Cannabis et cryptomonnaie dans la mire du Commissaire au lobbyisme
L’industrie naissante du cannabis légal au Québec est tenue à l’oeil par le Commissaire au lobbyisme, qui vient de lancer un vaste programme de surveillance et de sensibilisation aux règles d’influence de titulaires de charges publiques par les acteurs de ce milieu, a découvert Le Devoir. Le secteur de la cryptomonnaie, producteur des fameux bitcoins, est visé par le même programme qui cherche à faire entrer ultimement dans la légalité des activités de lobbying non déclarées.
« Nous sommes face à de nouvelles industries qui n’existaient pas il y a quelques années, a résumé en entrevue le commissaire, Jean-François Routhier. De façon générale, nous sentons un plus grand respect pour la transparence et l’éthique en matière de lobbying au Québec, mais je ne serais pas surpris qu’au terme de ces interventions, nous puissions avoir des inscriptions additionnelles au registre. »
En vertu de la loi provinciale, les personnes cherchant à faire modifier une loi, un règlement municipal ou à tirer un avantage particulier d’un organisme étatique pour la bonne marche de leurs affaires ont l’obligation de rendre publiques ces tentatives d’influence en s’inscrivant au registre des lobbyistes. L’espace y enregistre, dans les grandes lignes, les objectifs de l’influenceur et les organismes qu’il a ciblés. Il ne donne pas accès aux détails des communications, ni à la temporalité des rencontres et aux statuts des fonctionnaires ou élus rencontrés.
Dans les derniers mois, le personnel du Commissariat au lobbyisme a recensé 52 entreprises oeuvrant dans le monde du cannabis susceptibles d’avoir des activités de lobbying en cours. Sur ce nombre, 12 (23 %) à peine ont actuellement des mandats inscrits au registre. Dans le secteur de la cryptomonnaie, sur les 42 compagnies importantes actives au Québec, à peine 3 (7 %) ont dévoilé leurs projets de communications stratégiques avec des élus ou des fonctionnaires.
Sans être en mesure de juger si ces données témoignent d’une sous-inscription d’activité d’influence, le Commissaire dit qu’elles lui donnent l’occasion de faire campagne pour promouvoir la loi et ses obligations au sein de ces milieux, tout comme auprès des fonctionnaires et des élus qui pourraient être sollicités par des entreprises oeuvrant dans ces domaines.
À titre d’exemple, la compagnie Canopy Growth, un important producteur de cannabis au pays, a embauché un lobbyiste jusqu’en juillet prochain pour s’assurer de la mise en place de « mesure réglementaire raisonnable » dans le cadre de l’actuelle légalisation, indique le registre. L’association canadienne des pharmaciens de quartier agit également dans les coulisses du pouvoir dans l’espoir de jouer « un rôle accru » dans la « distribution du cannabis thérapeutique », peut-on y lire.
Le non-respect des règles d’inscription au registre peut entraîner des poursuites pénales ou civiles. « Notre objectif n’est pas d’en arriver là, dit Me Routhier, mais bien de faire de la surveillance et de la sensibilisation en même temps. »
Le gardien de l’éthique a lancé un programme de surveillance de ces nouvelles industries