L’épine dans le pied
Il y a certaines choses qu’il est facile de réclamer quand on est dans l’opposition, mais qu’il est difficile d’appliquer une fois au pouvoir. C’est le cas du remboursement des trop-perçus de 1,5 milliard encaissés depuis 2008 tant par Hydro-Québec que par le gouvernement, grâce aux dividendes que lui a versés la société d’État. Sur les banquettes de l’opposition, la Coalition avenir Québec avait réclamé à cor et à cri que le gouvernement libéral rembourse ces trop-perçus accumulés, les qualifiant de « taxe déguisée et sournoise ». Le parti avait lancé une pétition qui avait recueilli plus de 50 000 signatures.
Aujourd’hui, c’est une pétition de la Fédération canadienne des contribuables qui circule et qui compte plus de 70 000 signatures. Et c’est au tour de l’opposition d’exiger du gouvernement qu’il rembourse cette somme.
Tel est pris qui croyait prendre, peut-on dire alors que le premier ministre, tentant de repousser le calice, évoque une formule alambiquée pour que les contribuables puissent toucher une partie des trop-perçus par le truchement de tarifs d’électricité réduits grâce aux futurs trop-perçus.
Sur le plan politique, c’est particulièrement embarrassant pour la Coalition avenir Québec, qui a promis de « remettre de l’argent dans la poche des Québécois ». François Legault a beau dire que le remboursement de 1,5 milliard ne figure pas dans le programme électoral et le cadre financier de son parti, bien des électeurs caquistes se sentent trahis.
Il faut comprendre que les tarifs d’Hydro-Québec Distribution sont fixés par la Régie de l’énergie, qui tient compte du revenu requis par le monopole d’État et du rendement autorisé. Il est parfaitement normal pour Hydro-Québec d’afficher des trop-perçus, ou écarts de rendement, de 100 ou 200 millions sur des revenus annuels de 12 milliards. La Régie tient compte d’ailleurs de ces écarts, qui peuvent venir réduire les tarifs de l’année suivante.
Dans cette affaire, rappelons que le gouvernement Couillard a fait main basse en catimini sur les trop-perçus en suspendant la décision de la Régie visant leur partage. L’organisme indépendant avait édicté qu’Hydro-Québec pouvait conserver 50 % du premier point de pourcentage des écarts de rendement et 25 % de l’excédent ; le reste servant à réduire les tarifs.
Le gouvernement caquiste devrait laisser la Régie de l’énergie tranquille, elle qui est chargée d’établir objectivement les tarifs du monopole, et trouver un autre moyen que le recours à l’arbitraire pour mettre fin à son embarras politique.