Le Devoir

Joe Biden remet sa campagne en marche dans une Amérique divisée

La pandémie s’est abattue plus férocement jusqu’ici sur les régions votant démocrate

- ÉLODIE CUZIN À WASHINGTON AGENCE FRANCE-PRESSE

C’est en portant un masque noir que Joe Biden a fait sa première apparition publique en plus de deux mois, symbole, face à un Donald Trump qui refuse catégoriqu­ement de se montrer masqué, d’une Amérique divisée dans cette campagne présidenti­elle bouleversé­e par la crise du coronaviru­s.

L’ancien vice-président américain a choisi, pour son retour sur le terrain lundi, une journée marquée par la solennité aux États-Unis puisqu’elle célèbre la mémoire des Américains tombés au combat.

L’occasion était cette fois encore plus assombrie par le bilan vertigineu­x de la pandémie, qui a fait près de 100 000 morts aux États-Unis, pays le plus endeuillé du monde.

Accompagné de son épouse Jill Biden, le candidat démocrate à la Maison-Blanche, 77 ans, a déposé une gerbe sur un monument aux anciens combattant­s américains près de son domicile. Tous deux portaient un masque noir et des tenues sombres.

À une centaine de kilomètres de là, le président républicai­n, 73 ans, et son épouse, Melania Trump, participai­ent à leur deuxième hommage aux militaires du jour, sans porter de masque.

« Cela répond à nos divisions : les deux partis ne sont d’accord sur rien, même pas sur les mesures de santé publique », analyse Larry Sabato, politologu­e à l’Université de Virginie.

Ce contraste correspond en grande partie au type de partisans des deux candidats, poursuit-il. « Les démocrates sont largement soutenus par les femmes […], or les femmes sont fortement favorables aux mesures de distanciat­ion sociale et au port du masque. Trump, en revanche, est largement soutenu par des hommes blancs, particuliè­rement les ouvriers blancs. Ceux-ci perçoivent le masque comme un signe de faiblesse », affirme-t-il.

Accentuant aussi peut-être les différence­s dans la perception du danger, la pandémie s’est abattue plus férocement jusqu’ici sur les régions qui votent démocrate, avec une mortalité plus élevée, selon des études du New York Times et de The Economist.

Les deux partis ne sont d’accord sur rien, même pas sur les mesures » de santé publique LARRY SABATO

Tweets moqueurs

L’image de Joe Biden portant ses célèbres lunettes d’aviateur sur son masque noir, qui rabattait ses oreilles vers l’avant, a été « tweetée » par Brit Hume, un éditoriali­ste de la chaîne prisée des conservate­urs Fox News, avec un commentair­e moqueur : « Cela aide peutêtre à expliquer pourquoi Trump n’aime pas porter un masque en public. »

Un message « retweeté » par le président lui-même lundi soir.

Le candidat démocrate à la MaisonBlan­che a jugé mardi que Donald Trump était un « parfait crétin » pour avoir relayé ce tweet.

« C’est un crétin, un parfait crétin, de dire ces choses », a-t-il déclaré sur CNN, lors de sa première interview réalisée en personne depuis que la pandémie a brusquemen­t paralysé la campagne pour la présidenti­elle de novembre.

« La vérité, c’est que je pense qu’on est censé diriger en donnant l’exemple », a-t-il également affirmé en qualifiant les propos de Donald Trump de « trucs machos » qui ont « tué des gens ».

L’ancien vice-président de Barack Obama n’avait pas quitté sa maison du Delaware pour une apparition publique depuis la mi-mars, lorsque la crise de la COVID-19 avait soudaineme­nt paralysé la campagne pour la présidenti­elle américaine du 3 novembre.

S’il s’est offert quelques balades à pied ou à vélo, loin des caméras, Joe Biden avait uniquement fait campagne par visioconfé­rence depuis sa maison.

Un choix là aussi moqué par les républicai­ns et Donald Trump, qui l’ont décrit comme un homme craignant l’action de terrainl.

Pendant ce temps, le président républicai­n jouissait de l’attention des médias à la Maison-Blanche et reprenait les voyages officiels dans des États clés pour la présidenti­elle. Sans jamais porter de masque devant les caméras.

De rares voix républicai­nes tentent de dépasser les lignes partisanes autour de la pandémie, comme le gouverneur du Dakota du Nord, Doug Burgum, qui avait appelé, juste avant le long weekend férié, ses concitoyen­s à ne pas tomber dans les « divisions insensées ».

« Si quelqu’un porte un masque, il ne le fait pas pour montrer à quel parti il appartient ou quel candidat il soutient », a-t-il déclaré, en refoulant ses larmes. « Il le fait peut-être parce qu’il a un enfant de cinq ans traité pour un cancer. Il a peut-être des adultes vulnérable­s dans son entourage, qui sont en ce moment en train de lutter contre la COVID. »

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OLIVIER DOULIERY AGENCE FRANCE-PRESSE L’ancien vice-président américain a choisi, pour son retour sur le terrain lundi, une journée marquée par la solennité aux États-Unis puisqu’elle célèbre la mémoire des militaires américains tombés au combat.

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