Un CentreSud intime et poétique
Pôle Sud raconte le quartier à travers les confidences de huit anonymes magnifiques
L’hybridité de Pôle Sud, documentaire filmique d’abord présenté à la scène dans le giron d’Espace libre, inverse ses pôles alors que le spectacle imaginé par Anaïs BarbeauLavalette et Émile Proulx-Cloutier passe à l’écran d’Artv. Une mutation naturelle, qui ne dépare en rien cet objet profondément désarmant embelli par la puissance d’une parole spontanée donnée en toute confiance.
Pôle Sud raconte le Centre-Sud en instantanés, à travers les confidences de huit humains magnifiques qui ont accepté de s’ouvrir au micro d’Anaïs. De ces 40 heures d’abandon, Émile a tiré le suc sur scène. Les huit voix habitent un plateau que leurs corps animent en parallèle, enveloppés par des habillages sonores subtils et des jeux d’éclairage qui encadrent et découpent le spectacle comme le ferait une caméra. Cet état de présence authentique était l’une des grandes forces de Pôle Sud au théâtre.
Si cette grâce se perd à l’écran, on gagne autre chose dans l’adaptation cinématographique délicate de Mathieu Vachon. En s’immisçant dans les coulisses de la production, c’est la profondeur des liens tissés au fil du temps qui émeut le plus. «Parle trois heures de ta vie à Anaïs, pis dis-y de faire un film de 10 minutes avec ça, pis tu vas voir, ça va être bon», résume Serge pour expliquer la confiance aveugle avec laquelle il a plongé dans l’aventure. Dans le fond, son assertion éclaire parfaitement d’où Pôle Sud tire une part de sa magie: de la qualité même de son écoute porteuse de poésie.