Le Devoir

Pas de primes pour les employés d’Hydro-Québec en 2020

La COVID-19 privera la société d’État de plusieurs centaines de millions de dollars

- JULIEN ARSENAULT LA PRESSE CANADIENNE

Le montant des primes versées par Hydro-Québec à ses salariés et ses cadres atteindra 27,9 millions pour 2019, mais ceux-ci n’auront pas droit au même traitement l’an prochain puisque la pandémie de COVID-19 privera la société d’État de plusieurs centaines de millions de dollars.

Alors que tout indique qu’il sera difficile de générer un bénéfice net de 2,9 milliards — la somme qualifiée de déclencheu­r financier — cette année, Hydro-Québec a annoncé vendredi qu’il n’y aura pas de rémunérati­on incitative versée au terme de l’année en cours, une somme estimée à 28 millions.

« Il y a aussi un souci de solidarité de dire qu’en 2020, il est normal que l’on suspende la rémunérati­on incitative », a expliqué un porte-parole de la société d’État, Louis-Olivier Batty, au cours d’un entretien téléphoniq­ue. L’incertitud­e entourant la relance de l’économie avait amené la nouvelle présidente-directrice générale, Sophie Brochu, à signaler, lundi, que la crise sanitaire aurait un impact de « quelques centaines de millions » sur les profits. Elle n’avait toutefois pas dévoilé de prévisions pour le dividende qui pourrait être versé.

La suspension des primes s’ajoute au gel des salaires de la haute direction, une mesure qui avait été annoncée au début de la pandémie.

L’an dernier, Hydro-Québec avait dégagé un bénéfice net de 2,92 milliards, ce qui était supérieur au déclencheu­r financier fixé à 2,7 milliards. Les primes de 27,9 millions, qui seront versées le 16 juillet, sont toutefois inférieure­s à celles de 29,3 millions octroyées pour 2018. Sur les quelque 3100 employés admissible­s à une rémunérati­on incitative, la part du lion va aux 1900 cadres, qui vont se partager 21 millions. Le reste sera distribué aux autres profession­nels et parmi le personnel non syndiqué.

Prime pour l’ancien p.d.-g.

Même s’il a quitté ses fonctions pour aller diriger Bombardier, l’ancien président-directeur général Éric Martel aura droit à environ 233 300 $ puisqu’il a travaillé à Hydro-Québec pendant toute l’année. Cela s’ajoutera à son salaire de base qui a été d’environ 580 000 $.

« Le contexte de la pandémie a débuté en mars, alors que la rémunérati­on incitative sera versée pour 2019, une période où l’on a dépassé l’objectif attendu », a dit M. Batty, interrogé sur la possibilit­é de ne pas verser les primes le mois prochain en raison du contexte actuel.

Luc Bernier, professeur à l’Université d’Ottawa et titulaire de la chaire Jarislowsk­y sur la gestion dans le secteur public, a estimé qu’il aurait pu être difficile de ne pas verser les 27,9 millions alors que les objectifs ont été atteints. Au cours d’un entretien téléphoniq­ue, l’expert a estimé que la décision prise par Hydro-Québec visait notamment à lancer le signal que la société d’État n’est pas « au-dessus » des turbulence­s. « Dans le contexte actuel, avec le déficit à Québec [d’environ 15 milliards], c’est une façon de dire qu’eux aussi vont pousser à la roue », a-t-il dit.

L’approche d’Hydro-Québec vient certaineme­nt mettre une certaine pression sur les deux autres grandes sociétés d’État commercial­es — la Société des alcools du Québec (SAQ) et Loto-Québec. Puisque son exercice financier débute le 1er avril, et non au début de l’année civile, comme c’est le cas pour Hydro-Québec, la SAQ a fait savoir qu’il était encore trop tôt pour dire si elle sera en mesure d’atteindre ses cibles et si cela pourrait avoir un impact sur la rémunérati­on incitative. Loto-Québec n’avait pas fourni de précisions sur son approche entourant la rémunérati­on incitative pour 2020 vendredi après-midi.

« Ce n’est pas exagéré de dire que nous sommes confrontés au plus grand défi économique de l’histoire de l’Union européenne », a-t-elle insisté. « L’Europe doit être à la hauteur de l’Histoire […] Trouvons un accord à 27 en juillet ! » a renchéri le président français, Emmanuel Macron, sur Twitter.

750 milliards d’euros

Le sommet virtuel de vendredi a, avant tout, permis à chaque dirigeant de donner son opinion sur la propositio­n de la Commission destinée à soutenir une économie européenne sinistrée et qui s’appuie sur le budget à long terme de l’UE (2021-2027). Le texte actuelleme­nt sur la table prévoit un « instrument de relance » de 750 milliards d’euros, largement inspiré de l’initiative d’Angela Merkel et d’Emmanuel Macron — une alliance de poids dans le débat. Ce fonds complète une propositio­n révisée de budget de l’UE pour 2021-2027, de 1100 milliards d’euros, sur laquelle les États membres doivent aussi s’entendre.

Sur la somme de 750 milliards, 500 milliards seraient redistribu­és dans le cadre du budget européen sous forme de subvention­s aux pays les plus touchés par le coronaviru­s, comme l’Espagne et l’Italie, et 250 milliards d’euros sous forme de prêts.

Mais les 27 doivent encore surmonter d’importante­s divergence­s, qu’il s’agisse du montant du plan, de sa durée, de l’équilibre entre prêts et subvention­s, des critères de répartitio­n des aides, ainsi que de la délicate question d’une « conditionn­alité », c’est-à-dire la contrepart­ie (par exemple des réformes) exigée d’un État en échange de ces fonds.

Les « frugaux » réclament un niveau de dépense beaucoup moins élevé que les 750 milliards annoncés, ce qui devrait contraindr­e Charles Michel à raboter un peu les montants dans sa nouvelle propositio­n. Et ils plaident pour des prêts, que chaque État devra donc rembourser, plutôt que des subvention­s, dont les modalités de remboursem­ent à 27 n’ont pas été définies.

Le chancelier autrichien, Sebastian Kurz, a mis en garde contre une pérennisat­ion de la dette : l’aide apportée doit être « ponctuelle » et « limitée dans le temps », a-t-il averti selon l’agence APA.

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