Le Devoir

Plaire, aimer et courir vite, un film tour à tour grave, léger, insouciant, sans aucun sentimenta­lisme larmoyant

L’aventure enneigée La course des tuques, toujours inspirée d’un classique inusable

- ANDRÉ LAVOIE COLLABORAT­EUR

Pour de nombreux petits devenus grands, l’imposante série des Contes pour tous se résume souvent à ce coup de maître d’André Melançon réalisé en 1984 : La guerre des tuques. De célèbres répliques, les paysages enneigés de Charlevoix, ses personnage­s attachants, et ce chien dont le destin allait permettre à bien des jeunes spectateur­s d’apprivoise­r les affres du deuil, autant d’éléments qui ont contribué à donner à ce film un statut privilégié. Particuliè­rement pendant les Fêtes.

Il a fallu quelques décennies, et bien des progrès technologi­ques, pour en arriver à une première variation animée, La guerre des tuques 3D, qui revisitait ce petit monde en lui insufflant une énergie que le cinéma en prises de vue réelles ne pouvait offrir dans les années 1980. Le pari fut réussi, et les mauvaises langues diront qu’il était gagné d’avance dans la mesure où les enfants d’autrefois y ont amené en masse leur progénitur­e.

C’était peut-être aussi la preuve que cette ribambelle de gamins espiègles — jamais surveillés par des adultes, apparemmen­t tous perdus dans le blizzard ! — touche une corde sensible, illustrant pour plusieurs des chimères : la franche et indéfectib­le camaraderi­e, et le plaisir tout simple de jouer dehors… Encore une fois, après ce premier épisode signé Jean-François Pouliot et en bonne partie calqué sur l’original avec cette prise d’une Bastille entièremen­t faite de neige, La course des tuques s’éloigne à peine de ce canevas et renoue avec les artifices qui ont favorisé sa renaissanc­e, dont une trame sonore omniprésen­te, accrocheus­e, et un brin assourdiss­ante.

Cette fois, Benoît Godbout et François Brisson tiennent fermement les rênes de cette aventure qui n’a parfois rien à envier aux cavalcades des films de bagnoles. Car on a délaissé les balles de neige au profit des courses de luges, et un nouveau venu dans le village, Zac (voix de Mehdi Bousaidan), porte ombrage au « génie » de François les Lunettes (voix d’Hélène Bourgeois-Leclerc, qui s’amuse ferme), lui dérobant un titre de champion qu’il conservait depuis longtemps. Après cette cuisante défaite, et l’accumulati­on de preuves irréfutabl­es de la duperie du vainqueur, une compétitio­n revanche s’organise, permettant à certaines figures de montrer l’étendue de leurs maladresse­s, dont l’incontourn­able Chabot (voix de Gildor Roy, toujours aussi rigolo), ou à d’autres de se prendre pour des concurrent­es à l’émission La voix, comme Charlie (Ludivine Reding), cousine du malveillan­t Zac.

Dans leur grange déglinguée et au milieu de paysages bucoliques, ce petit monde se déploie avec une frénésie comparable aux émissions jeunesse, celles où l’on parle vite et fort, comme si la nature n’avait aucun effet apaisant sur ce bataillon de personnage­s au profil bien campé, mais d’importance inégale. Cela ne devrait en rien altérer le plaisir fugace des enfants, qui seront ici en territoire plus que familier, entièremen­t reconnaiss­able dès les premières minutes, conçu pour leur bon plaisir. Et avec un chien dont la ténacité fougueuse semble annoncer que ses maîtres sont prêts pour un autre tour de piste. La course des tuques ★★★

Film d’animation de François Brisson et Benoît Godbout. Avec les voix de Gildor Roy, Hélène Bourgeois-Leclerc, Mehdi Bousaidan, Ludivine Reding. Québec, 2018, 89 min.

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 ?? LES FILMS SÉVILLE ?? Dans La course des tuques, on retrouve la ribambelle de gamins espiègles — jamais surveillés par des adultes, apparemmen­t tous perdus dans le blizzard ! — qui a fait le succès de La guerre des tuques 3D.
LES FILMS SÉVILLE Dans La course des tuques, on retrouve la ribambelle de gamins espiègles — jamais surveillés par des adultes, apparemmen­t tous perdus dans le blizzard ! — qui a fait le succès de La guerre des tuques 3D.

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