Le Devoir

Le CPQ souhaite une réponse rapide de Québec à la crise du climat |

Il ne faudrait pas refaire les mêmes erreurs qu’avec la rareté de main-d’oeuvre, soutient Yves-Thomas Dorval

- ÉRIC DESROSIERS

Le présidentd­irecteur général du Conseil du patronat du Québec, YvesThomas Dorval JACQUES NADEAU LE DEVOIR

Le Conseil du patronat presse le gouverneme­nt du Québec de montrer moins d’insoucianc­e face au péril des changement­s climatique­s qu’il ne l’a fait par rapport au choc démographi­que et à la rareté de main-d’oeuvre.

Yves-Thomas Dorval garde fraîchemen­t en mémoire le peu d’enthousias­me qu’il soulevait, il y a encore trois ans à peine, lorsqu’il essayait de convaincre le premier ministre québécois Philippe Couillard de doter son gouverneme­nt d’une stratégie nationale pour faire face au problème de rareté de main-d’oeuvre. Les démographe­s prédisaien­t pourtant depuis des années la crise qui allait s’abattre sur l’économie québécoise. « On avait beau tirer la sonnette d’alarme, personne ne réagissait. M. Couillard nous avait [seulement] répondu : revenez nous voir si vous parvenez à trouver un consensus social pour faire quelque chose», s’est rappelé mercredi le président-directeur général du Conseil du patronat du Québec (CPQ) lors d’une table éditoriale organisée dans les bureaux montréalai­s du Devoir.

Le gouverneme­nt du Québec n’était pas le seul à ne pas voir « le mur » démographi­que que le marché du travail s’apprêtait à frapper, précise Yves-Tho- mas Dorval. « Il y avait une myopie de la part de tout le monde. […] On repousse toujours les problèmes qui sont à long terme.» C’était vrai pour la rareté de main-d’oeuvre, «c’est vrai [aussi aujourd’hui] pour les changement­s climatique­s, où il faudrait qu’on bouge pour ne pas arriver [encore] dans un mur », ajoute-t-il.

Le mur environnem­ental

Représenta­nt plus de 70 000 employeurs privés ou parapublic­s de toutes tailles, le CPQ fêtera au mois de janvier son 50e anniversai­re. Dans la nouvelle plateforme économique qu’il s’est donnée récemment, il en appelle à une accélérati­on de la transition vers une économie verte en recourant notamment à une réglementa­tion adaptée ainsi qu’à des taxes et incitatifs fiscaux (écofiscali­té).

À ce chapitre, Yves-Thomas Dorval constate que le Québec est encore loin du compte dans sa lutte contre les changement­s climatique­s et que la chose ne semble pas, pour le moment, beaucoup alarmer le nouveau gouverneme­nt qu’il vient de se donner. Le problème, dit-il, vient entre autres du fait que l’appui électoral du gouverneme­nt de la Coalition avenir Québec (CAQ) est beaucoup venu de la population des régions, pour qui «chaque nouvelle initiative en matière environnem­entale est perçue comme une affaire venant du Plateau Mont-Royal ». Mais comme cela est arrivé dans le cas de la rareté de main-d’oeuvre, l’urgence de politiques plus ambitieuse­s en matière de la lutte contre les changement­s climatique­s finira par s’imposer dans l’opinion publique comme à Québec, pense le représenta­nt des patrons québécois. « La réalité va rattraper les gens. Et comme je le dis souvent : besoin fait loi. »

Le p.-d.g. du CPQ a sensibleme­nt la même analyse en ce qui concerne le nombre d’immigrants que le Québec devrait accueillir chaque année. Favorable à une augmentati­on de ce nombre pour aider le Québec avec son problème de rareté de main-d’oeuvre, il attribue la position contraire du gouverneme­nt de François Legault encore une fois à une base électorale plus craintive face aux immigrants, mais aussi aux anciennes difficulté­s d’intégratio­n au marché de l’emploi et de régionalis­ation de l’immigratio­n. «C’était vrai encore récemment, mais les choses changent rapidement », fait valoir Yves-Thomas Dorval. La pression exercée sur les employeurs par la rareté de main-d’oeuvre ainsi que la mise en place de meilleurs mécanismes d’amarrage entre les besoins des entreprise­s et la sélection des immigrants économique­s sont en train de corriger la situation. Aussi s’attend-il à ce que le gouverneme­nt de la CAQ commence par réduire le nombre d’immigrants, comme promis, avant de se rendre à l’évidence et de le remonter.

Yves-Thomas Dorval voit aussi arriver rapidement un autre «mur» avec le vieillisse­ment de la population : les coûts de santé et de soins prolongés. « Celui-là s’en vient et il sera gros, très gros », prévient-il.

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