À l’air libre
Le plein air est une bulle de liberté qui rend heureux. Mais, pandémie oblige, certaines règles sanitaires s’imposent désormais. Le milieu est à pied d’oeuvre pour rendre la pratique des activités sécuritaire. Tour d’horizon de ce qui se trame dans les sentiers.
Juin 2020, Le Bic, estuaire maritime du Saint-Laurent. L’air est salé, le fleuve, magnétique. Bernard Dugas, guide et propriétaire d’Aventures Archipel, prépare l’ouverture de la saison de kayak. Une année comme une autre ? Pas tout à fait. Ici comme ailleurs, on s’adapte à la nouvelle réalité sanitaire avec une rigueur qui n’ôte rien à l’excitation.
« Dès qu’on ne pourra pas respecter la règle du 2 mètres, nos guides devront porter une visière, explique Bernard Dugas. Nos groupes encadrés par un guide passent de 8 à 6 personnes et ce seront nos clients qui devront ajuster leur propre veste de flottaison. »
Déjà, plusieurs réservations montrent que la demande est bien là. L’offre, elle, s’en trouvera un peu tronquée : plusieurs entrepreneurs en tourisme d’aventure envisagent de diminuer le nombre des sorties quotidiennes guidées pour prendre le temps nécessaire d’expliquer les consignes aux clients. Cela dit, le gestionnaire d’Aventures Archipel est optimiste : « Les entreprises québécoises reconnues ont des plans sanitaires et sont habituées à gérer les risques ». Dans ce contexte, le consommateur aura cette année, encore plus qu’à l’ordinaire, la responsabilité de s’informer auprès des entreprises spécialisées sur les protocoles qui accompagnent toute sortie guidée : plan sanitaire, sécurité, hygiène et nettoyage de l’équipement.
On a des plans !
« Redécouvrons notre Québec ! » a clamé récemment la ministre du Tourisme, Caroline Proulx, joignant le geste à la parole en mettant sur le tapis, d’un même élan, quelque 753 millions de dollars de deniers publics pour soutenir tous les secteurs du tourisme. Bonne nouvelle pour ceux qui s’interrogent sur les mesures concrètes mises en place par l’industrie : depuis des semaines, les principaux acteurs du tourisme d’aventure se penchent sur les modalités d’un retour à la nature qu’on souhaite sécuritaire et durable. À commencer par l’Alliance de l’industrie touristique du Québec et son plan de sécurité sanitaire COVID-19 qui résume les recommandations en matière d’accueil de la clientèle. Un précieux document que vient compléter celui d’Aventure écotourisme Québec (l’AEQ), réalisé en partenariat avec plusieurs organismes et fédérations, et inspiré par des discussions avec les entreprises de plein air.
Ce plan de sécurité sanitaire du tourisme d’aventure et des parcs régionaux renferme l’ensemble des recommandations adressées aux entreprises de plein air et aux guides pour les aider à mettre en place des pratiques sécuritaires et responsables à chaque étape de leurs activités, que celles-ci soient pratiquées de façon autonome ou guidées. Tout y est passé en revue : communication auprès des clients, modes de paiement sans contact, réduction des risques d’infection durant l’activité, transport en navette sur les sites, nettoyage du matériel de location, gestion des espaces communs, prestation des premiers soins, etc. Ce modèle de gestion des risques vient d’ailleurs d’être approuvé par l’Institut national de santé publique du Québec.
Du côté des fédés
Les organismes sectoriels ont activement participé à l’élaboration de ce document, et ceux-ci se mobilisent aussi depuis des semaines pour définir des protocoles adaptés à leurs activités de plein air et ainsi respecter les consignes gouvernementales de santé publique. À commencer par la Société des établissements de plein air du Québec (SEPAQ), qui insiste sur une reprise progressive des activités avec de nombreuses mesures préventives, notamment dans les espaces communs de camping. « Campings de groupe et refuges restent fermés pour éviter les rassemblements et respecter ainsi les mesures sanitaires », dit Simon Boivin, porteparole à la SEPAQ.
Chez Rando Québec, on parle d’obligation de l’employeur envers la sécurité de ses employés, de gestion des infrastructures comme les centres d’accueil ou les tables à piquenique ou, encore, de logistique en situation de crise. On évoque la possibilité d’instaurer un sens unique de la marche sur les sentiers en boucle ou, encore, de fermer l’accès aux belvédères ou aux passages techniques qui comprennent une main courante. Bref : on réfléchit et on se tient prêt à réagir rapidement le cas échéant. Des mesures de déconfinement pour la randonnée pédestre ont été mises sur pied en partenariat avec le Laboratoire d’expertise et de recherche en plein air, nées d’une vaste table de concertation qui en a défini les termes.
Du côté de Vélo Québec, on évoque la nécessité de miser sur une « éthique cycliste ». À cet égard, son code de conduite des cyclistes en temps de pandémie donne plusieurs conseils pratiques pour éviter les situations potentiellement risquées : réduire sa cadence, rouler à deux mètres l’un de l’autre, limiter les groupes à 10 personnes pour les sorties en clubs.
Ce ne sont là que quelques exemples d’initiatives amorcées par le milieu du plein air. La preuve, s’il en était besoin, que cette industrie cultive l’art de se « réinventer », COVID ou pas.
« Les entreprises québécoises reconnues ont des plans sanitaires et sont habituées à gérer les risques »