Arts visuels
À Paris, au Palais de Tokyo, une exposition tente de recentrer le monde sur une autre réalité
Notre époque parle beaucoup rede mettre en question les canons ques dominants afin de consacrer plus de place aux femmes artistes, aux minorités culturelles, aux artistes hors du marché — clinquant — de l’art actuel. Il y aurait des leçons à retenir entre autres des postétudes coloniales. Que de belles intentions ! Mais il faut bien se rendre à ce. Rares sont les musées importants en Occident à donner une visibilité à la création réalisée en dehors de l’Occident, sinon par le prisme de la culture européocentriste, culture que l’on pourrait qualifier de « blanche ». Il y a près de 90 ans, en 1920, dans
Le bulletin de la vie artistique, dans une série d’entrevues, le critique d’art Félix Fénéon interpellait vingt sonnalités pour discuter de l’absence des arts dits « primitifs » ou « gres » dans les musées d’art. Ces arts, que Fénéon qualifiait ment de « lointains », avaient-ils leur place au Louvre ? Depuis, en 2006, le Musée du Quai Branly, à Paris, a vert ses portes pour accueillir, hors du Louvre, les collections des tions non européennes. Les choses ont-elles vraiment changé ? Fénéon fait d’ailleurs l’objet d’une exposition au Quai Branly, expo qui viendra au MoMA, à New York, l’an prochain, ce qui permettra certainement de chir encore à ces questions.
Des villes effervescentes
Ces jours-ci, au Palais de Tokyo, le commissaire Hugo Vitrani et son commissaire associé, Fabien Danesi, ont décidé d’explorer l’art de cinq les n’appartenant pas au circuit tuel de l’art contemporain, cinq villes culturellement grouillantes et qui malheureusement passent souvent sous le radar de nos médias. Ne on pas pourtant que nous sommes à l’ère de la circulation de tion ? Que se passe-t-il sur la scène culturelle à Dacca, Lagos, Manille, Mexico et Téhéran, villes compqui tent chacune entre 15 et 25 millions d’habitants ? Avant d’avoir vu cette exposition, on aurait eu bien du mal à répondre à cette question.
Pourtant, on croyait être de ceux qu i sont informés sur l’art contemporain. En fait, des artistes présentés dans te expo, on n’en connaissait… aucun ! Sont-ils tous bons ? Non. ils l’histoire de l’art ? Probablement pas, l’histoire de l’art étant celle des nations dominantes. Mais plusieurs ont déjà leur place dans l’histoire de leur pays et tant pis pour nous si nous ne sommes pas capables d’écrire une histoire de l’art inclusive.
Voilà une expo qui ne souhaite d’ailleurs pas tomber dans les nières des idées habituelles sur l’« ailleurs ». Même si cet art est produit dans des mégalopoles, des « archi-villes rhizomatiques »,
ce.sse.s des villes n’est pas une tion qui prend pour thème ces villes. Cette expo se définit plutôt beaucoup par ce qu’elle remet en question… « Elle n’est pas non plus une tion sur la mondialisation ni sur les modernités artistiques non occidentales », précise-t-on. Elle tente ainsi d’éviter les exotismes et cette idée galvaudée d’une universalité de la
création ou même la notion priation si répandue de nos jours.
Que reste-t-il alors ? Une expo tôt expérimentale dans son choix d’artistes et d’oeuvres, mais aussi dans sa présentation — des espaces ouverts, mise en scène due à tecte Olivier Goethals. Les limites tre oeuvres et artistes y semblent vent poreuses, pour ne pas dire floues. Pour signaler l’effervescence de ces scènes artistiques, les saires ont de plus éparpillé les oeuvres de plusieurs artistes un peu partout dans le parcours. C’est le cas des structures hybrides de l’artiste d’origine mexicaine Fernando Palma Rodriguez (un des plus connus du groupe, ayant déjà exposé au MoMA PS1 à New York), oeuvres faites de métal, mais aussi de circuits niques. Voilà une expo tentaculaire à l’image des villes interpellées, une expo qui n’en finit plus, avec la préartistes. sence de plus de cinquante
On y trouve des oeuvres très ques des gouvernements, comme te vidéo intitulée This Is Nigeria de Falz, artiste qui dénonce la corruption dans son pays. Dans la vidéo lencieuse Listen, l’Iranienne Newsha Tavakolian donne à voir des chanteuses lors de prestations individuelles dans un pays qui leur interdit de le faire publiquement ou d’enregistrer leurs chansons. Des artistes pés sous le nom de Britto Arts Trust y défendent leur culture. Ayant mé le premier espace d’artistes autogéré à Dacca, cette association tente de préserver les motifs décoratifs artisanaux et traditionnels qui raient encore récemment tous les lèbres rickshaws, « cyclopousses » qui peuplent la ville. Et la liste des tes pertinents ne s’arrête pas là. Nous pourrions parler des sculptures en bois d’Amir Kamand ou de l’intense peinture de Farrokh Mahdavi…
Quelles leçons alors retenir de te expo présentée par commisdeux saires blancs et européens ? Que nous ne sommes plus à l’époque où nous pouvions espérer trouver « l’autre », un autre qui nous aurait permis de croire que nous pouvons fuir ou tout au moins renouveler notre culture cidentale. Les illusions de l’époque de Gauguin ou de Picasso sont bel et bien révolues. Cette expo ne nous montre pas souvent des oeuvres différentes de l’art occidental. Nous avons plutôt eu le sentiment de retrouver des façons de faire et des approches que les artistes vivants en Occident auraient très bien pu soutenir.
Mais voilà tout de même une expo qui permet de remettre en question des idées sur l’Occident progressiste s’opposant au reste de la planète, un tiers-monde attendant les lumières du progrès… Les commissaires insistent : la scène queer à Mexico où à Dacca se porte assez bien. L’artiste nigérien Kadara Enyeasi, qui s’est fait connaître pour ses nus masculins bous dans un pays très religieux et qui travaille sur les identités sexuelles avec des images défiant mativité, en est un L’Occiexemple. dent n’est pas seul à vouloir penser autrement. Et nous ne sommes pas nécessairement les leaders de ces changements. Prince·sse·s des villes Au Palais de Tokyo, à Paris, jusqu’au 8 septembre