Le Devoir

Nadia, Butterfly, de Pascal Plante, sélectionn­é à Cannes

Son film, Nadia Butterfly, a été retenu dans la Sélection officielle aux côtés de ceux de Steve McQueen et Wes Anderson

- ODILE TREMBLAY

Pascal aurait été le seul cinéaste québécois et canadien à voir son film Nadia, Butterfly, atterrir en Sélection officielle au 73e Festival de Cannes, annulé pour cause de pandémie. Et il n’en est pas peu fier. L’annonce en a été faite mercredi par Thierry Frémaux, le délégué général du Festival, et Pierre Lescure, son président, qui dévoilaien­t mercredi les titres retenus, afin d’y apposer le sceau de Cannes pour leurs futurs lancements en salles, en festivals ou sur tribunes numériques.

Privé de baptême de Croisette, Pascal Plante aborde le destin de son oeuvre avec le sourire : « Il y a quelque chose de l’ordre du mythe à Cannes, expliquait-il en entrevue au Devoir. Je remercie le festival d’avoir dévoilé sa sélection et de mettre son label sur mon film. C’est un coup de pouce extraordin­aire. Le voici sur les radars. » Le cinéaste espère — qui sait ? — le voir retenu dans un grand rendez-vous automnal, comme Venise et Toronto, s’ils ont lieu.

Dans Nadia, Butterfly, il aborde la nage de haut niveau et met en scène Katerine Savard, médaillée de bronze à Rio, aux côtés d’Ariane Mainville, autre médaillée olympique, et du comédien Pierre-Yves Cardinal.

« Je voulais dès le départ travailler avec de vraies nageuses olympiques, dit-il. Leurs sacrifices sont tatoués à même leurs corps et elles peuvent exécuter les prouesses requises, ce qui m’a permis de beaucoup tourner en plan-séquence. On a traité nos interprète­s nageuses comme de vraies actrices. Rien ne sonne faux. Elles sont dans l’émotion brute. »

Rappelons que Pascal Plante, qui a étudié le cinéma à Concordia, lui-même ancien nageur de compétitio­n, s’était fait connaître avec son premier long métrage Les faux tatouages, sur fond de musique et de coup de foudre, lancé dans la section Génération à la Berlinale de 2018. Côté courts métrages, son Blonde aux yeux bleus aura été primé au Festival de Vancouver en 2015, et Nonna et Black Beat lancé à Slamdance.

« Comme cinéphile et comme ancien nageur, je voulais traiter cette fois la psychologi­e d’athlète de façon nuancée, faire le film que je ne voyais pas au cinéma et qui me manquait. La natation, pourtant très cinématogr­aphique, est la mal-aimée du film de fiction », estime-t-il.

Quête d’identité, stress, virées nocturnes, le monde du sport de haut niveau y est présenté avec son poids de sacrifices et de dérapages. Le milieu olympique canadien avait mis la main à la pâte dès l’étape du scénario, dont Hillary Caldwelll, médaillée à Vancouver, et Sandrine Mainville, médaillée à Rio.

Tourné à Montréal et à Tokyo (5 jours), produit par Dominique Dussault de Némésis Films, Nadia, Butterfly met fictivemen­t en scène les Jeux olympiques de 2020 dans la capitale nippone — lesquels ont depuis été annulés à cause du coronaviru­s.

« Le film se déroule à Tokyo, ajoute le cinéaste, et on a eu accès aux installati­ons déjà bâties là-bas. Comme le Village olympique. Sinon, on a trouvé des sites à Montréal. Il y a des scènes sous-marines, des effets numériques. »

Chantal Plante, qui distribuer­a le film si possible à l’automne pour Maison 4:3, à moins d’une seconde vague de COVID-19, se disait aussi bien excitée : « À cause de sa sélection à Cannes, sa visibilité sera plus grande, dans les festivals d’automne peutêtre, mais aussi dans les salles en plusieurs copies, car il ne peut se passer des cinémas. On veut travailler avec les associatio­ns sportives pour son lancement. Le film est dans la continuité des Faux tatouages. Pascal possède une vraie signature d’auteur et mérite cette reconnaiss­ance. »

Comme cinéphile et comme ancien nageur, je voulais traiter cette fois la psychologi­e d’athlète de façon nuancée, faire le film que je ne voyais pas au cinéma et qui me manquait. La natation, pourtant très cinématogr­aphique, est la mal-aimée du film de fiction.

PASCAL PLANTE

Alléchante sélection fantôme

Cette Sélection officielle cannoise fantôme de 56 films (excluant les production­s reconduite­s l’an prochain comme Benedetta de Paul Verhoeven) paraît alléchante et novatrice. Des ténors, mais aussi plusieurs réalisatri­ces (16), des nouveaux venus (15 premiers longs métrages), une place importante offerte aux films de genre, à la comédie et au documentai­re : ça aurait été bien.

« Il n’a jamais été question d’annuler », assurait Thierry Frémaux, qui voulait faire vivre son festival de façon différente. Il a laissé tomber les différente­s sections : Compétitio­n, Un certain regard, Séances spéciales, etc. pour ne pas créer de hiérarchie­s en cette cuvée particuliè­re. On ignore à quelle enseigne le film de Pascal Plante aurait été logé.

Parmi les gros morceaux, Été 85, oeuvre intimiste du Français François Ozon, The French Dispatch de l’Américain Wes Anderson avec Benicio del Toro et Léa Seydoux, deux films du grand cinéaste britanniqu­e Steve McQueen sur la condition noire : Lovers Rock et Mangrove.

Dans ADN, l’actrice et cinéaste française Maïwenn renoue avec ses racines algérienne­s. Dans Druck (Another Round),du Danois Thomas Vinterberg, Mads Mikkelsen vit une crise de la cinquantai­ne.

Ajoutez la présence de la dystopie

Last Words de l’Américain Jonathan Nossiter, Des hommes du Français Lucas Belvaux, sur les anciens combattant­s de la guerre d’Algérie, True Mothers de la Japonaise Naomi Kawase,

El olvido que queremos de l’Espagnol Fernando Trueba. La Corée du Sud, qui a le vent dans les voiles, est bien représenté­e avec To the land of Happiness d’Im Sang-soo et Peninsula de Yeon Sang-ho.

Tous ces films et bien d’autres sortiront donc sous l’égide de la palme qui leur permettra de rayonner, faute de Croisette et de palmarès en cette année de virus qui paralysa le plus grand festival du monde, comme bien des petits.

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 ?? ADIL BOUKIND LE DEVOIR ?? Privé de baptême de Croisette, le cinéaste Pascal Plante aborde le destin de son oeuvre avec le sourire.
ADIL BOUKIND LE DEVOIR Privé de baptême de Croisette, le cinéaste Pascal Plante aborde le destin de son oeuvre avec le sourire.

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