Mr Jones : le prix de la relance
Mr Jones (V.O.)
Drame historique d’Agnieszka Holland. Avec James Norton, Peter Sarsgaard, Vanessa Kirby. Pologne–Ukraine–Grande-Bretagne, 2019, 119 minutes.
Forte d’un scénario hyperfouillé d’Andrea Chalupa, Agnieszka Holland signe ici un autre excellent drame historique. Rehaussé par un foisonnement de détails probants, son Mr Jones fonctionne à la manière d’un thriller journalistique haletant (d’autant que le montage a été resserré de 20 minutes depuis la première à la Berlinale). Extrêmement soignée, toute d’éclairages feutrés et de clairs-obscurs symbolisant l’idée prévalente de dissimulation, la facture exsude une élégance surannée séduisante. À l’inverse, la mise en scène privilégie un dynamisme qui confère un souffle distinctement moderne au film (un peu comme dans la très belle et très sous-estimée adaptation par la cinéaste de
Washington Square, d’Henry James). Des opposés qui deviennent complémentaires, l’une et l’autre approches se mettant mutuellement en valeur. Volontairement distinct, le passage en Ukraine consiste en une suite de tableaux glacés, hantés. Bémol : aussi fascinants soient-ils en théorie, les passages montrant George Orwell en pleine conception de sa future allégorie
La ferme des animaux ne convainquent pas. À la fin, leur inclusion se trouve certes justifiée, mais le procédé reste forcé. Dans le rôle-titre, James Norton
(Little Women) est solide, mais ses partenaires Peter Sarsgaard
(Jackie), un Duranty sibyllin à souhait, et surtout Vanessa Kirby
(The Crown), autre collègue confrontée à un dilemme moral, l’éclipsent. Une oeuvre captivante, et tristement pertinente en cette ère de méfiance « encouragée » envers les médias.