Le Devoir

Ouverture à géométrie variable

Les consommate­urs étaient au rendez-vous dans les commerces, mais tous les marchands n’étaient pas prêts

- ISABELLE PORTER À QUÉBEC

La réouvertur­e des commerces a beau avoir été attendue avec impatience, les magasins n’étaient pas tous prêts à rouvrir leurs portes lundi à Québec. Tandis que certains renouaient avec leurs habitués, d’autres se démenaient toujours avec le casse-tête de leur nouvelle réalité.

Chez Exo, une boutique de la basse-ville pour amateurs de planche à roulettes, l’équipe était loin d’être prête à une réouvertur­e complète, lundi. « On ne sait même pas quand [on pourra rouvrir]. On s’est même donné deux ou trois semaines pour voir comment les autres fonctionne­nt », explique au bout du fil l’un des employés, Mathieu Dhani. « Ce n’est pas simple. On ne peut quand même pas désinfecte­r les vêtements chaque fois que les clients les touchent. »

Dans le secteur Vanier, de nombreux commerces n’en avaient pas fini non plus avec les préparatif­s. Nicole Cyr avait traversé la ville pour se rendre chez le détaillant de textiles Fabricvill­e. « Je voulais avoir du fil de la bonne couleur. Je me fais des vêtements. Je manque de fil, d’élastiques aussi. » À l’intérieur, on pouvait voir les employés s’activer à réaménager le magasin pour l’ouverture prévue mardi.

Non loin de là, Alain et Serge revenaient bredouille­s d’une visite chez DeSerres. « C’est fermé jusqu’à mercredi. » Malgré ce petit revers, ils semblaient contents d’avoir trouvé là un prétexte pour sortir de leurs maisons respective­s. « Ça commence à être long », de dire l’un d’eux. « On est allés chez Dollarama. J’en ai profité pour acheter des accessoire­s de cuisine qui me manquaient. »

À quelques mètres derrière eux, une moyenne de 20 personnes faisaient la queue en permanence devant les portes du détaillant américain. Mais l’attrait pour le magasin n’avait rien à voir avec la réouvertur­e, puisque, contrairem­ent aux autres, il avait pu rester ouvert parce que considéré comme service essentiel.

Lise Lortie faisait la file patiemment. « Je vais acheter des élastiques pour faire des masques », a dit la dame de 74 ans. À la question de savoir si le virus lui faisait peur en raison de son âge, elle a répondu du tac au tac : « J’aime pas ça. C’est pour ça que je veux me faire des masques. » Pour elle et son mari.

Par ailleurs, les multinatio­nales comme Dollarama n’ont pas été les seules à faire de bonnes affaires lundi. Rue Saint-Vallier, des gens faisaient la queue patiemment pour entrer dans la boutique de plein air Latulippe.

« J’ai pas le temps de vous parler, demandez à quelqu’un d’autre », a dit derrière son masque transparen­t l’homme chargé de gérer les entrées et sorties à la porte.

Au bout de la queue, Guy Bilodeau attendait son tour avec sa conjointe. « C’est la fête de mon gendre aujourd’hui et il avait demandé quelque chose de spécial qu’ils ont ici », a-t-il dit.

À la Bouquineri­e Cartier aussi, la journée a été particuliè­rement bonne, a expliqué en fin d’après-midi la vendeuse Gabrielle Barbeau-Bergeron. « Visiblemen­t, les gens avaient hâte. »

Sur place, on se serait presque crus en temps normal, les uns et les autres bouquinant chacun dans leur coin. À l’entrée, une affiche rappelait les consignes à respecter, dont la présence maximale de six clients à la fois, mais il n’y avait pas de marques au sol ou de panneau de protection transparen­t devant la caisse. Dans l’ensemble, la vendeuse estimait que la distance de deux mètres avait été « relativeme­nt » bien respectée.

« Les gens se sont habitués. C’est comme ça à l’épicerie et à la SAQ. »

D’un commerce à l’autre, les précaution­s varient beaucoup sur le plan sanitaire. Ainsi, la boutique de vêtements le Jupon pressé avait installé un panneau de protection transparen­t à la caisse. La boutique étant très petite, le nombre de clientes était limité à deux à la fois. « Si les gens ont déjà fait leur présélecti­on sur le Web, on leur met à l’avance leur sélection en cabine. Ça évite les manipulati­ons. »

À deux pas de là, à la boutique de souliers Schü’z, de gros X rouges au sol rappelaien­t aux clients la distance à maintenir entre eux. « Quand des clients veulent essayer de mettre une paire de chaussures, je leur fais mettre des gants », a expliqué la vendeuse Kayla Thibeault.

La jeune femme avait un masque de couleur pendu au cou. « [Je le mets] quand je dois m’approcher des clients pour voir si les chaussures font », a-telle dit. « Et je mets des gants moi aussi lorsque je leur fais essayer des chaussures. »

Malgré ces nouvelles contrainte­s, la jeune femme semblait ravie de revenir en boutique. « On est comme une famille ici. C’est sûr qu’on s’ennuyait. Ça fait du bien pour le moral. »

C’est la fête de mon gendre aujourd’hui et il avait demandé quelque chose de spécial » qu’ils ont ici GUY BILODEAU

 ?? RENAUD PHILIPPE LE DEVOIR ?? À la librairie Pantoute, à Québec, la reprise des activités se fait de manière progressiv­e. Hier, les employés ont préparé le commerce pour la réouvertur­e, mais seuls les clients ayant fait un achat en ligne seront admis mardi.
RENAUD PHILIPPE LE DEVOIR À la librairie Pantoute, à Québec, la reprise des activités se fait de manière progressiv­e. Hier, les employés ont préparé le commerce pour la réouvertur­e, mais seuls les clients ayant fait un achat en ligne seront admis mardi.

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