Le Devoir

La subvention salariale prolongée de trois mois

Le fédéral annonce aussi un assoupliss­ement des critères d’admissibil­ité

- HÉLÈNE BUZZETTI À OTTAWA

La prolongati­on des programmes d’aide d’Ottawa est entamée. Le gouverneme­nt fédéral a fait plaisir au patronat en annonçant vendredi que la subvention salariale offerte aux entreprise­s sera prolongée de trois mois, afin d’adoucir la reprise de leurs activités, et que les critères d’admissibil­ité seront assouplis.

« Si vous êtes propriétai­re d’une entreprise et que vous vous préparez à rouvrir vos portes, cette subvention sera là pour vous et pour vos employés », a expliqué le premier ministre Justin Trudeau. « On doit s’assurer que ce programme continue d’aider les gens — qu’il encourage les employeurs à réembauche­r leurs employés et à élargir leurs activités autant que possible. »

La subvention salariale s’adresse aux employeurs qui ré-embauchent leurs travailleu­rs ou qui les gardent à l’emploi malgré une diminution de leurs activités. Elle leur permet de faire payer 75 % des salaires par Ottawa, jusqu’à concurrenc­e de 847 $ par semaine. Les employeurs peuvent verser le 25 % restant, mais ils n’y sont pas contraints. Pour s’y qualifier, une entreprise doit avoir perdu au moins 30 % de son chiffre d’affaires mensuel (ou 15 % en mars, puisque la pandémie n’a frappé qu’à la moitié du mois). La subvention salariale ne devait au départ durer que trois mois, de mars à mai. Elle s’étirera désormais jusqu’au 29 août.

Critères assouplis

Les critères d’admissibil­ité sont aussi appelés à changer. Le gouverneme­nt fait le calcul qu’à mesure que les activités redémarrer­ont, les entreprise­s verront leurs revenus augmenter : le critère d’une baisse de 30 % ne sera peut-être plus pertinent. Ottawa semble ouvert à abaisser ce seuil.

« Quand les entreprise­s sont prêtes à reprendre et même à grandir, ce seuil ne devrait pas être une barrière à la croissance », a expliqué M. Trudeau. Le ministre des Finances, Bill Morneau, a indiqué qu’il consultera le patronat et les syndicats au cours des prochaines semaines afin d’établir le nouveau seuil.

Le gouverneme­nt fédéral élargit aussi la portée de la subvention salariale pour rendre admissible­s certaines entités qui ne l’étaient pas jusqu’à présent, dont les écoles de danse et de conduite, les associatio­ns de sport amateur et les organisati­ons journalist­iques enregistré­es.

Le coût de cet élargissem­ent n’a pas été avancé par le ministre Morneau, qui dit devoir d’abord en finaliser les derniers détails. La subvention salariale est de loin la mesure d’aide la plus coûteuse de l’arsenal fédéral. Sa version de trois mois devait coûter 73 milliards de dollars, soit environ 50 % de toute l’aide d’Ottawa. Toutefois, un premier bilan datant de lundi fait état de paiements pour le premier mois de seulement 3,36 milliards.

Autant le Conseil du patronat du Québec que la Chambre de commerce du Canada ont remercié Ottawa de ces changement­s, qui sont, disent-ils, les bienvenus.

La subvention plutôt que la PCU

Le gouverneme­nt fédéral ne s’est par ailleurs toujours pas engagé à prolonger aussi la Prestation canadienne d’urgence (PCU), qui verse 2000 $ par mois à tout travailleu­r ayant perdu ses revenus à cause de la COVID-19. Justin Trudeau a indiqué que la PCU était encore nécessaire, mais il a reconnu avoir une préférence pour la subvention salariale, parce qu’elle maintient le lien d’emploi entre le travailleu­r et son employeur.

« Des millions de Canadiens ont perdu leur emploi, n’ont plus de chèque de paye et n’ont pas la possibilit­é d’avoir une subvention salariale parce qu’il n’y a plus d’employeur pour eux, alors on continue d’avoir besoin de la PCU, a-t-il dit. Mais idéalement, effectivem­ent, les gens utiliserai­ent plus la subvention salariale. »

M. Trudeau a aussi rappelé que, « dans bien des cas », la subvention salariale est plus généreuse que la PCU. De fait, dès qu’un travailleu­r gagne plus de 667 $ par semaine, la subvention salariale de 75 % lui garantit une rémunérati­on plus élevée que les 500 $ par semaine de la PCU.

La PCU fait de plus en plus débat en contexte de reprise, plusieurs craignant qu’elle soit si généreuse qu’elle encourage les travailleu­rs à ne pas retourner au boulot. Un travailleu­r qui quitte volontaire­ment son emploi ne s’y qualifie pas. Mais la ministre responsabl­e de cette prestation, Carla Qualtrough, a admis la semaine dernière qu’un travailleu­r percevant la PCU qui est rappelé au travail pourrait continuer à la recevoir s’il refuse d’y retourner parce qu’il juge que ce n’est pas sécuritair­e de le faire.

M. Trudeau a par ailleurs annoncé une somme de 450 millions de dollars pour financer le salaire des chercheurs — à 75 % jusqu’à concurrenc­e de 847 $ par semaine — oeuvrant dans les instituts de recherche. Ces instituts ne se qualifiaie­nt pas à la subvention salariale. Les chercheurs n’étaient souvent pas admissible­s non plus à la PCU, parce qu’ils travaillai­ent pour des entités gouverneme­ntales. L’enveloppe servira aussi à couvrir certains coûts de fonctionne­ment des instituts de recherche et des université­s actives en recherche.

La subvention salariale ne devait au départ durer que trois mois, de mars à mai. Elle s’étirera désormais jusqu’au 29 août.

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