Le Devoir

Trump repart à la charge contre les Dreamers

- FABIEN DEGLISE

Après la gifle, Donald Trump bombe le torse. Le président américain a indiqué vendredi qu’il était prêt à amorcer de nouvelles démarches afin de faire annuler le programme de protection des Dreamers, ces noncitoyen­s américains arrivés dans la clandestin­ité sur le sol américain durant leur enfance.

La Cour suprême des États-Unis a invalidé jeudi sa première tentative de mettre au rancart le cadre légal installé il y a huit ans par Barack Obama pour régularise­r la situation de plus 700 000 de ces migrants qui ont toujours vécu aux États-Unis. « Nous allons soumettre de nouveaux documents sous peu afin de répondre correcteme­nt à la décision et à la demande de la Cour suprême d’hier », a-t-il écrit sur Twitter.

Le message cherche également à jeter le blâme sur les démocrates, avec qui il prétend avoir voulu négocier le statut de ces enfants de l’immigratio­n sortis de la clandestin­ité par le programme d’Action différée pour les arrivées d’enfants, le programme DACA. « Je voulais m’occuper des bénéficiai­res du DACA mieux que les démocrates­qui-ne-font-rien, mais pendant deux ans, ils ont refusé de négocier. Ils ont abandonné DACA. » En 2018, le président américain a essayé en effet d’utiliser les Dreamers comme monnaie d’échange en proposant à l’opposition démocrate de leur accorder un statut définitif contre le financemen­t de son mur à la frontière avec le Mexique au coût de 25 milliards de dollars.

Jeudi, le plus haut tribunal du pays a repoussé, par 5 voix contre 4, la tentative orchestrée par la Maison-Blanche de mettre fin à la protection des Dreamers. Le jugement garantit leur maintien en sol américain en leur permettant entre autres de conserver leur numéro d’assurance sociale, clef de voûte pour travailler, étudier ou obtenir un permis de conduire dans ce pays.

« Il s’agit effectivem­ent d’une gifle infligée au président, résume en entrevue au Devoir le professeur de droit Michael Krauss, de la George Masson University, en Virginie. Toutefois, huit juges sur neuf ont convenu que le président a le droit de faire cesser le programme DACA. La majorité a tout simplement conclu que le président n’avait pas donné de raisons suffisante­s pour justifier sa décision, ce que la loi fédérale américaine exige. »

La Cour suprême a qualifié de « capricieus­e » et d’« arbitraire » la volonté de mettre fin au programme DACA par la Maison-Blanche. Elle a toutefois reconnu que rien n’empêchait le départemen­t de la Sécurité intérieure, qui mène la charge à la demande du président, de

Les Dreamers bénéficien­t d’un sursis MICHAEL KRAUSS

poursuivre ses démarches. « Les Dreamers bénéficien­t d’un sursis », dit M. Krauss, qui doute par ailleurs des intentions du président américain de repartir en guerre contre ce programme, particuliè­rement dans une année électorale. « À mon avis, c’est partie remise jusqu’après les élections. »

L’utilisatio­n de ces migrants à des fins électorale­s, comme il l’avait fait en 2016, demeure en effet un pari politiquem­ent risqué cette année, alors que le président américain plonge dans les sondages. Sa gestion de la crise de la COVID-19 et son manque d’empathie face aux mouvements sociaux générés par la mort de George Floyd l’expliquent en partie. Pour rappel, Floyd a été tué par des policiers blancs à Minneapoli­s le 25 mai dernier. Un sondage Politico-Morning Consult diffusé cette semaine indique en effet que 68 % des républicai­ns souhaitent que les Dreamers soient protégés contre l’expulsion.

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