McGill poursuit son étude sur l’hydroxychloroquine
L’Université McGill poursuit son essai clinique visant à vérifier l’efficacité de l’hydroxychloroquine à prévenir les complications graves de la COVID-19, contrairement à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui a suspendu les siens à la suite d’une publication dans la prestigieuse revue médicale The Lancet indiquant que ce médicament ne procurait aucun bénéfice et même pouvait s’avérer néfaste pour traiter les personnes souffrant de la COVID-19.
Il y a quelques jours, la revue The Lancet publiait les résultats d’une vaste étude observationnelle ayant porté sur 96 032 patients atteints de la COVID-19 et hospitalisés dans 671 hôpitaux du monde.
Les patients étaient séparés en quatre groupes selon le traitement qu’ils recevaient, soit de la chloroquine ou de l’hydroxychloroquine seule, ou en association avec un antibiotique, tel que l’azithromycine. Les 81 144 patients qui n’ont reçu aucun de ces traitements formaient le groupe contrôle. Les chercheurs ont observé que les patients ayant été traités avec l’une ou l’autre de ces quatre options thérapeutiques couraient un risque accru d’arythmie cardiaque et de mortalité comparativement aux patients du groupe contrôle.
Face à ces résultats décevants, voire inquiétants, l’OMS a suspendu l’essai clinique Solidarity qu’elle soutenait et qui était mené sur des patients hospitalisés à travers le monde, tout comme dans l’étude du Lancet.
La Dre Emily McDonald, directrice de l’Unité d’évaluation des pratiques cliniques du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) fait remarquer que les résultats publiés dans The Lancet ont été obtenus lors « d’une étude observationnelle, dont la méthodologie présente plusieurs faiblesses ».
« Les patients n’ont pas été répartis au hasard dans chacun des cinq groupes ». Qui plus est, « les patients du groupe contrôle ne recevaient pas un placebo », comme cela doit être le cas dans un essai clinique où les patients reçoivent tous un comprimé dont
L’OMS a suspendu l’essai clinique Solidarity qu’elle soutenait et qui était mené sur des patients hospitalisés à travers le monde, tout comme dans l’étude du Lancet
les expérimentateurs et les patients ignorent la nature.
Autre distinction notable par rapport à l’étude du Lancet qui portait sur des patients gravement malades qui étaient hospitalisés : celle qui a été menée à l’Institut de recherche du CUSM est « un essai clinique randomisé et à double insu » dont les participants sont « plus jeunes, ne souffrent d’aucune maladie chronique, et dont les symptômes de la COVID-19 sont suffisamment légers pour leur permettre de demeurer à la maison », souligne la Dre McDonald qui codirige cet essai clinique.
« La publication des résultats de cette étude observationnelle du Lancet est problématique pour les essais cliniques randomisés et à double insu qui sont menés dans les règles de l’art, car, d’une part, plusieurs de ces essais vont probablement s’arrêter, et d’autre part, ils auront désormais plus de mal à recruter des patients, alors que, pourtant, ils allaient fournir des résultats beaucoup plus fiables », déplore la Dre McDonald.
Justement, l’Université de Calgary et l’Université de l’Alberta qui menaient l’essai clinique Alberta HOPE COVID19 ont décidé de suspendre leur étude [qui est similaire à celle conduite au CUSM] pour un moment, « le temps de réviser plus en détail [leurs] normes de sécurité », précise la Dre Luanne Metz, coordonnatrice de l’étude.
« Même si l’étude observationnelle décrite dans The Lancet était de très bonne qualité, notre étude porte sur une population de patients complètement différente, car nos participants ne sont pas malades et viennent tout juste de recevoir leur diagnostic. Notre étude visait à administrer l’hydroxychloroquine au tout début de la maladie dans l’espoir d’éviter des hospitalisations. »
« L’étude du Lancet risque de changer la perception qu’auront les patients de ce médicament. Si les patients croient qu’il est dangereux, ils auront peur de participer à notre étude et nous aurons du mal à recruter de nouveaux participants. Il sera ainsi assez difficile de poursuivre l’étude », souligne la Dre Metz.