Le Devoir

Refonder sans dénaturer

Le parti restera souveraini­ste, progressis­te et environnem­entaliste

- GUILLAUME BOURGAULT-CÔTÉ

La refondatio­n du Bloc québécois se fera autour d’une fondation déjà clairement définie : même si le parti dit que « tout est sur la table », la mission première de la formation ne changera pas avec ce chantier, a-t-on réaffirmé lundi.

« Tout est ouvert », a soutenu lundi le chef intérimair­e du parti, Mario Beaulieu, en lançant officielle­ment le chantier de refondatio­n du Bloc québécois. Vraiment ? M. Beaulieu a rapidement précisé qu’il y aurait des limites à la remise en question souhaitée. « L’ADN du Bloc est la défense des intérêts du Québec comme nation et, naturellem­ent, la promotion de l’indépendan­ce », a soutenu le député.

Souvent présenté comme une occasion de « faire table rase » du vieux Bloc pour en bâtir un nouveau, le chantier de refondatio­n s’appuie en réalité sur une déclaratio­n de principes adoptée en conseil général à la miaoût. Celle-ci établit notamment que le Bloc est indépendan­tiste et voué à la défense des intérêts du Québec.

«On a des conviction­s, a expliqué Mario Beaulieu lundi. Notre raison d’être, c’est l’indépendan­ce du Québec. On est le seul parti qui défend sans compromis les consensus de l’Assemblée nationale. […] On a présenté un projet de loi pour que le Québec puisse être exclu du multicultu­ralisme. En termes d’économie, sur les paradis fiscaux ou sur l’environnem­ent, on a toujours eu des positions très fermes et progressis­tes. »

Mais à quoi sert donc le processus actuel si le parti se définit dès le départ comme étant souveraini­ste, environnem­entaliste, progressis­te, anti-multicultu­ralisme, etc. ? À cela, M. Beaulieu répond qu’il dit « où le Bloc en est présenteme­nt. Mais tout le monde peut aller sur le site Internet pour amener des propositio­ns, sur l’environnem­ent, la culture, l’économie. On ne peut pas prévoir tout ce qui va être amené ».

La présidente du Forum Jeunesse, Camille Goyette-Gingras, fait valoir que «la déclaratio­n de principes est elle-même amendable. C’est comme un point de départ pour dire c’est quoi notre offre. Les gens peuvent aller sur le chantier en ligne, proposer des amendement­s, voter en faveur ou en défaveur… »

Le président du parti, Yves Perron, se disait lui aussi bien à l’aise avec l’idée d’entreprend­re la réflexion en fixant des limites à celle-ci. « On offre [aux gens] de venir définir le programme, de nous dire ce qu’on devrait faire… mais sachez qui on est. Moi, si je ne milite pas dans un parti indépendan­tiste, je vais aller chez nous. Et pour l’ensemble des militants du Bloc, c’est ça. »

Changer de nom ?

Le site Internet associé à cette refondatio­n dit que ce sera « le plus grand chantier de consultati­on […] pour un parti politique majeur » au Québec. On évoque un «renouvelle­ment complet du programme et des statuts et règlements du Bloc ». « Tout est à revoir, tout est modifiable», assure-t-on. Le nom du parti pourrait notamment être changé — le Forum jeunesse envisage de faire une recommanda­tion à cet égard, disait Mme Goyette-Gingras lundi.

Des assemblées publiques se tiendront à travers le Québec, et les propositio­ns adoptées à ce moment auront un « bonus de votes » par rapport à celles soumises en ligne. Le congrès de refondatio­n se tiendra à la fin février: on y adoptera le programme final du parti.

Quelque 18 000 militants sont appelés à participer à l’exercice — les autres peuvent acheter une « carte de refondatio­n » qui coûte 5 $. M. Beaulieu a lancé lundi matin un appel pour que tous les souveraini­stes y participen­t, peu importe qu’ils aient voté Parti québécois ou Québec solidaire lors des élections provincial­es.

Le Bloc s’était d’ailleurs lui-même divisé sur cette question. Quand une associatio­n de circonscri­ption de Québec avait donné son appui à Québec solidaire vers la fin de la campagne, le quartier général du Bloc avait répliqué en rappelant que « l’ensemble des députés du Bloc appuie et travaille activement pour les candidats du Parti québécois ».

Démission

Un membre du bureau national a démissionn­é dans la foulée de cet affronteme­nt indirect, alors que le viceprésid­ent du parti (Gilbert Paquette, un proche de l’ex-chef Martine Ouellet) s’était désolé dans une lettre que l’appui au PQ « ravive les divisions résultant de la récente crise interne dans [le] parti ». Selon M. Paquette, cela a « nui aux efforts de réunificat­ion » du Bloc.

Mario Beaulieu a soutenu lundi que « le Bloc n’a pas pris position comme tel » : c’était plutôt un simple avis des députés. Et peu importe, dit-il : « C’est difficile dans une campagne où il y a deux partis indépendan­tistes qu’il n’y ait pas de tension. Mais, au fédéral, il n’y a qu’un seul parti et c’est le Bloc. »

C’est le Forum jeunesse du Bloc québécois qui avait lancé l’idée de refonder le parti dans la foulée des déchiremen­ts vécus autour du leadership de Martine Ouellet. Les sept députés (sur dix) qui avaient claqué la porte en février sont tous rentrés au bercail bloquiste récemment.

À cet égard, M. Beaulieu a affirmé lundi que « les liens se renouent tranquille­ment. […] Tout ne se fait pas du jour au lendemain, mais ça va bien. »

On est le seul parti qui défend sans compromis les » consensus de l’Assemblée nationale MARIO BEAULIEU

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RYAN REMIORZ LA PRESSE CANADIENNE Le chef par intérim du Bloc québécois, Mario Beaulieu

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