L’idée de François Legault
Le passage du troisième lien par l’île d’Orléans ne sera pas plus acceptable parce qu’on décide d’enfouir les lignes à haute tension d’Hydro-Québec, plaide le préfet de la MRC Harold Noël, qui a été très surpris par la suggestion du premier ministre François Legault mercredi.
Dans son allocution d’inauguration de la session parlementaire, ce dernier a affirmé qu’on pourrait profiter du projet du troisième lien pour démanteler les pylônes qui enlaidissent les paysages de l’île. « Loin de vouloir défigurer l’île d’Or- léans, on peut même imaginer démanteler les pylônes d’Hydro-Québec qui gâchent le paysage et faire passer les câbles électriques par le troisième lien », a-t-il déclaré.
Une suggestion qui surprend, puisque les élus de l’île se font dire depuis « plusieurs années » que l’enfouissement des fils est « impossible », explique le préfet Noël. « Hydro-Québec nous avait informés que la puissance de cette ligne-là est beaucoup trop forte pour être enfouie, contrairement à celle qui avait été enfouie à Portneuf. »
Les trois lignes d’Hydro-Québec qui passent à cet endroit ont une tension de 735 000 volts, la plus élevée sur le réseau. À l’heure actuelle, au Québec, aucune ligne de cette puissance ne passe sous terre. À titre comparatif, la ligne du tunnel de Grondines, sous le fleuve, a une tension de 450 000 volts.
Chez Hydro-Québec, on n’a pas voulu dire mercredi dans quelle mesure l’idée de François Legault était réaliste. « Nous allons donner suite à la demande du premier ministre et lui revenir avec les différentes possibilités », a simplement réagi le porte-parole, Maxence Huard-Lefebvre.
Chose certaine, l’enfouissement des fils serait très apprécié sur l’île, avance le préfet. Or il ne rendrait pas le passage d’une autoroute sur l’île plus acceptable. « C’est clair qu’on n’est pas ouverts à ça. »
Le discours du premier ministre ne précise pas quelle forme prendrait le futur troisième lien, mais réaffirme qu’il se fera. « On va aller de l’avant », a déclaré M. Legault en écorchant au passage les critiques du projet « qui ont décidé d’en faire un symbole idéologique anti-environnement ».
François Legault affirme même que le troisième lien peut devenir « un projet de développement durable », en reliant le projet de tramway de Québec à la Rive-Sud.
Une affirmation qui en a fait bondir plusieurs. « Il n’y aura pas de transport collectif efficace parce que le troisième lien aboutit dans une zone rurale. Il n’y a pas de densité dans Bellechasse [sur la Rive-Sud à l’est de Lévis] », a réagi le porteparole de la Fondation David Suzuki. « Et si on développe de la densité à l’île d’Orléans et dans Bellechasse, ça s’appelle de l’étalement urbain. »
« C’est sûr que c’est une bonne idée [d’enfouir les fils] », répond quant à lui Étienne Grandmont d’Accès transports viables. « Maintenant, est-ce que ça rend le projet plus acceptable ? Absolument pas. Rappelons qu’on n’a toujours pas fait la démonstration qu’un troisième lien allait être utile et quel impact ça aurait. »
Du côté des défenseurs du patrimoine, le scepticisme l’emportait aussi, mercredi. « L’enfouissement des fils pourrait grandement améliorer la qualité visuelle des paysages de l’île d’Orléans », avance la directrice d’Action patrimoine, Renée Genest. « Par contre, on ne considère pas que c’est un laissezpasser pour un quelconque troisième lien. »