En sol québécois
En 1989, j’ai croisé Bernard Landry tout près de l’UQAM. Je le connaissais déjà depuis nos études doctorales à Paris. Je n’ai pas pu m’empêcher de l’arrêter pour lui dire combien j’avais apprécié ce qu’il venait de dire lors d’une interview à une chaîne de Radio-Canada. C’était dans le contexte des débats qui ont précédé la commission Bélanger-Campeau. À un journaliste qui lui demandait ce qui définit un ou une Québécois(e), il avait répondu
« est Québécois celui qui habite en sol québécois ». C’est cette phrase qui m’a décidée à me rallier au Parti québécois. J’ai par la suite gagné sa confiance lors de ma nomination à un des postes les plus difficiles de la diplomatie québécoise, la représentation du Québec à Washington durant la période référendaire de 1995. Près de trente ans plus tard, nous sommes bien loin de la représentation de l’identité québécoise désignant tous ceux qui résident en sol québécois. Il m’arrive de me demander si aujourd’hui, devant un certain discours issu d’un nationalisme conservateur, je trouverais encore ce motif fondamental pour soutenir l’objectif de souveraineté, ce « nous » désignant tous les résidents du Québec. Bernard Landry a été un bâtisseur et un modèle pour les souverainistes. Marcher dans ses pas et ne pas tergiverser sur l’identité québécoise est une condition de réussite de l’objectif que nous poursuivons.
Anne Legaré, professeure de science politique à l’Université du Québec à Montréal, ancienne déléguée du gouvernement du Québec en Nouvelle-Angleterre
6 novembre 2018