Airbus discute de présent et d’avenir avec ses fournisseurs
Le constructeur européen insiste sur l’augmentation de production à Mirabel
La haute direction d’Airbus tient cette semaine une conférence avec les fournisseurs de l’avion A220 afin de parler de l’avenir mais aussi du présent, lequel repose entre autres sur la question des coûts et de la vitesse à laquelle ils peuvent livrer les pièces.
« Les discussions, pour certaines, sont très positives. C’est clair aussi que lorsqu’on demande des efforts économiques, ce n’est pas toujours facile », a dit Philippe Balducchi, patron du programme anciennement nommé CSeries.
Airbus fait cependant valoir aux fournisseurs, a ajouté M. Balducchi lors d’une rencontre avec la presse mercredi, que la prise de contrôle du programme par un joueur aéronautique plus grand que Bombardier leur donne accès à un éventail de possibilités d’affaires élargi.
Même avant que n’entre en vigueur le contrat sur le contrôle du programme, cet été, Airbus avait annoncé ses couleurs haut et fort en affirmant publiquement qu’un de ses objectifs consisterait à augmenter le rythme de production à Mirabel tout en resserrant la structure de coûts.
Cela permet d’asseoir les discussions «sur une base beaucoup plus stratégique», a ajouté lors de la rencontre avec les médias le président de la division des avions commerciaux d’Airbus, Guillaume Faury, qui deviendra en avril 2019 le nouveau président exécutif de l’entreprise.
Connue pour le succès planétaire de son monocouloir A320, Airbus est aux commandes depuis le 1er juillet après s’être engagée à mettre en oeuvre sa force de vente pour mieux commercialiser l’appareil. Les critiques digèrent mal que l’entreprise européenne n’a pas eu à débourser d’argent sonnant pour avaler un programme qui avait pourtant coûté des milliards à Bombardier dans un contexte où l’entreprise montréalaise, aux prises avec de graves problèmes en 2015, avait même dû solliciter des appuis financiers gouvernementaux.
Le programme a « besoin de trouver un point de fonctionnement économique », a affirmé le président de la division des avions commerciaux d’Airbus, Guillaume Faury, également sur place pour la rencontre. C’est lui que le conseil d’administration a choisi pour succéder à l’actuel président exécutif d’Airbus, Tom Enders. Invité à dire combien de temps pourrait s’écouler avant de trouver ce point, M. Faury a dit que les « temps de retour sur l’investissement des programmes d’avion sont toujours très longs ».
Lancé dans les années 2000, le programme compte à l’heure actuelle environ 400 commandes. À cela s’ajoutent deux lettres d’intention dévoilées en juillet lors du salon aéronautique de Farnborough, ce qui pourrait porter le total à environ 520 appareils. Parmi les grands clients figurent Air Canada et Delta, qui mettra en service son premier appareil en janvier 2019.
Airbus détient 50,01 % du programme, comparativement à 33,55 % pour Bombardier et à 16,44% pour Investissement Québec, selon les plus récents documents financiers de Bombardier.
La planification d’une chaîne de montage en Alabama, où sont déjà construits des avions A320, va bon train, selon l’entreprise. Le complexe devrait être capable de livrer ses premiers appareils en 2020, à un rythme d’environ quatre avions par mois. Bombardier a livré 17 appareils CSeries à partir de Mirabel en 2017, et Airbus a pour objectif de doubler ce nombre.
« Il est trop tôt pour dire combien seront livrés à partir de Mirabel et combien le sont depuis Mobile », a dit M. Balducchi. Environ 2200 personnes travaillent dans le cadre du programme à Mirabel, où Airbus s’est engagé à maintenir les activités jusqu’en 2041.
Un des défis consiste à augmenter le rythme de production à Mirabel, mais Airbus doit gérer des enjeux liés entre autres à la qualité des pièces et à la vitesse à laquelle les fournisseurs sont capables de les envoyer, a dit M. Faury.
La direction de Bombardier a déjà affirmé publiquement que l’entreprise était acculée au pied du mur en 2015. À l’époque, les ressources financières du constructeur étaient plombées par un programme plus coûteux que prévu et des commandes qui tardaient à se présenter.
Le gouvernement du Québec, par l’entremise de son bras financier Investissement Québec, a injecté un milliard de dollars américains dans le programme en échange d’une participation en capital-actions. La Caisse de dépôt, de son côté, a investi dans la division du matériel roulant. Le gouvernement fédéral a offert un prêt de 372,5 millions, remboursable sur quatre ans.
Les discussions, pour certaines, sont très positives. C’est clair aussi que lorsqu’on demande des efforts » économiques, ce n’est pas toujours facile.
PHILIPPE BALDUCCHI