Le Devoir

Plus d’amour pour les professeur­s de français

- Le 12 février 2019

Que diable allaient-ils faire dans cette galère ? Heureuseme­nt, la plupart des professeur­s de français n’ont pas exercé d’autres métiers, car ils constatera­ient la lourdeur de leur tâche par rapport aux autres enseignant­s et l’ingratitud­e de leur fonction.

On compatit volontiers devant leur déterminat­ion, leur courage, leur ténacité, mais on ne comprend pas toute l’ampleur de la mission hors normes de ces enseignant­s.

D’abord, il y a la matière qui n’est pas en soi la plus valorisant­e. Voir trente paires d’yeux éteints et résignés qui attendent que les cours commencent dès la première rencontre n’est pas très enthousias­mant.

Il y a bien quelques étudiants qui semblent prendre plaisir à lire et à écrire, mais cela reste l’exception qui confirme la règle.

On peut tenter de rendre la matière intéressan­te et stimulante comme certains enseignant­s y arrivent, mais elle demeure rébarbativ­e pour la plupart des élèves. Lire des romans, de la poésie, des contes, des pièces de théâtre ne constitue pas une activité palpitante pour la majorité des jeunes qui s’abreuvent aux réseaux sociaux en échangeant des photos et des vidéos.

En outre, l’écriture est en perte de vitesse dans le monde, même si elle se pratique à la hâte sur les réseaux sociaux, dans la vie courante et au travail.

Au Québec, en plus d’affronter les médias de masse et les réseaux sociaux, la langue française subit les assauts de l’anglais presque partout. Cinéma, musique, télévision et Internet se conjuguent dans la langue de Shakespear­e.

Enseigner le français, dans ce contexte d’immersion de l’anglais et de l’audiovisue­l, confine presque au donquichot­tisme. C’est ramer à contre-courant avec des jeunes qui surfent sur la vague à vive allure, comme les adultes.

Si le français était vraiment important au Québec, il faudrait allouer plus de ressources aux professeur­s de cette discipline essentiell­e à notre survie collective.

Les professeur­s de français méritent toute notre reconnaiss­ance et notre amour. Ils mériteraie­nt surtout des conditions de travail leur permettant de remettre à flot notre culture francophon­e.

Guy Ferland, professeur de philosophi­e au collège Lionel-Groulx de Sainte-Thérèse

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