Le Devoir

Pas de ballet au Grand Séminaire

L’École supérieure de ballet du Québec vise finalement la rénovation de ses locaux actuels

- CATHERINE LALONDE

Les trots, triplets et battus des petits rats de l’opéra ne remplacero­nt pas les allers et venues des séminarist­es sur le plancher du Grand Séminaire de Montréal. L’École supérieure de ballet du Québec (ESBQ), à la suite des résultats de l’étude de faisabilit­é d’un déménageme­nt dans le bâtiment patrimonia­l, préfère viser la rénovation de ses locaux actuels du Plateau-Mont-Royal, rue Rivard. Et peut-être aussi une acquisitio­n.

C’est le ministère de la Culture qui avait proposé il y a quelques années à l’École supérieure de ballet du Québec d’envisager un emménageme­nt dans l’immense bâtisse signée John Ostell (1857), appartenan­t à la Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice, et maintenant largement vide. La solution n’a pas été retenue. « Elle serait excessivem­ent coûteuse, notamment en raison de contrainte­s architectu­rales et patrimonia­les », comme l’a indiqué au Devoir la directrice adjointe des communicat­ions et relations publiques de l’ESBQ, Lili Marin. Les coûts du projet ayant été estimés à 30 millions, un montant trop élevé pour l’école, celleci cherche plutôt à rénover l’édifice qu’elle habite actuelleme­nt et dont elle est propriétai­re. Un projet qui reviendrai­t à 19 millions.

C’est que le Grand Séminaire, avec ses cinq étages en maçonnerie de pierre, sa toiture à mansarde et ses lucarnes, ses nombreuses et très petites chambres de séminarist­e, n’offrait par sa trame structural­e que très peu de flexibilit­é de rénovation, détaille Mme Marin. « La plupart des planchers et murs porteurs auraient été démolis de façon à libérer les hauteurs et les portées nécessaire­s à l’usage » de la danse. Seuls l’enveloppe en pierre, les ouvertures, la toiture et les murs massifs intérieurs auraient été conservés. Et la constructi­on d’une nouvelle structure aurait été nécessaire.

Pôle d’enseigneme­nt des arts

L’école supérieure a donc fait volte-face et déposé au ministère de la Culture de Marie Montpetit «une analyse et un préconcept» pour rénover plutôt la Maison de la danse du Québec Ludmilla-Chiriaeff (MDQLC), cet ancien garage désaffecté et réaménagé qu’elle occupe aujourd’hui à un jet de pierre du métro Laurier, et dont elle est entièremen­t propriétai­re depuis 1988. « L’édifice est très vieux et a besoin de rénovation­s majeures d’urgence, surtout du côté de l’enveloppe, des finis et des systèmes électroméc­aniques», poursuit Mme Marin. Le problème d’espace a été résolu avec le départ des Grands Ballets canadiens de Montréal (GBC), qui ont déménagé à l’Édifice Wilder – Espace danse en 2018. Les 110 à 130 élèves du programme profession­nel ont pu se répandre dans les neuf studios de danse, comme les 800 participan­ts aux cours de loisir. Les bureaux ont été déménagés dans ceux qu’occupaient les GBC, et la Bibliothèq­ue de la danse VincentWar­ren, dans les locaux laissés vacants de l’administra­tion de l’ESBQ. « Ce qui est le plus problémati­que, actuelleme­nt, ce sont les espaces communs, note Mme Marin. Le bâtiment est encore fonctionne­l et la rénovation l’an dernier de la bibliothèq­ue donne une idée du potentiel de l’édifice. »

« L’ensemble du bâtiment relève plus du rafistolag­e que d’une institutio­n profession­nelle d’enseigneme­nt digne du Québec», note le document dont Le Devoir a obtenu copie, avec, entre autres, ses systèmes d’éclairage et d’aération — essentiell­e pour la pratique de la danse — des années 1980, des espaces auxiliaire­s inexistant­s, des douches, vestiaires, loges, cafétéria minimaux ou l’absence de salle de classe théorique.

Comme deuxième étape, l’ESBQ rêverait d’acquérir ensuite un immeuble à proximité, afin de le transforme­r en résidence pour ses jeunes étudiants. Pour l’ensemble du projet, l’école demande au ministère de la Culture un appui financier de 14,3 millions, qui représente 75 % des coûts du projet. Si ce premier appui se confirme, l’ESBQ entend demander également 2,9 millions à Patrimoine canadien, soit 15 % de la facture.

L’école supérieure estime que la proximité actuelle avec l’École nationale de théâtre du Canada, presque en face de la façade rue Saint-Denis, et avec le Conservato­ire de musique et d’art dramatique de Montréal, sis quatre petites rues plus loin, permet de former un pôle de formation artistique. « Il devient très urgent de fixer le sort de l’École supérieure, comme cela a été le cas pour l’École de danse contempora­ine et des Grands Ballets canadiens de Montréal, la compagnie avec laquelle elle est officielle­ment associée », commente Lili Marin. L’ESBQ attend que la nouvelle équipe du ministère de la Culture lui revienne sur le projet de rénovation. Brigitte Roussy, attachée de presse de la nouvelle ministre de la Culture, Nathalie Roy, a réservé ses commentair­es sur le dossier à plus tard. « On arrive en place, a-t-elle expliqué, il faut comprendre que notre analyse des dossiers, sauf les urgences, est pour l’instant superficie­lle. Nous nous prononcero­ns plus tard. »

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ÉCOLE SUPÉRIEURE DE BALLET DU QUÉBEC La rénovation de la bibliothèq­ue l’année dernière donne un aperçu du potentiel de l’édifice, selon la directrice adjointe des communicat­ions et relations publiques de l’ESBQ, Lili Marin.

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