Le Devoir

L’entreprise Gazoduq sollicite l’aide du gouverneme­nt Legault pour le projet GNL Québec

Le projet pourrait faire partie de la relance économique du gouverneme­nt Legault

- ALEXANDRE SHIELDS

L’entreprise Gazoduq demande l’aide financière du gouverneme­nt du Québec pour construire le gazoduc qui alimentera l’usine de liquéfacti­on de GNL Québec, a constaté Le Devoir. Dans le contexte de la relance économique, le gouverneme­nt Legault ne ferme d’ailleurs pas la porte à un soutien pour ce projet d’exportatio­n de gaz naturel albertain.

L’entreprise contrôlée par des intérêts financiers américains a un total de 18 lobbyistes inscrits au registre québécois, dont 10 proviennen­t directemen­t de Gazoduq. Le mandat de lobbying de ces derniers a été modifié le 13 mars, soit une semaine après le retrait d’un investisse­ur majeur du projet, piloté par la société en commandite GNL Québec. Celle-ci contrôle le projet de gazoduc, mais aussi celui d’usine de liquéfacti­on et de terminal maritime Énergie Saguenay.

Selon ce qu’on peut lire dans le registre des lobbyistes du Québec, cette modificati­on consiste en fait en un « ajout » au mandat des 10 lobbyistes de l’entreprise. Celui-ci comprend désormais des démarches « afin d’obtenir le soutien financier du gouverneme­nt en vue de la réalisatio­n du projet (la forme, le montant et le programme sont inconnus). Les sommes pourraient notamment servir à l’embauche de main-d’oeuvre et éventuelle­ment à financer une partie des coûts du développem­ent et de la constructi­on du projet ».

Il faut dire que le projet de gazoduc est d’une ampleur sans précédent au Québec. Cette conduite de 780 km, qui traversera le Québec de l’Abitibi au Saguenay, est évaluée pour le moment à 4,5 milliards de dollars. Le projet continue d’ailleurs de progresser, malgré la crise actuelle. Le gouverneme­nt Trudeau a annoncé vendredi dernier la conclusion d’une entente avec le gouverneme­nt Legault, afin de mener une seule évaluation environnem­entale conjointe.

Promoteurs confiants

La directrice principale, affaires publiques et relations avec les communauté­s de Gazoduq, Marie-Christine Demers, n’a pas précisé si l’aide financière de Québec était vitale pour la survie du projet, après le retrait en mars du fonds du milliardai­re américain Warren Buffett. Celui-ci devait investir pas moins de 4 milliards de dollars dans le projet de gazoduc et d’usine de liquéfacti­on. « Comme c’est le cas pour de nombreuses entreprise­s au pays, nous ne faisons pas exception et devons considérer les programmes offerts et les différente­s sources de financemen­t, [qu’elles soient] publiques ou privées », a-t-elle expliqué.

Mme Demers a toutefois affirmé que le projet sera viable après la crise. « Ayant des visées à plus long terme où une croissance des besoins en énergie générant moins de gaz à effet de serre est toujours prévue, nous serons encore en phase de développem­ent au cours des prochaines années, ce qui permettra certaineme­nt d’amener des retombées économique­s positives dans les différente­s régions de notre tracé préliminai­re du même coup. »

Même optimisme chez GNL Québec, qui juge que son projet est « très attrayant » pour les investisse­urs. GNL Québec a un total de huit lobbyistes inscrits au registre. Leur mandat comprend des démarches pour obtenir un « soutien financier » du gouverneme­nt du Québec.

Ouverture à Québec

Le gouverneme­nt est-il ouvert à soutenir financière­ment Gazoduq et GNL Québec, dans un contexte de relance économique au Québec ? « Le projet Énergie Saguenay représente un projet économique majeur pour le Québec et la région du Saguenay–Lac-SaintJean », a répondu le cabinet du ministre de l’Économie et de l’Innovation, Pierre Fitzgibbon.

« Avec l’appui d’autres investisse­urs, le gouverneme­nt pourrait être ouvert à participer au financemen­t d’études de faisabilit­é sur la base de l’impact économique très important du projet pour les communauté­s impliquées et pour l’ensemble du Québec », a également souligné son directeur des communicat­ions, Mathieu St-Amand. Québec répète toutefois qu’« avant de s’impliquer dans le financemen­t complet d’un projet de plusieurs milliards de dollars, le gouverneme­nt attendra les études environnem­entales complètes et continuera de suivre la démarche d’acceptabil­ité sociale de l’entreprise ».

Titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal, Pierre-Olivier Pineau estime qu’une implicatio­n financière de l’État québécois dans les projets de GNL Québec et de Gazoduq comportera­it une grande part de risque. « Ce serait un investisse­ment très risqué pour le gouverneme­nt, à moins que des acheteurs internatio­naux sérieux ne soient identifiés. Le risque serait à la fois économique et politique, parce que, dans les deux cas, les choses pourraient mal tourner. »

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ALEXANDRE SHIELDS LE DEVOIR Les navires qui exporteron­t le gaz naturel liquéfié en passant par le Saguenay seront deux fois plus imposants que ce vraquier, photograph­ié à l’embouchure du fjord.

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