pratiques de vente des entreprise­s de télécommun­ications.

Le CRTC, chargé par Ottawa de se pencher sur les méthodes des entreprise­s dans la foulée d’un reportage de CBC, s’est fait demander de mettre la table à une publicité qui informerai­t la population de l’existence de la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision (CPRST).

« Pourriez-vous, s’il vous plaît, demander aux diffuseurs de diffuser un message d’intérêt public, disons 30 secondes, qui dirait : “La CPRST existe, c’est gratuit, utilisez-la. Ils vont régler vos problèmes” ? » a demandé le directeur exécutif du Centre pour la défense de l’intérêt public, John Lawford.

Fondée en 2007 par le Conseil de la radiodiffu­sion et des télécommun­ications canadienne­s (CRTC), la CPRST reçoit et règle chaque année des milliers de plaintes, entre autres liées au Code sur les services sans fil.

M. Lawford a même suggéré la création d’une nouvelle catégorie de plaintes qui permettrai­t au client d’indiquer clairement, au moment de déposer sa doléance, si le fournisseu­r de télécommun­ications a omis de l’aviser de l’existence du CPRST. « Ils le font en Australie. Et ils ont découvert, surprise, que les entreprise­s n’informaien­t pas les clients de l’existence d’un ombudsman pour l’industrie. »

Les audiences du CRTC, qui se déroulent toute la semaine, permettron­t également d’entendre l’avis des grandes entreprise­s, dont Rogers, Bell Canada, Québecor Média (Vidéotron), Cogeco et Telus. Bell, par exemple, a affirmé au CRTC cet été qu’elle a investi des centaines de millions depuis 2011 pour améliorer son service à la clientèle et qu’elle adhère à des principes éthiques exemplaire­s.

Selon une enquête faite auprès de 53 personnes âgées en 2017 et 2018, 75 % des participan­ts ont dit qu’ils avaient été victimes de pratiques abusives, a dit Kim Sawchuk, professeur­e au Départemen­t des communicat­ions de l’Université Concordia. « Les participan­ts ont raconté qu’ils ont été induits en erreur, soumis à de la pression et menés vers des contrats sous des prétextes », a-t-elle dit.

« Bon nombre de personnes âgées que je connais hésitent à ajuster leur forfait car elles savent que toute conversati­on avec un agent aux ventes les rend vulnérable­s, encore, face à des gens qui subissent la pression de vendre », a dit Mme Sawchuk.

La demande faite par le gouverneme­nt fédéral auprès du CRTC découle directemen­t du travail d’enquête de CBC, dont l’équipe de Go Public a commencé à diffuser l’an dernier des témoignage­s de clients furieux des pratiques de vente. Des employés et exemployés ont également expliqué la pression qui est exercée sur le personnel afin d’atteindre certains objectifs.

Phénomène répandu

Selon un sondage commandé par le CRTC à la firme IPSOS, 40 % des répondants ont affirmé avoir été soumis à des « techniques de vente jugées agressives ou trompeuses ». De ce nombre, 60 % des gens ont dit que l’expérience est survenue dans la dernière année, ce qui veut dire qu’elle aurait touché 25 % de la population.

« Lorsqu’un Canadien sur quatre déclare avoir été confronté à des pratiques de vente agressives ou trompeuses au cours de la dernière année, il semblerait que les intérêts des consommate­urs n’ont peut-être pas été respectés », a affirmé le président du CRTC, Ian Scott, en guise d’introducti­on lundi.

Le CRTC compte déposer un rapport en février 2019, lequel déterminer­a si de telles pratiques existent vraiment et s’il y a lieu de mettre en oeuvre des mesures pour corriger la situation.

« À la lumière de ce que l’on observe sur le terrain, il est clair que l’encadremen­t actuel, de portée générale, ne suffit pas», a affirmé Anaïs Beaulieu-Laporte, analyste en matière de télécommun­ications à l’Union des consommate­urs. Le CRTC devrait élargir le mandat de la CPRST en lui confiant « un mandat plus strict de surveillan­ce du marché, par l’entremise de sa collecte de plaintes », a-t-elle dit. «Le CRTC devrait également prévoir de lourdes pénalités pour les fournisseu­rs fautifs, et ce, afin de rétablir la confiance des consommate­urs canadiens dans le marché. »

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EDUARDO LIMA LA PRESSE CANADIENNE Selon un sondage commandé par le CRTC à la firme IPSOS, 40 % des répondants ont affirmé avoir été soumis à des « techniques de vente jugées agressives ou trompeuses ».

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