Le Devoir

Un tuteur sur l’histoire crochie

- Philippe Papineau

Laissez-nous raconter l’histoire crochie

En plein blitz de célébratio­ns du Québec et du Canada, et quelques jours après la Journée nationale des peuples autochtone­s, un important nouveau balado qui se penche sur les Première Nations vient de voir le jour. Et il y a beaucoup de force dans le titre de cette nouvelle production : Laisseznou­s raconter l’histoire crochie.

« Laissez-nous », comme un appel, comme une main levée et une main tendue. « L’histoire crochie », comme image forte des empreintes tenaces de la vision trop souvent colonialis­te que l’on a des Autochtone­s du pays. Pour redresser cette histoire tordue, la production de 11 épisodes de 25 minutes se révèle un puissant tuteur pour nos perception­s erronées, ou teintées d’un passé rarement respectueu­x. Chaque segment s’arrime dans un mot-clé, comme « sauvage, « école », « réserve », « bannique » et « découverte ». Il est d’ailleurs assez frappant d’entendre de multiples témoignage­s illustrer qu’il n’y a pas eu une « découverte » du territoire, qui était bien évidemment déjà habité.

À l’animation, on retrouve la poète innue Marie-Andrée Gill, qui nous guide à travers les quelque 70 témoignage­s recueillis par les réalisateu­rs Brad Gros-Louis et Karine Lanoie Brien. L’écoute est agréable, mais c’est le fond qui prime ici. On sent par moments la colère et la tristesse — par ailleurs plus que légitimes — des peuples autochtone­s, mais leurs récits sont empreints de beaucoup d’esprit, d’ouverture, d’humour même, qui facilite la prise de conscience et nous incite à nous améliorer, individuel­lement et, espérons-le, collective­ment.

La vie secrète de l’art

La découverte de l’art peut aussi être facilitée par un tuteur. Le balado La vie secrète de l’art joue un peu ce rôle pour les jeunes de 8 à 9 ans en proposant cinq courtes fictions audio basées sur des oeuvres variées du Musée des beaux-arts de Montréal. C’est Simon Boulerice qui a inventé les histoires, qui sont lues par Evelyne de la Chenelière et Sasha Samar. Les capsules ne dépassent pas les quatre minutes et sont abondammen­t enrobées de musique et de bruits d’ambiance. La production, qui vient de gagner un prix Numix, s’apprécie encore plus lorsqu’écoutée en regardant les oeuvres dont il est question.

Bamberger Symphonike­r, Lukasz Borowicz. CPO 555 250-2 Pur bonheur de la découverte. Certes,

Narcisse et Écho (1911) avait été enregistré en première mondiale pour Chandos à La Haye par Guennadi Rojdestven­ski, mais cette « piqûre de rappel » de Lukasz Borowicz est fondamenta­le et salutaire. Quel émerveille­ment de retrouver cette partition que le CD de Rojdestven­ski aurait dû faire entrer au répertoire ! Narcisse et

Écho de Tcherepnin­e (1873-1945), c’est la rencontre des opéras de RimskiKors­akov, de Daphnis et Chloé de Ravel (1909-1912), du Poème de l’extase de Scriabine (1905-1908, écoutez la plage 4), de L’oiseau de feu de Stravinski (1909-1910) et sans doute de maintes autres choses encore. Cette autre création pour les Ballets russes, composée par un exilé, pose beaucoup de questions sur la notion d’emprunt en musique. Les choeurs qui planent font sans cesse penser à Daphnis et Chloé, mais la création ravélienne surviendra un an plus tard. Tout se passe donc comme si, à une époque, un type de musique était dans l’air du temps. La

princesse est une ouverture de 1896 superbemen­t rimskienne.

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