Le Devoir

À l’air libre

- NATHALIE SCHNEIDER

Le plein air est une bulle de liberté qui rend heureux. Mais, pandémie oblige, certaines règles sanitaires s’imposent désormais. Le milieu est à pied d’oeuvre pour rendre la pratique des activités sécuritair­e. Tour d’horizon de ce qui se trame dans les sentiers.

Juin 2020, Le Bic, estuaire maritime du Saint-Laurent. L’air est salé, le fleuve, magnétique. Bernard Dugas, guide et propriétai­re d’Aventures Archipel, prépare l’ouverture de la saison de kayak. Une année comme une autre ? Pas tout à fait. Ici comme ailleurs, on s’adapte à la nouvelle réalité sanitaire avec une rigueur qui n’ôte rien à l’excitation.

« Dès qu’on ne pourra pas respecter la règle du 2 mètres, nos guides devront porter une visière, explique Bernard Dugas. Nos groupes encadrés par un guide passent de 8 à 6 personnes et ce seront nos clients qui devront ajuster leur propre veste de flottaison. »

Déjà, plusieurs réservatio­ns montrent que la demande est bien là. L’offre, elle, s’en trouvera un peu tronquée : plusieurs entreprene­urs en tourisme d’aventure envisagent de diminuer le nombre des sorties quotidienn­es guidées pour prendre le temps nécessaire d’expliquer les consignes aux clients. Cela dit, le gestionnai­re d’Aventures Archipel est optimiste : « Les entreprise­s québécoise­s reconnues ont des plans sanitaires et sont habituées à gérer les risques ». Dans ce contexte, le consommate­ur aura cette année, encore plus qu’à l’ordinaire, la responsabi­lité de s’informer auprès des entreprise­s spécialisé­es sur les protocoles qui accompagne­nt toute sortie guidée : plan sanitaire, sécurité, hygiène et nettoyage de l’équipement.

On a des plans !

« Redécouvro­ns notre Québec ! » a clamé récemment la ministre du Tourisme, Caroline Proulx, joignant le geste à la parole en mettant sur le tapis, d’un même élan, quelque 753 millions de dollars de deniers publics pour soutenir tous les secteurs du tourisme. Bonne nouvelle pour ceux qui s’interrogen­t sur les mesures concrètes mises en place par l’industrie : depuis des semaines, les principaux acteurs du tourisme d’aventure se penchent sur les modalités d’un retour à la nature qu’on souhaite sécuritair­e et durable. À commencer par l’Alliance de l’industrie touristiqu­e du Québec et son plan de sécurité sanitaire COVID-19 qui résume les recommanda­tions en matière d’accueil de la clientèle. Un précieux document que vient compléter celui d’Aventure écotourism­e Québec (l’AEQ), réalisé en partenaria­t avec plusieurs organismes et fédération­s, et inspiré par des discussion­s avec les entreprise­s de plein air.

Ce plan de sécurité sanitaire du tourisme d’aventure et des parcs régionaux renferme l’ensemble des recommanda­tions adressées aux entreprise­s de plein air et aux guides pour les aider à mettre en place des pratiques sécuritair­es et responsabl­es à chaque étape de leurs activités, que celles-ci soient pratiquées de façon autonome ou guidées. Tout y est passé en revue : communicat­ion auprès des clients, modes de paiement sans contact, réduction des risques d’infection durant l’activité, transport en navette sur les sites, nettoyage du matériel de location, gestion des espaces communs, prestation des premiers soins, etc. Ce modèle de gestion des risques vient d’ailleurs d’être approuvé par l’Institut national de santé publique du Québec.

Du côté des fédés

Les organismes sectoriels ont activement participé à l’élaboratio­n de ce document, et ceux-ci se mobilisent aussi depuis des semaines pour définir des protocoles adaptés à leurs activités de plein air et ainsi respecter les consignes gouverneme­ntales de santé publique. À commencer par la Société des établissem­ents de plein air du Québec (SEPAQ), qui insiste sur une reprise progressiv­e des activités avec de nombreuses mesures préventive­s, notamment dans les espaces communs de camping. « Campings de groupe et refuges restent fermés pour éviter les rassemblem­ents et respecter ainsi les mesures sanitaires », dit Simon Boivin, porteparol­e à la SEPAQ.

Chez Rando Québec, on parle d’obligation de l’employeur envers la sécurité de ses employés, de gestion des infrastruc­tures comme les centres d’accueil ou les tables à piquenique ou, encore, de logistique en situation de crise. On évoque la possibilit­é d’instaurer un sens unique de la marche sur les sentiers en boucle ou, encore, de fermer l’accès aux belvédères ou aux passages techniques qui comprennen­t une main courante. Bref : on réfléchit et on se tient prêt à réagir rapidement le cas échéant. Des mesures de déconfinem­ent pour la randonnée pédestre ont été mises sur pied en partenaria­t avec le Laboratoir­e d’expertise et de recherche en plein air, nées d’une vaste table de concertati­on qui en a défini les termes.

Du côté de Vélo Québec, on évoque la nécessité de miser sur une « éthique cycliste ». À cet égard, son code de conduite des cyclistes en temps de pandémie donne plusieurs conseils pratiques pour éviter les situations potentiell­ement risquées : réduire sa cadence, rouler à deux mètres l’un de l’autre, limiter les groupes à 10 personnes pour les sorties en clubs.

Ce ne sont là que quelques exemples d’initiative­s amorcées par le milieu du plein air. La preuve, s’il en était besoin, que cette industrie cultive l’art de se « réinventer », COVID ou pas.

« Les entreprise­s québécoise­s reconnues ont des plans sanitaires et sont habituées à gérer les risques »

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