Le Devoir

Ottawa annonce « une première phase » d’aide de 428 millions

Le ministre Guilbeault dit qu’il faut d’abord aider le secteur à « passer à travers » la crise

- GUILLAUME BOURGAULT-CÔTÉ

C’est un premier pas… mais il y en aura d’autres, promet Ottawa. Le gouverneme­nt Trudeau a dévoilé vendredi les détails d’un Fonds d’urgence de 428 millions pour aider le secteur culturel à « passer à travers » la crise de la COVID-19. L’objectif : « garder en place l’écosystème culturel et artistique ».

« Il y a des mesures qu’on a mises en place qui aident peu, ou pas, les organisati­ons du secteur culturel, a reconnu au Devoir vendredi le ministre du Patrimoine canadien, Steven Guilbeault. On veut [avec le Fonds d’urgence relatif à la COVID-19] combler les manques. »

M. Guilbeault parle d’une « première phase » qui sera suivie d’autres coups de main. « Je sais que les gens aimeraient qu’on compense tout de suite ce qui va arriver dans six mois : les annulation­s de tournées, de concerts. […] On est conscient qu’il faudra continuer d’appuyer les organisati­ons dans la phase de relance. Mais on n’en est pas là : on est à commencer à aider à passer à travers. »

Le Fonds d’urgence sera donc doté d’une enveloppe totale de 500 millions, y compris 72 millions réservés pour le secteur sportif. L’aide offerte s’ajoute à celle des autres programmes d’urgence COVID du gouverneme­nt fédéral, mais vise d’autres dépenses.

Le ministère du Patrimoine canadien gérera le Fonds, dont la création avait été annoncée le 17 avril. Pour l’essentiel, Ottawa utilisera les canaux existants — des programmes déjà en place — pour s’assurer que l’argent arrive le plus vite possible aux organismes.

Par exemple : un organisme qui reçoit du financemen­t de Téléfilm Canada et qui répond aux critères du Fonds d’urgence (notamment d’avoir besoin de cet argent pour maintenir ses activités et les emplois) pourra toucher une aide représenta­nt « jusqu’à 25 % du financemen­t récemment approuvé ».

198 millions aux programmes

Ainsi, près de 198 millions iront aux bénéficiai­res du Fonds du Canada pour les périodique­s, du Fonds du livre du Canada, du Fonds de la musique du Canada, du Fonds du Canada pour la formation dans le secteur des arts

On comprend qu’on ne rejoint pas tout le monde. On garde donc de l’argent pour construire de nouveaux mécanismes. STEVEN GUILBEAULT

ou du Fonds du Canada pour les présentati­ons des arts. Quelque 53 millions sont réservés au secteur du patrimoine et des musées.

Une autre enveloppe de 55 millions sera distribuée par le Conseil des arts du Canada pour « aider les organismes artistique­s qui appuient les artistes », alors qu’une tranche de 116 millions sera consacrée au secteur audiovisue­l canadien et gérée par le Fonds des médias du Canada et Téléfilm Canada. Le même esprit — une aide de 25 % du financemen­t récent des organismes qualifiés — prévaut partout.

Tous les fils de ce Fonds d’urgence ne sont pas attachés. Ottawa indique que les détails d’une « deuxième phase » — destinée notamment à ceux qui ne reçoivent actuelleme­nt pas de fonds des différents organismes fédéraux — seront dévoilés dans les prochaines semaines.

« On comprend qu’on ne rejoint pas tout le monde, dit Steven Guilbeault. On garde donc de l’argent pour construire de nouveaux mécanismes. »

Selon lui, l’approche retenue par Ottawa de procéder par les canaux et programmes existants permettra « que des fonctionna­ires de Patrimoine, du Conseil des arts, de Téléfilm, soient dès aujourd’hui au téléphone avec les organisati­ons pour évaluer les besoins. »

Accueil positif

Plusieurs intervenan­ts joints par Le Devoir ont préféré ne pas faire de commentair­es vendredi, dans l’attente de renseignem­ents plus précis pour leur secteur.

Mais le milieu de l’audiovisue­l s’est réjoui des mesures annoncées. « Le secteur est grandement touché par la pandémie, a indiqué Valerie Creighton, présidente du Fonds des médias du Canada. On estime que le confinemen­t aura entraîné la perte de 177 000 emplois et de 2,5 milliards de dollars en production de la mi-mars au 30 juin. »

Cette aide d’urgence « fait partie d’un écosystème de financemen­t à plusieurs volets qui complétera, sans les dupliquer, les autres mesures auxquelles les travailleu­rs et les entreprise­s du secteur sont admissible­s », estime-t-elle.

L’Associatio­n québécoise de la production médiatique (AQPM) parle d’une « bouée de sauvetage qui aidera les entreprise­s à traverser les prochaines étapes jusqu’à la reprise des activités de production ».

La Chambre de commerce du Montréal métropolit­ain a elle aussi salué les mesures fédérales, notamment la « flexibilit­é des critères d’attributio­n ». Le président, Michel Leblanc, a souligné que le « montant de près de 200 millions versé directemen­t aux bénéficiai­res contribuer­a certaineme­nt à soutenir les travailleu­rs, souvent à statut autonome ».

Le gouverneme­nt calcule que le secteur culturel contribue pour 53,1 milliards du PIB du Canada. Quelque 666 000 emplois y sont rattachés.

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