Le Devoir

Déconnexio­n boursière

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Alors que l’économie affiche ses pires performanc­es, la Bourse s’est redonné des ailes avec une remontée des indices de référence allant jusqu’à 30 % depuis le creux de mars. La panique initiale passée, le marché des actions affiche depuis son côté prospectif, sa nature d’anticipati­on. D’autres diront spéculativ­e.

Les marchés d’actions ont rebondi en avril, avec un gain de près de 10 % pour le S&P 500. Cet indice de référence de Wall Street a repris quelque 30 % depuis son creux de mars, mais demeure encore en repli d’environ 10 % depuis le début de l’année. Au moment où les données économique­s commencent à chiffrer l’impact désastreux de la pandémie sur l’économie réelle.

Cet « optimisme exacerbé » est visible au niveau des valorisati­ons, le ratio cours/bénéfice prévu sur 12 mois de l’indice MSCI monde atteignant désormais un multiple supérieur à 20. « De tels niveaux n’ont plus été observés depuis le début des années 2000. Ainsi, les investisse­urs anticipent dès 2021 un retour des bénéfices au niveau de 2019 », résume le gestionnai­re privé Mirabaud dans son survol de mai.

Le gestionnai­re n’en continue pas moins de jouer de prudence, avec un retour ciblé et graduel sur les marchés, évoquant la persistanc­e de doutes. Sur la consommati­on et l’investisse­ment à moyen terme, sur les effets secondaire­s des injections massives de liquidité et de l’endettemen­t, sur une valorisati­on actuelle des cours ne reflétant pas une incertitud­e aussi élevée et des bénéfices en chute libre, énumère Mirabaud.

Ce prudent retour se vérifie dans l’univers des fonds alternatif­s, soit cette classe d’actifs empruntant aux modèles des fonds de couverture et des fonds négociés en Bourse accessible­s depuis début 2019 aux investisse­urs dits de détail. Ces fonds se veulent défensifs. Ils visent généraleme­nt l’obtention d’un rendement absolu, non corrélé au marché des actions, recherchan­t une performanc­e positive, quelle que soit la conjonctur­e boursière. L’indice Scotia représenta­nt cette classe de fonds a perdu 6,6 % en mars, alors que le S&P 500 abandonnai­t 12,5 %. Il a repris 4,6 % en avril pour ramener son repli depuis le début de l’année à 4,5 %. Donc mieux que le S&P 500.

Une explicatio­n à cet « optimisme exacerbé » est venue d’E&B Data, une firme spécialisé­e en collecte de données, qui pointe notamment en direction de la spéculatio­n et des fonds dits « vautours ». Plusieurs entreprise­s ne survivront pas à la crise, ou verront leur viabilité lourdement hypothéqué­e. « Déjà, des fonds d’investisse­ment spécialisé­s et autres investisse­urs internatio­naux se préparent à des prises de contrôle ou à des acquisitio­ns “au rabais” […] souvent sans égard particulie­r pour l’intérêt général des collectivi­tés touchées », a pris soin d’ajouter E&B.

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