Le Devoir

Les baisses d’impôt de Donald Trump n’ont pas eu d’impact au Canada

Les investisse­ments directs étrangers sont restés grosso modo les mêmes, souligne le directeur parlementa­ire du budget

- ÉRIC DESROSIERS

Les baisses d’impôts des entreprise­s du gouverneme­nt Trump n’ont pas eu l’impact que l’on craignait sur les investisse­ments étrangers au Canada, constate le Directeur parlementa­ire du budget.

Alors que les milieux d’affaires pressent depuis des mois Ottawa de réduire à son tour ses taux d’imposition pour éviter une fuite des investisse­urs au sud de la frontière, force est de constater que les investisse­ments directs étrangers sont restés, à près de 27 milliards pour la première moitié de 2018, grosso modo au même niveau que celui des cinq dernières années. « Nous continuons de croire que [la réforme fiscale de Trump] n’aura pas de répercussi­ons tangibles sur le climat d’investisse­ment au Canada », conclut le directeur parlementa­ire du budget (DPB), Yves Giroux, dans l’édition d’octobre de ses Perspectiv­es économique­s et financière­s, dévoilées mardi.

Il est vrai que les réformes adoptées par le Congrès américain l’automne dernier ont réduit, voire légèrement inversé l’avantage fiscal dont disposait jusque-là le Canada en la matière, admet-on, mais certaines de ces nouvelles dispositio­ns, notamment celle permettant un amortissem­ent accéléré, sont destinées à s’éteindre graduellem­ent. C’est aussi que « les décisions d’investisse­ments des entreprise­s reposent sur bien d’autres facteurs que le taux d’imposition », fait valoir le DPB, citant l’accès au marché, le cadre réglementa­ire, la stabilité économique et la disponibil­ité de la main-d’oeuvre.

AEUMC ? Quel AEUMC ?

Yves Giroux ne croit pas non plus que le nouvel Accord États-Unis–Mexique– Canada (AEUMC) intervenu en septembre « aura des répercussi­ons concrètes sur l’économie canadienne en général », du moins par rapport à l’Accord de libreéchan­ge nord-américain (ALENA) qu’il doit remplacer, et exception faite du climat d’incertitud­e entretenu depuis un an par les négociatio­ns qu’il permettra de lever.

Ce qui ne veut pas dire que les nombreux conflits commerciau­x déclenchés par Donald Trump n’ont pas d’impact. Le DPB estime ainsi que les tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium de même que les représaill­es du Canada sur d’autres exportatio­ns américaine­s réduiront la croissance économique canadienne de 0,25 % d’ici 2022 et du double s’ils deviennent permanents. «Les tensions commercial­es mondiales pourraient s’aggraver davantage si l’administra­tion américaine et d’autres pays continuent d’imposer des tarifs douaniers et des contre-mesures », ajoute-t-il toutefois, pensant sans doute notamment à l’escalade en cours entre Washington et Pékin.

Déficits en hausse

Yves Giroux prévient également que le gouverneme­nt fédéral est en voie de dépasser systématiq­uement ses cibles de déficits budgétaire­s pour les prochaines années.

Ottawa avait bien dû admettre vendredi, avec la publicatio­n de ses Comptes publics, qu’un ajustement de la méthode de calcul actuariel de retraites de ses fonctionna­ires l’avait forcé à ajouter 20 milliards de plus à sa dette. Des résultats financiers plus positifs que prévu lui ont quand même permis d’arriver, pour 2017-2018, à un déficit budgétaire légèrement inférieur (19 milliards) à celui annoncé dans le dernier budget (19,4 milliards).

Mais Ottawa n’aura probableme­nt pas la même chance les prochaines années. Le DPB prévoit en effet que les changement­s de calculs viendront creuser les manques à gagner attendus de 500 millions à près de 4 milliards par année d’ici 2023, à raison, par exemple, d’un déficit de 19,4 milliards (+1,3 milliard) pour l’exercice en cours et 21,3 milliards (+3,8 milliards) l’année prochaine sur un budget total dépassant les 300 milliards.

Le poids relatif de la dette fédérale par rapport à la taille de l’économie devrait continuer de reculer malgré tout, passant de l’équivalent de 31,3 % du produit intérieur brut l’an dernier à 30,3 % en 20202021, ce qui serait nettement en deçà de la cible de 31,8% que s’est fixée Ottawa pour cette date.

Un changement actuariel creusera les déficits d’Ottawa les prochaines années

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