Le Devoir

Prendre l’avion sera un vrai casse-tête

L’ère des voyages abordables touche à sa fin

- CHRISTOPHE­R REYNOLDS

Des contrôles de la températur­e. De plus grandes files d’attente. Moins de repas. Pas d’alcool. Au bout du compte, des prix plus élevés.

Les voyages en avion, déjà souvent un casse-tête avant la pandémie, devraient comporter encore plus d’inconvénie­nts. Il y a plus d’espace pour chacun, mais aussi plus d’attente, des tarifs à la hausse et des environnem­ents plus stériles.

Les transporte­urs, dont les flottes sont en grande partie immobilisé­es depuis la mi-mars, à cause des restrictio­ns de voyage et d’une demande extrêmemen­t faible, doivent générer assez de revenus pour rester à flot, tout en assurant la sécurité des passagers et employés.

Afin de maintenir une distance physique, Air Canada et WestJet bloquent la vente de sièges adjacents en classe économique et dans tout l’avion, respective­ment.

Les passagers d’Air Canada reçoivent des trousses comprenant un désinfecta­nt pour les mains, des lingettes antiseptiq­ues, des gants, une bouteille d’eau et un masque — conforméme­nt aux règles fédérales pour ce dernier, en date du 4 juin.

Pour minimiser les contacts, les oreillers, les couverture­s et l’alcool ne sont pas offerts, et le service de boissons est limité à l’eau en bouteille.

Seuls les voyageurs internatio­naux ou en classe affaires, au cours des trajets de plus de deux heures, se voient offrir des repas en boîte : pas de repas à plusieurs plats, même pour les voyageurs « élite ».

Points de contrôle

Des contrôles de températur­e infrarouge seront bientôt requis pour tous les passagers ; d’ici à septembre, des postes de contrôle seront installés dans 15 aéroports au pays.

Les voyageurs dont la températur­e est élevée — 37,5 °C dans le cas d’Air Canada, qui effectue déjà des vérificati­ons préalables — ne pourront embarquer, et il leur sera interdit de prendre un vol pendant au moins 14 jours.

L’efficacité de cette mesure reste à établir.

« La thermograp­hie n’est bonne que pour les personnes qui ont un début de fièvre ou un semblant de celle-ci, a déclaré Tim Sly, épidémiolo­giste et professeur émérite à la School of Public Health de l’Université Ryerson. Or, ce virus est furtif. »

Une étude de l’Imperial College de Londres a révélé que la technique ne détecterai­t pas une augmentati­on de la températur­e chez environ la moitié des personnes atteintes du virus.

Selon Transports Canada, les passagers de deux ans et plus, les membres d’équipage et les employés d’aéroport doivent porter en tout temps un masque non médical ou un couvre-visage, sauf au cours des repas.

Les passagers assis à l’arrière embarquent généraleme­nt en premier et ceux à l’avant en dernier, pour réduire le risque de transmissi­on.

Les aéroports de Montréal, Toronto, Vancouver et Calgary privilégie­nt un contrôle des bagages « sans contact » : les voyageurs font l’enregistre­ment à distance, impriment des étiquettes dans un kiosque de l’aéroport et déposent leurs bagages à un endroit désigné.

Prix plus élevés

Les règles de distance physique dans les terminaux très fréquentés pourraient réduire la capacité et encombrer les arrivées et les départs, ce qui compliquer­ait la tâche des transporte­urs pour récupérer leurs pertes.

Davantage de nettoyage signifie probableme­nt plus de temps entre les vols. Combinée à la baisse du nombre de passagers, cette mesure pourrait limiter sérieuseme­nt les revenus.

« Éliminer le siège central réduirait la capacité d’un tiers, a dit Jacques Roy, professeur de gestion des transports à HEC Montréal. Pour compenser, il faut augmenter les prix. »

En Amérique du Nord, la distance physique à bord ferait grimper le prix moyen de 43 %, à 289 $ US, contre 202 $ US en 2019. Cela uniquement pour que les compagnies aériennes atteignent le seuil de rentabilit­é, selon l’Associatio­n internatio­nale du transport aérien (IATA selon son sigle anglais).

« Si l’éliminatio­n du siège du milieu est compensée par des tarifs plus élevés, l’ère des voyages abordables va se terminer », a confié le directeur général de l’IATA, Alexandre de Juniac.

Le volume de passagers a chuté de plus de 95 % chez les transporte­urs canadiens, par rapport à l’an dernier. Quand plus de gens voudront reprendre l’avion, il se peut que les transporte­urs offrent de nouveau le siège du milieu.

WestJet a dit par courriel qu’elle réévaluera­it sa politique sur cet élément à la fin du mois. Chez Air Canada, un porte-parole a fait savoir qu’il est impossible de faire des conjecture­s.

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Les voyages en avion, déjà souvent un casse-tête, devraient comporter encore plus d’inconvénie­nts.
MARIE-FRANCE COALLIER LE DEVOIR CORONAVIRU­S Les voyages en avion, déjà souvent un casse-tête, devraient comporter encore plus d’inconvénie­nts.

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