Plus d’amour pour les professeurs de français
Que diable allaient-ils faire dans cette galère ? Heureusement, la plupart des professeurs de français n’ont pas exercé d’autres métiers, car ils constateraient la lourdeur de leur tâche par rapport aux autres enseignants et l’ingratitude de leur fonction.
On compatit volontiers devant leur détermination, leur courage, leur ténacité, mais on ne comprend pas toute l’ampleur de la mission hors normes de ces enseignants.
D’abord, il y a la matière qui n’est pas en soi la plus valorisante. Voir trente paires d’yeux éteints et résignés qui attendent que les cours commencent dès la première rencontre n’est pas très enthousiasmant.
Il y a bien quelques étudiants qui semblent prendre plaisir à lire et à écrire, mais cela reste l’exception qui confirme la règle.
On peut tenter de rendre la matière intéressante et stimulante comme certains enseignants y arrivent, mais elle demeure rébarbative pour la plupart des élèves. Lire des romans, de la poésie, des contes, des pièces de théâtre ne constitue pas une activité palpitante pour la majorité des jeunes qui s’abreuvent aux réseaux sociaux en échangeant des photos et des vidéos.
En outre, l’écriture est en perte de vitesse dans le monde, même si elle se pratique à la hâte sur les réseaux sociaux, dans la vie courante et au travail.
Au Québec, en plus d’affronter les médias de masse et les réseaux sociaux, la langue française subit les assauts de l’anglais presque partout. Cinéma, musique, télévision et Internet se conjuguent dans la langue de Shakespeare.
Enseigner le français, dans ce contexte d’immersion de l’anglais et de l’audiovisuel, confine presque au donquichottisme. C’est ramer à contre-courant avec des jeunes qui surfent sur la vague à vive allure, comme les adultes.
Si le français était vraiment important au Québec, il faudrait allouer plus de ressources aux professeurs de cette discipline essentielle à notre survie collective.
Les professeurs de français méritent toute notre reconnaissance et notre amour. Ils mériteraient surtout des conditions de travail leur permettant de remettre à flot notre culture francophone.
Guy Ferland, professeur de philosophie au collège Lionel-Groulx de Sainte-Thérèse