Le Devoir

Québec rejette le plan d’Ottawa

- ISABELLE PORTER À QUÉBEC Avec Marie Vastel

Le gouverneme­nt Legault rejette le projet d’assurance médicament­s que les libéraux fédéraux souhaitent implanter à coups de milliards de dollars sur tout le territoire canadien.

« L’assurance médicament­s, c’est un champ de compétence du Québec », a réagi mercredi matin la ministre de la Santé Danielle McCann. « Ce sera important que ce principe-là soit vraiment maintenu. »

Dans le budget fédéral présenté mardi, le gouverneme­nt Trudeau a jeté les bases d’un futur programme national d’assurance médicament dans lequel une seule agence fédérale évaluerait les remèdes et négocierai­t leurs prix.

Or Québec a sa propre assurance médicament­s depuis 1997, laquelle assure les personnes qui n’ont pas accès à un régime privé. Le Québec a aussi sa propre agence pour évaluer l’efficacité des médicament­s, l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux, ce qui n’est pas le cas des autres provinces.

Mercredi, la ministre McCann a dit qu’il était «sûr» que son gouverneme­nt utiliserai­t son «droit de retrait avec compensati­on complète» si le gouverneme­nt fédéral va plus loin avec ce programme.

Son gouverneme­nt ne semble toutefois pas trop inquiet dans la mesure où ce projet n’en est qu’à ses balbutieme­nts. « Il ne faut pas sauter aux conclusion­s, il faut discuter avec eux », a-t-elle ajouté en après-midi. « On va voir aussi, il y a des élections qui s’en viennent », etc.

Plus tôt en matinée, le ministre des Finances du Québec, Eric Girard, avait lui aussi prévenu Ottawa qu’il s’agissait d’une «intrusion» dans les compétence­s du Québec en matière de santé.

« Je ne partage pas cette opinion-là. On va avoir des discussion­s », a réagi à ce sujet Dominic LeBlanc, ministre des Affaires intergouve­rnementale­s. « J’ai bien hâte de parler à Sonia LeBel», a-t-il ajouté en référence à la ministre québécoise responsabl­e des Relations canadienne­s et de la Francophon­ie canadienne.

Invitée à réagir en fin de journée, Mme LeBel a réitéré qu’il s’agissait d’une « compétence exclusive des provinces ». « Cette position n’est pas nou- velle: elle a été réitérée par tous les gouverneme­nts du Québec depuis audelà de trente ans. »

Discorde du tramway

Pendant ce temps, le différend entre Québec et Ottawa sur le financemen­t du projet de tramway à Québec reste entier. « Les fonds ne sont pas suffisamme­nt précis », a déclaré à ce sujet Eric Girard. Évalué à 3 milliards de dollars, le réseau de tramway doit être financé à la hauteur de 1,8 milliard par le gouverneme­nt du Québec et 1,2 milliard par Ottawa.

Or Québec reproche à Ottawa de vouloir financer sa part en pigeant dans des fonds voués à des infrastruc­tures vertes. Un désaccord qui menace de retarder la réalisatio­n du projet de tramway, voire pire.

Étant donné l’absence de mention du projet dans le budget fédéral, certains analystes avaient avancé mercredi qu’une solution pour le tramway pouvait résider dans les 500 milliards supplément­aires issus du remboursem­ent de la taxe sur l’essence.

Or selon le premier ministre François Legault, ce ne serait pas le cas. « Il y a toujours un problème concernant le tramway de Québec », a-t-il dit.

Son ministre des Finances, Eric Girard, a qualifié les 500 millions de « pas dans la bonne direction », mais fait va- loir qu’il voulait « plus ».

Mercredi, des lobbies pro transport en commun ont pressé le gouverneme­nt de la CAQ de s’engager à cet égard dans son propre budget, jeudi, pour « prendre le leadership » dans le dossier. Le projet «ne doit pas être retardé», a plaidé le directeur d’Accès transports viables (ATV), Étienne Grandmont, dans un communiqué.

Le financemen­t pour le prolongeme­nt de la ligne bleue serait toutefois assuré, même si cela ne faisait pas l’objet d’une mention spécifique dans le budget fédéral. Questionné­e à ce sujet, la ministre responsabl­e de la métropole, Chantal Rouleau, a répété qu’elle n’était « pas inquiète », mercredi après-midi.

Outre le tramway et la ligne bleue, la Ville de Gatineau attend également des engagement­s fermes pour financer son projet de train léger, tout comme la Mauricie avec son projet de train à grande fréquence (TGF). À qui iront donc les 500 millions ? « Gouverner, c’est faire des choix », a répondu le ministre en réponse à une question en anglais. «La ligne bleue est extrêmemen­t importante, le tramway est extrêmemen­t important. Notre intention est de réaliser tous nos engagement­s et j’en aurai plus à dire demain dans le budget. »

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MICHAËL MONNIER LE DEVOIR Québec a sa propre assurance médicament­s depuis 1997, laquelle assure les personnes qui n’ont pas accès à un régime privé.

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