Service d’autocar en Beauce : deux MRC font marche arrière
Des maires acceptent finalement de subventionner la ligne Québec–Saint-Georges
Le vent tourne dans le dossier du transport interurbain en Beauce. Deux des trois MRC sur lesquelles repose le maintien du service se disent désormais prêtes à contribuer à son financement. La troisième est en réflexion.
« Si on prend un pas de recul, je pense qu’il y a eu peut-être un manque de communication entre nous et M. Breton [le patron de la compagnie Autobus Breton] », a expliqué le préfet de BeauceSartigan, Normand Roy, en entrevue au Devoir mercredi. Sa MRC et celle de la Nouvelle-Beauce ont annoncé en matinée qu’elles renonçaient à suspendre la subvention accordée à la compagnie d’autocar comme elles l’avaient annoncé le mois dernier.
Et ce n’est pas tout : elles garantissent que cette aide serait désormais accordée sur trois ans, plutôt que sur une base annuelle.
Sans subvention, le patron d’Autobus Breton avait annoncé son intention d’interrompre le service à compter du 31 décembre. Il affirme qu’en raison de la diminution de l’achalandage, le trajet entre Saint-Georges et la capitale est déficitaire depuis des années.
Reste à savoir si la troisième MRC de la Beauce, celle de Robert-Cliche, emboîtera le pas, d’autant plus que c’était la plus réticente dès le départ, remarque Pierre Breton. « Il ne faudrait pas qu’ils disent non, parce que ça peut vraiment faire retomber le dossier. »
Chose certaine, la décision ne sera pas connue avant deux semaines, puisque la réunion à ce sujet entre les maires de ce secteur n’est prévue que pour le 14 novembre.
Joint mercredi, le préfet suppléant de Robert-Cliche, Jean-Rock Veilleux, ne voulait pas présumer de la décision de ses collègues, mais a indiqué que la MRC allait « réévaluer » la décision de suspendre l’aide.
« Normalement, les trois MRC, on fonctionne ensemble, mais je ne veux présumer de rien », a-t-il dit.
Des comptes à rendre
Qu’adviendrait-il si les maires de Robert-Cliche votaient contre ? Le service pourrait-il survivre en partie ? Aucun des intervenants n’était en mesure de le dire mercredi.
L’aide des MRC est d’autant plus importante qu’elle a un effet de levier et permet d’avoir accès au programme d’aide au transport collectif du gouvernement du Québec. Ainsi, pour les quelque 30 000 $ consentis par les MRC l’an dernier, le gouvernement du Québec a accordé 90 000 $ à Autobus Breton.
L’annonce de la fin du service à la fin septembre avait causé un choc chez certains résidents de la région, dont Amélie Carrier, une jeune femme avec des problèmes de vision qui avait lancé une pétition. Avisée mercredi de la sortie des deux préfets, elle a dit que cela « augure bien ».
Cette résidente de la Beauce, qui travaille comme rédactrice malgré son handicap, ne peut pas conduire et utilise l’autobus notamment pour se rendre à ses rendez-vous médicaux dans la capitale. Elle en use aussi pour le travail lorsqu’elle doit se déplacer chez des clients.
Mme Carrier utilise le service environ une fois toutes les deux semaines. Elle se dit réticente à recourir au covoiturage, qu’elle juge «moins fiable» et moins « fixe ». « L’autobus, ça génère beaucoup moins d’anxiété pour les gens comme moi. »
Lors d’un reportage récemment dans le bus, Le Devoir a aussi pu constater que beaucoup de jeunes l’utilisaient pour aller visiter de la famille, ainsi qu’un nombre grandissant d’immigrants qui travaillent en Beauce mais n’ont pas de voiture, voire de permis de conduire.
Lors du reportage, l’autobus était rempli environ au tiers, et ce, sur l’un de ses parcours hebdomadaires les plus populaires.
Le gouvernement interpellé
Pourquoi ce changement de cap de la part des préfets? Ces derniers avancent qu’ils n’avaient pas eu suffisamment d’information d’Autobus Breton pour justifier la subvention.
«Les trois MRC ont demandé une reddition de comptes et M. Breton n’avait rien fourni », plaide Gaétan Vachon. Or les documents ont été remis depuis, dit-il. Le préfet de Beauce-Sartigan ajoute qu’il a aussi été très « touché » par la démarche d’Amélie Carrier décrite plus haut.
Mais les deux élus demeurent mal à l’aise avec le fonctionnement actuel du programme de subvention, qui devrait être « modifié et bonifié », selon eux. Les régions, avancent-ils, devraient recevoir des fonds «équitables» avec ceux de la capitale et de la métropole, soulignent-ils.
Interrogé à ce sujet, le nouveau député caquiste de Beauce-Sud, Samuel Poulin, rétorque que « c’est un programme qui fonctionne » et souligne qu’il faut « que le service demeure ».