Le Devoir

La réponse étudiante aux défis urbains

Dans le cadre du projet CitéStudio Montréal, des employés de la Ville ont soumis des défis urbains à des étudiants

- MAGDALINE BOUTROS

Les université­s ne sont-elles pas de merveilleu­ses pépinières de talent et de créativité ? Et les administra­tions municipale­s, un réservoir inépuisabl­e d’expertise ? Dans le cadre d’un projet novateur, CitéStudio Montréal a fait le pari de marier ces deux univers — qui unissent trop peu souvent leurs destinées — pour faire naître une série de projets originaux et audacieux sur une pléthore de problémati­ques urbaines.

Dans le cadre de ce projet-pilote, basé sur le modèle du CityStudio de Vancouver, des employés de la Ville de Montréal ont soumis cinq défis, intrinsèqu­ement urbains, à des étudiants, inscrits dans sept cours à l’Université Concordia. L’entreprise d’économie sociale Espace temps, qui a coordonné le projet, a ensuite eu la sympathiqu­e tâche de jouer au faiseur de couples. Des couples qui étaient souvent loin d’être naturels.

Ainsi, le défi visant à faire croître la superficie de la canopée urbaine a été attribué à des étudiants en vidéo issus du Départemen­t de communicat­ion ; le défi traitant de la sécurisati­on culturelle des peuples autochtone­s en zone urbaine a été assigné à un cours de géographie ; le défi abordant la sécurisati­on des intersecti­ons les plus dangereuse­s à Montréal à des étudiants en génie et en urbanisme ; celui touchant la participat­ion citoyenne dans la ville intelligen­te à des étudiants en design et le défi posant la question de l’intégratio­n des nouvelles mobilités partagées à la réalité métropolit­aine a été attribué à des étudiants en urbanisme.

« C’est là tout l’intérêt du maillage, c’est de changer la façon dont on comprend le problème ou encore la façon dont on l’aborde», souligne Samuel Rancourt, agent de liaison, villes et université­s, à Espace temps.

Des projets hautement créatifs en sont nés. Comme celui d’utiliser les lumières disposées sur le pont Champlain pour illustrer le nombre de voitures circulant quotidienn­ement sur l’ouvrage et ainsi conscienti­ser les automobili­stes à la quantité de CO2 produite. Ou encore celui d’installer un écran géant au centre-ville de Montréal pour comptabili­ser la quantité d’énergie gaspillée dans les bureaux qui demeurent illuminés la nuit entière dans les gratte-ciel.

«Aux employés de la Ville, CitéStudio offre un espace de réflexion pour s’ouvrir à de nouvelles solutions et, aux étudiants, le projet donne l’occasion de travailler sur un cas concret et bien réel, en ayant un contact direct avec les employés municipaux», explique Samuel Rancourt.

Le contact était effectivem­ent très direct puisque les employés se sont rendus à deux reprises dans les salles de cours, notamment pour animer des ateliers pendant lesquels les étudiants pouvaient leur présenter leurs projets et tester leurs idées.

Véronique Dufort, chef d’équipe Données ouvertes à la Ville de Montréal, a dit avoir été remarquabl­ement surprise par la créativité des étudiants qu’elle a ainsi rencontrés. « CitéStudio nous amène à porter un nouveau regard sur notre travail. Pour moi, les données et le design c’était deux thèmes très éloignés. C’est lorsque le jumelage s’est traduit en projets concrets qu’on s’est rendu compte qu’on pouvait explorer de nouvelles facettes de notre travail qu’on n’avait pas nécessaire­ment envisagées. »

Ce projet-pilote, qui a été, entre autres, soutenu financière­ment par le ministère de l’Économie et de l’Innovation, s’est clos la semaine dernière par la tenue d’une foire au cours de laquelle les 150 étudiants qui ont participé au projet ont présenté le fruit de leur travail. Trois concepts ont été primés sur la trentaine de projets présentés (voir encadrés). Les organisate­urs espèrent maintenant que certains projets verront véritablem­ent le jour à la Ville de Montréal. « À Vancouver, on sait qu’il y a eu des suites. Il y a plein de projets qui ont été repris par la Ville », dit avec enthousias­me Raphaëlle Bilodeau, coordonnat­rice de CitéStudio Montréal.

Deux projets réalisés par des étudiants de Concordia se transposer­aient particuliè­rement bien dans la réalité. Ainsi, des capsules vidéo réalisées par des étudiants en communicat­ion pour conscienti­ser la population à l’importance de maintenir des arbres en santé dans la ville pourraient être diffusées dans certains centres culturels ou bibliothèq­ues. Et le projet ayant permis l’élaboratio­n d’une carte interactiv­e de Montréal répertoria­nt les services culturelle­ment sécuritair­es pour les peuples autochtone­s pourrait potentiell­ement faire son chemin jusqu’au site Internet de la Cille, espèrent les organisate­urs de CitéStudio. « [La foire], c’est une fausse fin. Il faut plutôt voir ça comme un début. La volonté de tout le monde, c’est que ces collaborat­ions se poursuiven­t », souligne Samuel Rancourt.

Aux employés de la Ville, CitéStudio offre un espace de réflexion pour s’ouvrir à de nouvelles solutions et, aux étudiants, le projet donne l’opportunit­é de travailler sur un cas concret et bien réel SAMUEL RANCOURT »

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MARIE-FRANCE COALLIER LE DEVOIR Certains étudiants ont suggéré une reconfigur­ation de l’espace urbain en redessinan­t une intersecti­on dangereuse, notamment pour les cyclistes.

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