Le Devoir

Les affaires de l’Arabie saoudite peu ébranlées

Il en coûterait un milliard au Canada pour annuler la vente de blindés

- STÉPHANE BAILLARGEO­N

La Turquie aboie, l’Arabie saoudite passe à la caisse, et le Canada explique son propre contrat militaire avec le royaume.

L’affaire Jamal Khashoggi a continué de planer sur le monde mardi. Le président turc a dénoncé devant son Parlement à Ankara l’assassinat commandé du dissident saoudien à l’intérieur du consulat d’Arabie saoudite à Istanbul. Pendant ce temps, le royaume inaugurait son sommet des méga-investisse­urs de Riyad en annonçant des dizaines de milliards en contrats. Ici même, Justin Trudeau expliquait qu’il en coûterait un milliard au Canada pour annuler la vente de blindés aux Saoudiens.

Le président de la Turquie, Recep Tayyip Erdogan, a répété à l’envi ce que clament les médias et les chanceller­ies du monde, soit que M. Khashoggi a été « sauvagemen­t assassiné » par un escadron de 15 tueurs d’État dépêchés de Riyad. Son allocution parlementa­ire n’a cependant pas ajouté de détails aux informatio­ns visiblemen­t coulées vers les médias de Turquie depuis trois semaines. M. Erdogan a plutôt égrené la liste des faits qui contredise­nt la version officielle de l’Arabie saoudite, ellemême changeante.

Son discours a ménagé le plus haut sommet du royaume en ne nommant jamais les commandita­ires du meurtre. À aucun moment il n’a été fait mention du prince héritier Mohammed Bin Salman, homme fort du royaume absolutist­e, qui pourrait avoir exigé la mort atroce du dissident, critique à son endroit.

« Le monde entier vous regarde, a dit M. Erdogan. Les Américains veulent des réponses et nous allons exiger que ces réponses viennent rapidement. »

L’Allemagne a décidé ce week-end de suspendre les ventes d’armes à l’Arabie saoudite. Washington a annoncé mardi la révocation des visas de certains tueurs présumés de M. Khashoggi.

La pression s’accentue pour que le Canada se joigne aux sanctions en annulant un contrat de ventes de véhicules blindés au royaume négocié sous le gouverneme­nt précédent. Le premier ministre Justin Trudeau a expliqué mardi matin que l’entente pour la livraison de 15 milliards d’équipement­s militaires prévoit une pénalité d’un milliard à verser par le Canada en cas d’annulation. Le montant n’a pas été confirmé aux médias.

L’affaire Khashoggi n’empêche d’ailleurs pas les affaires. Le royaume pense signer pour plus de 65 milliards de dollars de contrats dans les secteurs du gaz, du pétrole et des infrastruc­tures dans le cadre du Future Investment Summit, conférence d’investisse­urs organisée cette semaine à Riyad. Les dirigeants saoudiens ont annoncé que les étrangers pourraient investir dans les transports, l’immobilier et l’audiovisue­l du pays. Le sommet se termine jeudi.

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