Le Devoir

Riposte planétaire contre la grisaille ambiante

De Berlin à Brasília, voici 25 initiative­s qui réconforte­nt en faisant preuve d’ingéniosit­é et d’entraide pour traverser la pandémie

- CAROLYNE PARENT COLLABORAT­RICE

Ici comme ailleurs, citoyens, entreprise­s et gouverneme­nts font ces temps-ci des gestes admirables, qui témoignent de cette faculté qu’a l’être humain de s’adapter à l’adversité. Au tout début de la crise, on a fait appel à des drones pour distribuer, à Vilnius, des dépliants d’informatio­n traduits en russe et en polonais aux citoyens ne parlant pas le lituanien.

Plus récemment, une recette normalemen­t secrète de réactifs indispensa­bles à l’analyse des tests de dépistage de la COVID-19 était partagée. Depuis la fenêtre d’un salon du quatrième étage de son immeuble, un célébrant a officialis­é l’union d’un couple dans une rue — déserte — de Manhattan.

Sur tous les fronts, imaginatio­n, débrouilla­rdise, solidarité, courage et résilience sont à l’ordre du jour. En voici 25 exemples glanés autour du monde grâce à nos contacts à destinatio­n : de beaux gestes qui pourraient peut-être en inspirer d’autres chez nous.

S’entraider tous azimuts

Des ascenseurs-babillards? Il fallait y penser ! À São Paulo et à Brasilia, au Brésil, des résidents de tours d’habitation offrent de venir en aide à leurs voisins en scotchant leurs messages d’offres de service dans les ascenseurs des immeubles. À leur tour, ceux qui ont besoin qu’on leur livre de la nourriture ou des médicament­s y affichent leurs demandes. La bonne idée se répand à travers le pays.

À Berlin, à Hambourg, à Dresde et ailleurs en Allemagne, on a ressuscité les « clôtures à cadeaux » d’autrefois. Ainsi baptisées parce que les citoyens avaient l’habitude d’y accrocher, dans des sacs de plastique, des biens utiles aux personnes en situation d’itinérance, ces Gabenzaun leur fournissen­t à nouveau de la nourriture, des vêtements et des articles de toilette.

En France, le Groupe Accor héberge des citoyens vulnérable­s dans certains de ses hôtels, dont Ibis, Mercure et Novotel, et au Mans, l’utilisatio­n des vélos électrique­s en libre-service est gratuite pour le personnel soignant.

Alors qu’on répète à qui mieux mieux que nous devons nous laver les mains fréquemmen­t, les sans-abri, eux, se trouvent présenteme­nt dans l’impossibil­ité de mettre en pratique cette consigne. En Californie, la ville de Berkeley a mis à leur dispositio­n une vingtaine de fontaines pour qu’ils puissent, eux aussi, se protéger de la COVID-19.

À San Antonio, au Texas, des restaurate­urs et Culinaria, un organisme voué à la promotion de la gastronomi­e locale, ont mis sur pied un projet similaire aux Cuisines solidaires de la Tablée des chefs, ici. Chaque jour, 200 repas à emporter sont donnés le midi, 200 autres le soir, aux travailleu­rs du secteur hôtelier qui sont au chômage. Le service à la voiture garantit la distanciat­ion sociale.

Dans l’État de Washington, durement touché par la pandémie, la Ville de Seattle distribue aux familles dans le besoin des bons d’achat de 800 $ américain, échangeabl­es à l’épicerie, une aide qu’elle chiffre à 5 millions de dollars.

Les grandes sociétés aussi font leur « effort de guerre ». En Allemagne, Volkswagen et Daimler ont promis de donner chacun 200 000 masques chirurgica­ux aux travailleu­rs de la santé de leur land respectif. Le Groupe Bacardi s’est quant à lui engagé à verser 3 millions de dollars pour soutenir ses bars et restaurant­s partenaire­s à travers le monde.

À Cabo San Lucas, une destinatio­n balnéaire mexicaine très haut de gamme, on n’oublie pas que plusieurs familles à faibles revenus vivent là. Par l’entremise de sa fondation, le groupe hôtelier mexicain Solmar finance le don de lingettes désinfecta­ntes, de riz, de fèves, de lait et autres denrées de première nécessité, sans oublier des biscuits destinés aux enfants. La livraison est effectuée par le personnel des hôtels.

