Arts visuels
Le printemps 2020 aura exacerbé l’expérience de l’art visuel dans les réseaux sociaux
Après deux mois et demi d’activité sur le « marché » à partir d’une page Facebook — et après 100 oeuvres vendues —, le groupe Les Encans de la quarantaine est arrivé à un tournant. L’actualité le bouscule.
Avec la réouverture des galeries et musées, le public retrouve les lieux de diffusion habituels. C’est une chose. La levée mondiale contre le racisme systématique, réveillée par la mort de George Floyd sous le genou d’un policier, en est une autre.
Pour Sara A. Tremblay, l’instigatrice de l’inusitée vente aux enchères, il n’est pas question de mettre fin à l’exercice. Cependant, c’est le moment de le repenser, de le sortir de sa niche montréalaise. « On veut être plus inclusifs, il faut métamorphoser notre équipe, entièrement blanche. Plus on inclut [des gens de divers horizons], plus on partagera des oeuvres de la diversité », dit-elle.
Conçu pour soutenir les artistes alors que la COVID-19 coupait tous leurs revenus, le projet est une réussite. Basés sur le simple objectif de lier artistes et collectionneurs, Les Encans de la quarantaine ont été pris d’assaut par bien plus que les seuls peintres et autres sculpteurs représentés par des galeries.
« La pandémie, observe Sara A. Tremblay, elle-même artiste, a mis un
spotlight sur beaucoup de faiblesses dans la société, comme les enjeux raciaux. On s’est aperçu de tous ceux qui ne sont pas représentés. Ils sont inexistants, ne sont soutenus par rien, n’ont pas de bourses… C’est un trou dans le marché qu’on a mis en lumière. »
Compétition pour la visibilité
Visibilité des uns contre invisibilité des autres. Ça, c’était hier. Au printemps, un seul espace, le Web, est resté ouvert. Et ça s’est bousculé à la porte. Christelle Proulx, doctorante en histoire de l’art à l’Université de Montréal et férue de culture numérique, n’ose pas encore tirer des conclusions, sinon celle que « la dynamique qui existait a été exacerbée ». « Tout le milieu [de l’art] essaie de trouver une visibilité dans ce foisonnement de l’offre en ligne. »
Dans « Les arts visuels sur et pour Instagram », texte rédigé pour la foire Papier 2019, la chercheuse différenciait deux types d’artistes, selon leurs publications. Il y a ceux qui « participent à un certain romantisme du travail », par l’accès qu’ils donnent à leur atelier. Puis, il y a ceux qui créent en fonction des réseaux sociaux. Ce sont ces oeuvres « pour Instagram », à mi-chemin entre la documentation et l’oeuvre Web, qui se sont multipliées ces derniers mois.
« Il y a eu augmentation, mais aussi prise de conscience de la dépendance [aux réseaux]. On sait qu’il faut apprendre à gérer les plateformes préexistantes. Il n’y aura pas de changement, mais une certaine transformation », avance-t-elle, avec réserve.
Se faire un réseau
C’est confinée que Myriam Simard Parent a terminé son baccalauréat en arts visuels et médiatiques à l’UQAM. La sculptrice a quelques expositions (réelles) à son actif et une présence constante depuis deux ans sur Instagram. Elle publie de la recherche, du travail en cours de réalisation, des oeuvres finies… De tout, finalement.
« Depuis le printemps, je publie plus. Avant, c’était deux fois par mois, maintenant une fois par semaine », dit celle qui touche au bois, au métal et à la céramique. Ses images lui ont apporté beaucoup des ventes. Combien ? « Depuis le confinement, une, deux, trois… huit, neuf, dix… Je ne sais plus trop. Une