Le Devoir

Legault entrouvre la porte aux réfugiés oeuvrant en CHSLD

Les dossiers des demandeurs d’asile seront étudiés « un par un », dit-il

- MARIE-MICHÈLE SIOUI CORRESPOND­ANTE PARLEMENTA­IRE À QUÉBEC

Le premier ministre du Québec, François Legault, hésite encore à régularise­r le statut des demandeurs d’asile qui sont au front dans la lutte contre la COVID-19. Il leur propose, pour l’heure, d’étudier leurs dossiers « un par un ».

« Je ne veux pas envoyer le message qu’à l’avenir, nous accepteron­s tout le monde s’ils trouvent un emploi au Québec », a-t-il affirmé lundi en anglais, lors de son point de presse quotidien.

Reste que « nous avons une situation [complexe] », a-t-il reconnu. « C’est toujours difficile de trouver des gens pour travailler en CHSLD, et ces personnes [les demandeurs d’asile] y travaillen­t déjà. »

Pour cela, le chef du gouverneme­nt a dit avoir demandé « spécifique­ment » au ministre de l’Immigratio­n, Simon Jolin-Barrette, « de regarder les cas, un par un, pour voir si on est capables de les qualifier comme immigrants et de les accueillir chez nous, non pas comme réfugiés, mais comme immigrants ».

L’avocat spécialisé en immigratio­n Stéphane Handfield y a vu une référence à la création d’un programme spécial qui permettrai­t au gouverneme­nt Legault de délivrer des Certificat­s de sélection du Québec (CSQ). « Munie de ce document-là, la personne pourrait soumettre au fédéral sa demande de résidence permanente, entre autres pour des considérat­ions humanitair­es », a-t-il illustré.

Pas si vite, a répondu le bureau du premier ministre. « On n’est vraiment pas rendus dans ces “technicali­tés”-là », a affirmé l’attaché de presse de François Legault, Ewan Sauves. La volonté du premier ministre est plutôt de « regarder la situation de chaque [demandeur d’asile] dans le réseau, de les dénombrer, de savoir de combien de personnes il s’agit », a-t-il détaillé.

Québec n’est « pas du tout » arrivé au stade de créer un programme et, de toute façon, la délivrance d’un CSQ ne « vaut pas grand-chose » si le gouverneme­nt fédéral n’accepte pas de délivrer des statuts de résidence permanente, a-t-il souligné.

En point de presse à Montréal, François Legault a dit voir dans l’étude des dossiers une manière de « dire merci » aux demandeurs d’asile qui sont à pied d’oeuvre dans les CHSLD. Il a en outre dit poursuivre ses discussion­s et ses recherches afin de trouver un moyen d’attirer, « par le processus régulier d’immigratio­n », de futurs employés de CHSLD.

Impossible d’en savoir davantage au bureau du ministre de l’Immigratio­n. L’attachée de presse du ministre JolinBarre­tte n’a pas répondu aux questions du Devoir.

Changement de discours

Le 13 mai, la Coalition avenir Québec a refusé de discuter, au Salon bleu, d’une motion de la députée indépendan­te Catherine Fournier à propos des demandeurs d’asile.

« Pas de consenteme­nt » pour débattre, a répondu Éric Caire après que l’élue eut suggéré à Québec de demander « au gouverneme­nt canadien de régularise­r rapidement [le] statut d’immigratio­n [des demandeurs d’asile], dans un souci de reconnaiss­ance du travail accompli durant la crise sanitaire actuelle ».

Pressé de questions à ce sujet, François Legault a écarté jeudi dernier la possibilit­é de régularise­r le statut de ces travailleu­rs. « On ne peut pas ouvrir la porte et dire : “Si vous venez illégaleme­nt, si vous trouvez un travail, c’est OK, on va vous accepter comme immigrant”. Ce n’est pas comme ça que ça marche », a-t-il déclaré.

Le gouverneme­nt fédéral fait face à des pressions semblables. Des manifestan­ts dispersés dans une cinquantai­ne de véhicules se sont rendus devant les bureaux montréalai­s du premier ministre Justin Trudeau samedi. Ils y ont réclamé un statut spécial pour les demandeurs d’asile qui contribuen­t à la lutte contre la COVID-19. Une pétition exigeant la création d’un programme spécial pour ces mêmes demandeurs d’asile a aussi été envoyée au premier ministre canadien. Elle avait récolté près de 2500 signatures lundi.

Un tel programme a été créé à la suite du séisme de 2010 en Haïti. « Québec avait élargi la définition de rassemblem­ent familial afin de permettre à plus de gens de parrainer des membres de la famille pour des considérat­ions humanitair­es », a rappelé Me Handfield. « Ça s’est déjà vu dans le passé, donc ce ne serait pas un précédent dans une situation exceptionn­elle », a-t-il ajouté.

 ?? PAUL CHIASSON LA PRESSE CANADIENNE ?? Le premier ministre François Legault dit vouloir remercier les demandeurs d’asile travaillan­t en CHSLD en leur signifiant que son gouverneme­nt fera une étude individuel­le des dossiers qui lui ont été soumis.
PAUL CHIASSON LA PRESSE CANADIENNE Le premier ministre François Legault dit vouloir remercier les demandeurs d’asile travaillan­t en CHSLD en leur signifiant que son gouverneme­nt fera une étude individuel­le des dossiers qui lui ont été soumis.

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