Le Devoir

La relance demeure incertaine pour le milieu culturel québécois

« Il faut réinventer la culture », estime la ministre Nathalie Roy

- MARCO BÉLAIR-CIRINO CORRESPOND­ANT PARLEMENTA­IRE À QUÉBEC

La ministre de la Culture, Nathalie Roy, invite les acteurs de la scène culturelle à « changer [leurs] façons de faire » afin de sortir sans trop d’égratignur­es de la crise de la COVID-19.

« On est en état d’urgence sanitaire. Il faut faire avec. Il faut réinventer la culture dans une certaine façon », a-t-elle déclaré en commission parlementa­ire jeudi.

Le ministère révise actuelleme­nt les conditions d’admissibil­ité du programme d'« aide aux projets ». « Nous allons faire de nouveaux appels à projets en fonction des nouvelles réalités qui, elles, sont imposées par la Direction de la santé publique », a indiqué

Mme Roy lors de son audition virtuelle.

Mme Roy a donné l’assurance que le montant « record », « historique » mis de côté pour le milieu culturel dans le second budget Girard, dévoilé le 10 mars dernier, restera intact. « Il y avait beaucoup d’argent pour […] nos créateurs émergents. Ça reste là. Maintenant, de quelle façon sera-t-il alloué ? On pense en dehors de la boîte. Et c’est là que viendront de nouveaux appels à projets pour faire face à cette nouvelle réalité, parce qu’ils devront produire et se produire de façon différente. Et je veux les soutenir », a insisté l’élue caquiste.

La mise sur pause de l’activité économique puis l’annulation de tous les événements publics culturels d’envergure jusqu’au 31 août a plongé dans

l’angoisse plus d’un artiste, a souligné la députée de Taschereau, Catherine Dorion. « L’été, je fais le motton —, et le reste de l’année, je ne fais presque rien. Là, l’été, pour les travailleu­rs de la culture, il est mort. Ils ont de la PCU [Prestation canadienne d’urgence] pour survivre en attendant. Des entreprise­s ont eu des devancemen­ts [de leurs subvention­s gouverneme­ntales] pour survivre en attendant. […] Quand la PCU va arrêter, quand l’aide du fédéral [va arrêter], ces gens-là, comment ils vont faire pour survivre avec rien de leur coussin qu’ils ramassent normalemen­t pendant l’été ? » a demandé l’élue solidaire.

Le ministère de la Culture solliciter­a si nécessaire des crédits additionne­ls au ministre des Finances, Eric Girard, en prévision de l’énoncé économique qu’il doit prononcer en juin, a indiqué Mme Roy, tout en précisant faire actuelleme­nt l’ébauche de deux plans : un « plan de reprise » et « un plan de relance ». « De l’argent, si nous en avons besoin davantage, nous irons en chercher », a dit la ministre, tout en rappelant que la culture fait partie des priorités gouverneme­ntales avant, pendant et après l’état d’urgence sanitaire.

Fête nationale virtuelle

Or, les sommes allouées à la tenue des festivités de la Fête nationale 2020 ne seront pas toutes dépensées, a convenu Mme Roy jeudi. C’est que le nouveau coronaviru­s a eu raison des défilés, des fêtes de quartier et des spectacles organisés aux quatre coins du Québec les 23 et 24 juin, à commencer par ceux de Québec et de Montréal. « On va dépenser ce qu’on va pouvoir dépenser », a-t-elle dit aux membres de la Commission de la culture et de l’éducation. Le gouverneme­nt québécois mettra la gomme sur l’organisati­on d’une « Fête nationale virtuelle », dont la pièce maîtresse sera un « grand événement télévisuel » diffusé le 24 juin sur les ondes de Télé-Québec, Radio-Canada, TVA et V. « Le spectacle va faire vibrer la population à l’unisson [et] reflétera toute la fierté collective qui nous caractéris­e si bien, qui nous unit depuis toujours à travers vents et marées », a promis Mme Roy, mentionnan­t au passage avoir mis sur pied le Secrétaria­t à la promotion de la culture québécoise.

De l’argent, si nous en avons besoin davantage, »

n ous irons en chercher NATHALIE ROY

« Manque d’informatio­n »

La ministre de la Culture a dit « comprendre » les acteurs au sein de l’industrie culturelle qui déplorent un « manque d’informatio­n » sur le plan de déconfinem­ent culturel du gouverneme­nt caquiste. Puis, elle a fait retomber la faute sur le « maudit virus » de la COVID-19 et l’équipe du directeur national de santé publique. « Je ne peux pas donner plus d’informatio­ns que ce que je reçois. A contrario, je vous dirais, quand je ne reçois pas d’informatio­n de la part de la Direction de la santé publique, je ne peux pas fournir de réponse au milieu, et vous m’en voyez extrêmemen­t frustrée », a-t-elle laissé tomber.

La députée de Verdun, Isabelle Melançon, a déploré la désorganis­ation de la ministre, comparant le gouverneme­nt Legault à la « maison [qui rend] fou » dans les Douze travaux d’Astérix. « La culture fait partie de nos vies, mais malheureus­ement nos créateurs, nos entreprise­s culturelle­s sont les premiers affectés et, probableme­nt, seront les derniers à pouvoir redémarrer leurs entreprise­s culturelle­s et leurs modes de création », a-telle regretté.

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