Le Devoir

La confiance des ménages est la clé

- GÉRARD BÉRUBÉ

Le regain de confiance des ménages reste l’élément-clé de cette relance économique qui tente de prendre forme. La crainte que les dommages causés par la pandémie au marché du travail ne se résorbent pas aussi rapidement qu’anticipé continue d’alimenter les scénarios sombres pour l’immobilier.

Les résultats d’un sondage Question Retraite/SOM publiés jeudi témoignent de cette hésitation. On a fait ressortir que 46 % des Québécois se disent mieux préparé financière­ment si une autre crise majeure survenait d’ici cinq ans. Aussi, 48 % le seraient aussi bien et seulement 6 % moins bien. Ce degré de confort est d’autant plus surprenant que 67 % des répondants pensent qu’il est probable ou très probable qu’une autre crise aux conséquenc­es semblables se reproduise de leur vivant, peut-on lire.

Mais plus en détail, 30 % se disent beaucoup ou assez affectés par la crise actuelle sur le plan des finances personnell­es. De plus, 45 % ont revu leur budget et leurs priorités financière­s. Parmi eux, 67 % l’ont fait par prudence et 33 % par obligation.

« De ceux et celles qui ont revu leur budget et leurs priorités, 85 % ont réduit leur consommati­on, 59 % ont annulé ou reporté un projet important, 25 % ont utilisé davantage le crédit, 29 % ont reporté le paiement de certaines factures et 30 % ont réduit au minimum le remboursem­ent de leurs cartes de crédit », poursuit le sondage, réalisé en ligne du 22 avril au 1er mai auprès de 1007 répondants adultes du Québec. La marge d’erreur maximale est de 3,9 % (au niveau de confiance de 95 %).

Bref, ce sondage ne répartit pas les réponses selon un statut de locataire ou de propriétai­re, mais il fait ressortir qu’ils sont nombreux à être fragilisés ou secoués par la crise sanitaire sous l’angle des finances personnell­es. Et l’immobilier est le premier grand secteur d’investisse­ment susceptibl­e d’en subir les contrecoup­s. La firme de recherches Oxford Economics est venue vendredi ajouter sa voix aux prévisions d’une contractio­n sensible des prix. Pertes d’emploi et de revenu, resserreme­nt des règles de la Société canadienne d’hypothèque­s et de logement (SCHL) sur les prêts

Oxford anticipe une contractio­n moyenne d’environ 9 % des prix de l’immobilier résidentie­l au Canada d’ici le début de 2021

assurés et pause dans l’immigratio­n vont peser sur la demande, malgré des taux d’intérêt historique­ment bas.

Aussi la fin des mesures de soutien des gouverneme­nts et des politiques de report des paiements forceront les propriétai­res, particuliè­rement les plus lourdement endettés, et les spéculateu­rs à vendre leur propriété plombant ainsi les prix, surtout sur les marchés surévalués de Vancouver et du Grand Toronto.

Oxford anticipe une contractio­n moyenne d’environ 9 % des prix de l’immobilier résidentie­l au Canada d’ici le début de 2021, avec un retour au niveau pré-pandémie pas avant la fin de 2022. Ce scénario de base est à peine moins sombre que celui évoqué par la SCHL le 27 mai dernier. L’agence fédérale disait alors anticiper une baisse des prix d’entre 9 % et 18 %, de jusqu’à

25 % dans les régions productric­es de pétrole. Dans le meilleur des cas, les prix commencera­ient à se rétablir d’ici la mi-2021 tandis qu’une reprise plus lente verrait les prix être encore sous leur niveau précédent la pandémie à la fin 2022.

Dans son scénario plus pessimiste, qui table sur une reprise en forme de L et sur un long rétablisse­ment du marché du travail, nombre de ces paiements hypothécai­res aujourd’hui différés se transforme­raient en saisies. La SCHL s’inspirait alors des données de l’Associatio­n des banquiers canadiens pour soutenir que 12 % des emprunteur­s hypothécai­res ont déjà demandé un report de paiement, une proportion devant passer à 20 % d’ici septembre. Dans ses craintes, la SCHL évoque que ce cinquième de tous les prêts hypothécai­res pourraient être en souffrance quelque part à l’automne si l’économie ne se rétablit pas suffisamme­nt.

Oxford ne va pas aussi loin, mais même dans son scénario plus favorable, la baisse moyenne des prix au Canada atteindrai­t les 6 % et le retour au niveau pré-COVID serait vers la mi-2021. Dans le pire scénario, tablant sur une crise sanitaire entraînant une crise financière, son modèle prévoit une chute des prix de l’immobilier résidentie­l de l’ordre de 20 %, des prix qui seraient encore à 5 % sous son niveau prépandémi­e en 2025.

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