Le Devoir

Le Canada doit garder son leadership dans la lutte contre le sida

- Dr Réjean Thomas Président-directeur général de la clinique l’Actuel

Pendant le festival de Fierté Montréal, la Direction de la santé publique a signalé que le nombre de nouveaux cas de VIH parmi les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HARSAH) avait diminué de 35 % en un an dans la région de Montréal. Nous n’avons jamais été si proches de mettre un terme à l’épidémie du VIH. En une trentaine d’années, le traitement de ce virus a connu des avancées thérapeuti­ques exceptionn­elles, sans égal dans l’histoire médicale. Avec le temps, on associe de plus en plus le VIH à une maladie chronique. Au Canada, l’espérance de vie des personnes vivant avec le VIH est proche de celle des personnes séronégati­ves. La charge virale indétectab­le grâce à un traitement antirétrov­iral adéquat empêche la transmissi­on du virus et la prophylaxi­e pré-exposition (PrEP) permet de réduire considérab­lement les risques de transmissi­on (95 %). Autant de facteurs qui contribuen­t à la diminution des nouveaux cas.

Ni ici ni ailleurs la bataille n’est gagnée pour autant, si on veut éradiquer le VIH d’ici 2030, tel que le préconise l’ONUSIDA qui, par ailleurs et de façon inquiétant­e, a prédit des rebonds potentiels de l’épidémie si les pays donateurs ne renforcent pas leur soutien. Les progrès sont fragiles et se mesurent sur le long terme. Il serait pour la première fois question que le Canada n’augmente pas son financemen­t au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculos­e et le paludisme. Cet organisme est pourtant fondamenta­l pour lutter contre ces trois maladies, que l’on peut prévenir.

Au début des années 2000, plus de 4700 personnes mouraient chaque jour de causes liées au sida sur la planète. Aujourd’hui, c’est moins de la moitié, soit 2100 personnes.

Même si elle ne fait plus la une des journaux, l’épidémie du sida demeure un des défis les plus considérab­les auxquels le monde a dû faire face en peu de temps. Au début des années 2000, plus de 4700 personnes mouraient chaque jour de causes liées au sida sur la planète. Aujourd’hui, c’est moins de la moitié, soit 2100 personnes. Même si ce nombre montre les progrès accomplis, il demeure le signe flagrant du chemin qu’il reste à parcourir.

En 2018, 38 millions de personnes (plus que la population canadienne) vivaient avec le VIH, dont 40 % (15 millions) n’avaient pas accès aux antirétrov­iraux. Les défis ne s’arrêtent pas là. Il faut rappeler les risques élevés parmi des groupes vulnérable­s, notamment les HARSAH et les utilisateu­rs de drogue par injection. Près de 1000 femmes âgées de 15 à 24 ans contracten­t encore le VIH chaque jour. En Afrique subsaharie­nne, elles sont deux fois plus à risque que les hommes. Le Fonds mondial investit dans plus de 100 pays dans des programmes menés par des experts locaux. Il s’agit d’une organisati­on de santé globale qui se distingue par son efficacité. On estime que 27 millions de vies ont été sauvées depuis sa création en 2002.

En établissan­t des partenaria­ts avec les gouverneme­nts, la société civile, les institutio­ns techniques, le secteur privé et les personnes touchées par les maladies, le Fonds mondial favorise l’innovation, mais aussi les économies d’échelle. L’organisme estime qu’il doit recueillir 15 % de plus que lors du dernier cycle de financemen­t pour éviter que ces maladies ne connaissen­t une nouvelle recrudesce­nce.

Cette année, les pays qui s’étaient engagés à contribuer au Fonds ont tous promis d’augmenter leur soutien. Depuis toujours, le Canada a augmenté sa participat­ion d’au moins 20% à chaque cycle de financemen­t, y compris à Montréal en 2016 sous le leadership du premier ministre Trudeau. Au minimum, cette augmentati­on doit demeurer identique pour ne pas risquer de mettre en péril les progrès réalisés à ce jour, car tout permet de croire à l’éradicatio­n du sida, au Canada et partout dans le monde.

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