Un soulagement pour les arts vivants
Des questions demeurent, mais le dialogue est engagé
Les arts vivants le réclamaient depuis un moment. Ils l’ont enfin obtenu mercredi. Un échange avec la ministre de la Culture et des Communications, Nathalie Roy. Une rencontre de cinquante-cinq minutes durant laquelle des représentants du milieu ont pu présenter les spécificités et les inquiétudes liées à leur domaine. Le tout a été suivi d’une discussion avec le directeur du cabinet, Sandy Boutin.
« Nous avons pu nous retrouver, face à face, avec d’autres humains. Nous avons bien entendu les préoccupations de la ministre, et je crois qu’elle a bien entendu les nôtres, remarque avec soulagement la présidente du Conseil québécois du théâtre (CQT), Anne Trudel. Oui, il reste beaucoup de travail à faire. Mais tant que le dialogue est là, ce travail ne me fait pas peur. »
Ce qui faisait peur avant : l’annonce gouvernementale du 22 mai. Celle consacrée à la réouverture des bibliothèques, des ciné-parcs et des musées, de laquelle les arts vivants avaient été évacués. La déception, extrêmement vive, avait bien été exprimée dans une lettre ouverte portée par « le groupe Kemeid », comme l’appelle amicalement Lorraine Pintal. Appuyée par plus de 32 000 signatures, cette missive intitulée Pour les arts vivants demandait à madame la ministre de, s’il vous plaît, échanger, écouter, dialoguer.
C’est aux membres de ce même groupe, composé du directeur artistique du Quat’Sous, Olivier Kemeid, donc, ainsi que de Sylvain Bélanger, de Martin Faucher, de Brigitte Haentjens, de Stéphanie Jasmin, de Denis Marleau, de Ginette Noiseux et de Claude Poissant que Nathalie Roy a accordé du temps mercredi matin. Se sont jointes à eux Anne Trudel du CQT et la chorégraphe et interprète Mélanie Demers.
Lorraine Pintal n’était pas présente à la rencontre, mais comme tous dans le milieu, elle attendait son issue. La directrice artistique et générale du Théâtre du Nouveau Monde considérait en effet que le plan de relance dévoilé par Nathalie Roy le 1er juin ne répondait pas aux recommandations préalables.
Tant d’interrogations demeuraient encore en suspens… « Qu’est-ce qu’on fait avec la saison prochaine ? Que vat-il arriver avec les contrats signés avec les acteurs, les artistes, les concepteurs, les auteurs ? Et qui va compenser pour ces pertes d’emploi ? »
Il y avait aussi, bien sûr, la question du numérique, et de ces fameuses captations proposées à répétition par le ministère. Un procédé qui risque de miner la charge et l’expérience que suppose de l’art vivant. « C’était ça, l’insatisfaction, dit Lorraine Pintal. Ce n’est pas que nous boudions l’argent neuf, pas du tout. C’est simplement que nous voulions avoir plus de précisions. Même si je sais que le diable se niche dans les détails ! »
Ces détails n’ont pas tous été éclaircis lors de la rencontre, remarque Mélanie Demers, seule professionnelle de la danse qui était présente. « Mais ça bouge ! D’avoir un lien plus direct a permis de calmer la fougue. »
D’avoir un lien plus direct a permis de
calmer la fougue MÉLANIE DEMERS
Brouillard à dissiper
Rappelons que ce sont 400 millions de dollars, dont 250 millions d’argent frais, qui ont été annoncés le 1er juin. De cela, une enveloppe de 50,9 millions était destinée au cirque, au théâtre, et à la danse. Un certain flou demeurait néanmoins, et demeure encore, ajoute Anne Trudel.
« Notamment en ce qui a trait aux contrats et aux engagements pris pour l’automne ». Tout comme en ce qui concerne la marche « à suivre pour monter des saisons alternatives ».
Il y a aussi la question de ces 6,5 millions de dollars, destinés à la fois à des bourses et à un fonds d’urgence pour les artistes « en situation extrême », qui inquiète. Notamment puisque ce Fonds doit être administré par l’Union des artistes et la Guilde des musiciens et des musiciennes du Québec. « Nous avons proposé à la ministre d’ouvrir la porte de ces programmes aux artistes qui ne sont pas membres de l’UDA et de la Guilde », souligne Anne Trudel. La réponse reste à venir.
Une des meilleures nouvelles à souligner, selon la présidente du CQT, c’est la question des lieux. Bien sûr, « on attend encore le guide sanitaire (de la CNESST). Mais on sent une ouverture pour nous permettre de nous réapproprier nos espaces, nos locaux, nos salles de répétition. »
Et cette ouverture, elle signifie beaucoup. « Tout n’est pas figé. Le dialogue sera toujours notre meilleur allié. »
Des rencontres subséquentes avec le ministère de la Culture et des Communications devraient suivre. Les dates n’ont pas encore été confirmées.