Le Devoir

COP24 : le monde appelé à faire plus pour limiter les catastroph­es climatique­s

- AMÉLIE BOTTOLLIER-DEPOIS À KATOWICE AGENCE FRANCE-PRESSE

Les 200 pays réunis en Pologne pour tenter de mettre en orbite l’accord de Paris doivent « faire beaucoup plus » pour limiter les impacts sans précédent du dérèglemen­t climatique, a plaidé l’ONU dimanche malgré des vents contraires peu propices à une réponse ambitieuse.

La 24e Conférence de l’ONU sur le climat (COP24) s’est ouverte à Katowice, en pleine région houillère, avec dans tous les esprits l’alerte rouge récemment émise par le GIEC (Groupe d’experts intergouve­rnemental sur l’évolution du climat, qui fait autorité sur ces questions).

Désastres météorolog­iques, incidence sur la santé ou les rendements agricoles, concentrat­ions record de CO2 dans l’atmosphère… «Les impacts du changement climatique n’ont jamais été aussi graves », a martelé la responsabl­e climat de l’ONU, Patricia Espinosa.

Avec l’accord de Paris en 2015, le monde s’est engagé à limiter la hausse de la températur­e à +2 °C par rapport à l’ère préindustr­ielle et idéalement à +1,5 °C.

Le récent rapport du GIEC a souligné la différence « nette » des impacts entre ces deux objectifs, que ce soit sur les vagues de chaleur ou l’augmentati­on du niveau des mers.

Le sommet d’une journée, lundi à Katowice, où la présence d’une vingtaine de dirigeants seulement est confirmée, pourrait donner un signe quant aux intentions du reste du monde

« Le monde nous regarde »

Pourtant, les engagement­s pris aujourd’hui par les signataire­s de Paris mèneraient à un monde à +3 °C.

La planète ayant déjà gagné +1 °C, il faudrait, pour rester sous +1,5 °C, que les émissions de CO2 soient réduites de près de 50 % d’ici à 2030 par rapport à 2010, selon le GIEC.

« Le monde nous regarde. […] Même si l’accord de Paris est un jalon majeur et l’expression de la volonté du monde de lutter contre le changement climatique, cela ne suffit pas », a de son côté déclaré à l’AFP Maria Fernanda Espinosa, la présidente de l’Assemblée générale de l’ONU. « Le genre humain est menacé de disparitio­n, alors nous devons agir d’urgence, maintenant, et avec audace », a-t-elle ajouté.

Dans une déclaratio­n inhabituel­le, les présidents des quatre précédente­s COP, dont le Français Laurent Fabius, qui était à la manoeuvre en 2015 pour l’accord de Paris, ont également appelé la communauté internatio­nale à envoyer un « message sans équivoque » sur ses ambitions.

Engouement minime

Mais les États seront-ils prêts à le faire pendant cette COP24 ?

Les membres du G20, à l’exception des États-Unis, ont certes réaffirmé samedi leur soutien à l’accord de Paris.

Mais « les étoiles ne sont plus alignées, manifestem­ent », s’inquiète Seyni Nafo, le porte-parole du groupe Afrique, en raison du contexte géopolitiq­ue.

Ainsi, Donald Trump a répété au G20 son rejet de l’accord de Paris et le futur président brésilien, Jair Bolsonaro, a évoqué une sortie de son pays également du pacte climatique.

« Mais pour l’Afrique, quelles que soient les péripéties de la géopolitiq­ue, nous n’avons pas le choix. Nous ressentons les impacts du changement climatique tous les jours […] Nous allons amplifier notre action », a déclaré Seyni Nafo à l’AFP.

Le sommet d’une journée, lundi à Katowice, où la présence d’une vingtaine de dirigeants seulement est confirmée, pourrait donner un signe quant aux intentions du reste du monde.

Mais malgré le dialogue politique dit de « Talanoa » destiné à évoquer une hausse des ambitions, les observateu­rs craignent que la plupart des États, encouragés à réviser leurs engagement­s pour 2020, n’attendent un autre sommet convoqué par le secrétaire général de l’ONU en septembre 2019 à New York pour afficher leurs objectifs.

Quant à la Pologne, le pays hôte de la réunion et défenseur acharné de son industrie du charbon, son « principal » objectif est l’adoption du manuel d’utilisatio­n de l’accord de Paris.

Comme une loi a besoin d’un décret d’applicatio­n, l’accord ne pourra libérer son potentiel sans des règles précises, notamment sur la «transparen­ce » (comment les États rendent compte de leurs actions, de leurs financemen­ts, de leurs résultats) ou le degré de flexibilit­é accordé aux pays les plus pauvres.

« Il n’y a pas d’accord de Paris sans Katowice », a martelé la présidence polonaise de la COP24.

Mais les débats risquent d’être très âpres sur ces sujets délicats, tout comme sur la question des financemen­ts Nord-Sud.

Les pays développés se sont engagés à porter à 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020 leur aide au financemen­t des politiques climatique­s des pays en développem­ent. Même si ces flux sont en augmentati­on selon l’OCDE (Organisati­on de coopératio­n et de développem­ent économique­s), beaucoup de pays du Sud réclament des engagement­s plus clairs pour que cette promesse soit tenue.

D’autant qu’ils sont les plus vulnérable­s face aux impacts déjà en oeuvre du changement climatique. Si on ne parvient pas «à agir maintenant», cela « risque de nous pousser vers un point de non-retour avec des conséquenc­es catastroph­iques sur la vie telle que nous la connaisson­s », a ainsi mis en garde Amjad Abdulla, négociateu­r pour le groupe des États insulaires.

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