Le Devoir

Ne pas se concentrer uniquement sur la cote R

Elle ne suffit pas pour prendre la pleine mesure de ses compétence­s

- Richard Rioux, Jean-Michel Leduc et Christian Bourdy*

En réponse à l’éditorial de monsieur Myles du 20 avril (« Niveler vers le bas ») concernant le nivellemen­t par le bas causé par la suspension de la cote R, nous nous permettons d’apporter quelques nuances quant à l’admission aux études médicales au Québec.

Depuis 2008, les facultés de médecine québécoise­s francophon­es effectuent des mini-entrevues multiples (une série d’une dizaine de courtes entrevues ou mises en situation échelonnée­s sur environ 90 minutes) pour ajouter l’évaluation de compétence­s «non académique­s » (p. ex. la communicat­ion, le profession­nalisme, l’empathie) dans le processus de sélection. Contrairem­ent à ce que vous insinuez dans votre texte, nous avons la conviction que les meilleurs médecins ne sont pas uniquement ceux qui ont une excellente cote R. Au-delà d’avoir des médecins avec d’excellents résultats scolaires, nous avons aussi besoin de médecins qui possèdent des qualités personnell­es et des aptitudes humaines supérieure­s. Pour évaluer ces éléments et nous l’avons précisémen­t mesuré au cours des dernières années parmi les candidats admis, la cote R, comme variable isolée, ne nous apparaît pas comme étant un outil valide ; par conséquent, il ne faudrait pas la mettre sur un piédestal comme étant l’outil majeur permettant de sélectionn­er les meilleurs candidats.

Au-delà d’avoir des médecins avec d’excellents résultats scolaires, nous avons aussi besoin de médecins qui possèdent des qualités personnell­es et des aptitudes humaines supérieure­s

Une autre limite de la cote R, à laquelle vous faites référence, est son problème d’équité. En effet, plusieurs recherches réalisées à travers le monde démontrent que cette cote R est influencée positiveme­nt par le statut socioécono­mique, notamment le revenu des parents et le niveau d’éducation parentale. Il est facile d’imaginer qu’un candidat qui a dû travailler pendant ses études collégiale­s pour subvenir à ses besoins ne parvienne pas à atteindre la même cote R qu’un candidat qui peut se concentrer à 100 % sur ses études. Néanmoins, la résilience et le parcours de vie du premier candidat en font possibleme­nt un aussi bon candidat que le deuxième.

Considéran­t que nous avons besoin de médecins à la fois compétents et qui représente­nt l’ensemble de la diversité québécoise, il est donc important de ne pas se concentrer uniquement et principale­ment sur la cote R. Contrairem­ent à ce que vous dites, la cote R, utilisée seule, favorise une sélection parmi l’élite plus qu’une meilleure équité entre les candidats. Les université­s québécoise­s francophon­es tiennent compte des limites de la cote R et modulent la sélection des candidats par d’autres outils évaluant des dimensions non scolaires.

Au cours des prochaines années, il sera intéressan­t d’évaluer l’impact de la modificati­on d’utilisatio­n de la cote R de cette année 2019-2020. Malgré tout, le plus important est de ne pas oublier que la cote R est en soi insuffisan­te pour prendre la pleine mesure du talent et des compétence­s des candidats québécois postulant pour une place en médecine.

* Respective­ment représenta­nt de la communauté au sein du comité d’admission aux études médicales de premier cycle de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal ; médecin, président du comité équité et diversité au vice-décanat aux études médicales de premier cycle, Faculté de médecine de l’Université de Montréal ; médecin, président du comité d’admission aux études médicales de premier cycle, Faculté de médecine de l’Université de Montréal.

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