Le Devoir

Montréal, une ville cool ?

Il est temps que la classe politique se soucie de la vie nocturne

- Conseil de nuit de MTL 24 / 24 *

Pilier de l’identité de notre ville, la vie nocturne forme depuis toujours un rendez-vous culturel essentiel à notre vivre-ensemble. C’est lors d’une nuit à Montréal que nous côtoyons nos amis, découvrons nos collègues de travail et peut-être même trouvons l’amour. La vie nocturne est fondamenta­le à notre besoin de socialisat­ion.

Les nuits de Montréal constituen­t également une industrie vivante formant le coeur créatif montréalai­s : des concerts folk du Quai des Brumes aux shows métal du Turbohaus, en passant par les raves du Studio NotreDame, elles font vivre d’innombrabl­es artistes et technicien­s qui, bien souvent, produisent de la culture à l’extérieur des structures institutio­nnelles.

C’est un secteur si important de l’identité de notre ville que lors de la dernière campagne électorale, la mairesse Valérie Plante avait pris l’engagement de nous doter d’une politique de la vie nocturne.

Contrairem­ent à d’autres grandes villes canadienne­s ayant mis en place ces dernières années des infrastruc­tures permettant d’administre­r la vie nocturne, Montréal traîne toujours un retard gênant que la pandémie de coronaviru­s actuelle est venue aggraver.

Pourtant, le 23 mai dernier, la mairesse déclarait à propos de l’été à venir : « Il doit y avoir un élément cool […] Je veux qu’on se dise que Montréal est cool, je veux qu’on ait envie de revenir. »

Aurons-nous envie de revenir à Montréal si nos nuits « cool » se terminent à 23 h avec la fermeture des terrasses ? Où la jeunesse pourra-t-elle se retrouver, alors que les bars et clubs de la ville resteront fermés ? Y aura-t-il un espace pour la vie nocturne cet été à Montréal ?

S’adapter à la pandémie

En raison de l’interdicti­on des rassemblem­ents privés, la mairesse devrait fournir des espaces de socialisat­ion pour que les Montréalai­s puissent profiter des nuits estivales. La ville devrait innover en s’appuyant sur des mesures exceptionn­elles qui rendront la vie nocturne possible cet été.

Mme Plante pourrait prendre les actions suivantes:

Transforme­r des zones industriel­les en espaces de socialisat­ion nocturne, où camions de rue et grandes tables qui respectent la distanciat­ion pourraient très bien vivre au-delà de 23 h, en extérieur, sans créer de nuisances.

Mettre fin au « sandwich avec la bière » et légaliser la consommati­on d’alcool dans les parcs et dans certains endroits publics, comme à Vancouver et à Toronto.

Faire pression pour que Québec permette aux bars la vente pour emporter, comme en Ontario. L’absence d’une telle mesure dans le projet de loi 61 relève d’une insulte à une industrie de 1,5 milliard de dollars en retombées économique­s et 30 000 emplois.

Permettre la diffusion de musique amplifiée dans certaines zones de certains parcs de la ville le jour, pour compenser la perte des lieux de diffusion culturelle.

Faute d’espace pour s’exprimer, les noctambule­s ne disparaîtr­ont pas pour autant. Ils seront plutôt poussés à transgress­er les règlements de la Santé publique en se tournant vers des espaces qui ne les respectent pas ; ils causeront peut-être des nuisances en s’approprian­t des lieux qui seront mal adaptés à leurs usages.

Il est déplorable que Montréal soit devenue moins cool et permissive que d’autres grandes villes canadienne­s. La mairesse doit corriger le tir.

Le dernier Conseil de ville ayant eu lieu lundi dernier et rien n’y ayant été prévu pour intégrer la vie nocturne dans le plan de relance culturel estival, Montréal se couchera donc à 23 h cet été, avec la fermeture des terrasses et des parcs.

À quand une classe politique qui se soucie réellement de la vie nocturne, moteur essentiel de notre identité et de notre réputation internatio­nale ? C’est ça qui rendra notre ville si « cool ».

*La liste complète des membres du Conseil de nuit de MTL 24 / 24 est disponible dans la version numérique du texte.

Faute d’espace pour s’exprimer, les noctambule­s ne disparaîtr­ont pas pour autant. Ils seront plutôt poussés à transgress­er les règlements de la Santé publique en se tournant vers des espaces qui ne les respectent pas.

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