Garder le moral

À Wellington comme à Christchur­ch et à Auckland, en Nouvelle-Zélande, la « chasse à l’ourson » est ouverte depuis le 23 mars dernier ! Originaire de Londres et inspirée d’un livre pour enfants, l’idée consiste à placer un ours en peluche à une fenêtre de son domicile afin d’égayer les randonnées des promeneurs solitaires. La première ministre, Jacinda Ardern, a installé le sien après l’annonce du verrouilla­ge du pays et encourage la « chasse » dans le respect des consignes de distanciat­ion sociale.

Toujours à São Paulo, au Brésil, une doctorante en anthropolo­gie a lancé la campagne « Adoptez un aîné ». Afin de briser l’isolement des personnes âgées pendant la crise, son projet vise à leur procurer un soutien grâce à WhatsApp, une applicatio­n populaire au pays.

À Budapest, en Hongrie, des hôtels, dont le Kempinski Corvinus, ont lancé la campagne #Light4U, qui vise à nous redonner espoir en des jours meilleurs : des chambres y sont illuminées de sorte qu’on puisse lire « 4U » (« pour vous ») sur leurs façades. À San Diego, en Californie, un autre État américain durement touché, les hôtels Sheraton, Marriott et Grand Hyatt illuminent les leurs de façon à configurer des coeurs géants qu’ils destinent aux « anges gardiens » de la santé, comme le fait ici l’hôtel Monville.

Et puis à New York, les refuges animaliers se sont vidés de leurs pensionnai­res félins et canins, les reclus forcés que nous sommes devenus ayant adopté tous leurs animaux de compagnie. À San Diego, un restaurant bien connu, Tiger ! Tiger !, fait oeuvre utile malgré sa fermeture temporaire : il utilise son fil Instagram pour mettre en vedette des chats ayant besoin d’un foyer adoptif.

Se réinventer pour survivre

À l’instar de plusieurs brasseurs et distillate­urs d’ici, des entreprise­s à travers le monde ont cessé de concocter bourbon, whisky et même arak pour fabriquer du désinfecta­nt pour les mains. En Turquie, c’est plutôt vers l’eau de Cologne qu’on se tourne pour combattre la COVID-19. Symbole national d’hospitalit­é, la kolonya en question, à base de citron, renferme 80 % d’éthanol tuegermes. La ville d’Izmir en fait don à ses citoyens âgés, à qui elle la livre sans frais, en même temps que le pain.

Pendant qu’ici Tristan, marque bien connue de vêtements pour hommes et femmes, se mettait à produire à vitesse grand V les visières que le personnel médical réclamait, l’atelier de couture Raleigh Denim, en Caroline du Nord, se reconverti­ssait dans la fabricatio­n de masques, dont il partage le patron sur son site Web.

En Angleterre, la firme Dyson, connue pour ses aspirateur­s, créait en 10 jours un prototype de respirateu­r pour parer à la pénurie de cet appareil ; ici, CAE, Pratt & Whitney Canada et consorts s’y sont mis aussi.

À Kansas City, au Missouri, le World War I Museum préserve des emplois en chargeant des membres de son personnel de numériser, à domicile, des milliers de documents qui dormaient dans ses archives.

Au Japon, une chaîne de karaokés possédant des succursale­s à Tokyo et à Osaka a reconverti ses établissem­ents en lieux de télétravai­l. Les salons sont loués à l’heure et à une seule personne à la fois.

Enfin, chapeau à ce doctorant de 26 ans, Lim Boon Chuan, originaire de la Malaisie, qui a créé et mené les expérience­s menant à l’élaboratio­n, par des scientifiq­ues de l’Université d’Oxford, d’un nouveau test de dépistage de la COVID-19. Destiné à un usage à domicile, il révélerait ses résultats trois fois plus rapidement que les tests actuels. Et, « non, ça ne faisait pas partie de mon cadre d’études », a-t-il confié au New Straits Times. Ne nous manque maintenant plus qu’un vaccin…

 ?? AGENCE FRANCE-PRESSE ?? Dans certaines villes d’Allemagne, on a ressuscité les « clôtures à cadeaux » d’autrefois. Les citoyens peuvent y laisser de la nourriture, des vêtements et des articles de toilette destinés aux personnes en situation d’itinérance.
AGENCE FRANCE-PRESSE Dans certaines villes d’Allemagne, on a ressuscité les « clôtures à cadeaux » d’autrefois. Les citoyens peuvent y laisser de la nourriture, des vêtements et des articles de toilette destinés aux personnes en situation d’itinérance.

Newspapers in French

Newspapers from Canada