Les dirigeants d’entreprises ne débordent pas d’optimisme
Un lent retour à la normale présage une difficile récupération des emplois, selon eux
Les entreprises entrevoient un lent retour à la normale, laissant présager une récupération des emplois plutôt difficile, craint l’OCDE.
Lundi, moyennes et grandes entreprises et restaurateurs appréhendaient une longue récupération postpandémie. Les PME se faisaient écho de ce scénario de lente reprise. Dans le plus récent coup de sonde de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) à l’échelle canadienne, 53 % des propriétaires de PME évaluaient qu’il leur faudra plus de six mois pour retrouver leurs niveaux de rentabilité normaux et 30 % soulignaient un horizon de plus d’un an.
« Ils sont aussi 5 % à craindre de ne plus jamais réaliser les mêmes bénéfices qu’avant la crise de la COVID-19, ajoute la FCEI. « Au Québec, pour près de la moitié des propriétaires d’entreprise, il est difficile d’envisager de retrouver sa rentabilité avant six mois, et 28 % sont d’avis que cela leur prendra plus d’un an. »
La très grande majorité de ces entreprises évolue en mode déconfinement progressif. La FCEI indique qu’à l’échelle canadienne, 57 % des PME sont complètement ouvertes, 34 % ont retrouvé leurs effectifs normaux et seulement 24 % réalisent à nouveau des ventes similaires pour cette période de l’année. « Au Québec, 7 PME sur 10 sont complètement ouvertes, 40 % ont retrouvé le même effectif et 30 % ont des ventes habituelles. »
Dans la restauration, un segment parmi les premiers qui ont été touchés par les mesures de restriction accompagnant la pandémie, la majorité des entreprises canadiennes de services alimentaires continuent de fonctionner à perte et pourraient mettre au moins un an à redevenir rentables, disait Restaurants Canada lundi.
« Plus de la moitié des répondants qui sont ouverts pour la cueillette et la livraison seulement ou qui ont rouvert leurs salles à manger selon les nouvelles restrictions déclarent continuer de fonctionner à perte. »
À la question portant sur le nombre de mois qu’ils estiment nécessaires avant que leur entreprise ne redevienne rentable, 13 % avançaient 6 mois ou moins, 31 % évaluaient de 7 mois à un an, 36 %, de 1 an à 18 mois, et 20 % évoquaient un horizon plus lointain.
« Pour le troisième mois consécutif, plus de 90 % des répondants ont déclaré une baisse de leur chiffre d’affaires par rapport à la même période l’année dernière », ajoute Restaurants Canada, qui précise que 75 % des restaurateurs ayant répondu au sondage ont déclaré toucher la Subvention salariale d’urgence du Canada.
Dans son édition d’été 2020 de l’Enquête sur les perspectives des entreprises, la Banque du Canada soulignait que près de la moitié des répondants font état d’une nette diminution des ventes ces 12 derniers mois, et plus de la moitié prévoient que leurs ventes totales des 12 prochains mois seront inférieures à celles des 12 derniers. Aussi, la moitié des exportateurs anticipe une baisse de leurs ventes à l’étranger dans les 12 prochains mois.
Ce faisant, plus de la moitié des entreprises qui ont récemment fait des mises à pied parlent de rouvrir certains des postes concernés dans les 12 prochains mois. Mais bon nombre n’envisagent pas d’augmenter leurs effectifs, souvent du fait qu’elles redoutent de faibles ventes, ajoutait l’enquête de la banque centrale.
Difficile récupération des emplois
Cette difficile récupération des emplois fauchés par la pandémie est illustrée dans les dernières projections de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), publiées mardi.
Pour le Canada, l’OCDE calcule que le taux de chômage devrait atteindre 11 % au deuxième trimestre 2020, largement au-dessus du précédent pic de 8,7 % du troisième trimestre 2009. « Bien qu’une diminution rapide soit attendue avec la fin des mesures de confinement, les projections demeurent de 7,7 % d’ici fin 2021 dans le scénario à une seule vague, de 8,4 % dans le scénario à deux vagues pandémiques en 2020. » Le taux de chômage se chiffrait à 5,6 % en février.
L’OCDE rappelle que la COVID-19 a frappé durement le marché du travail. Les heures travaillées au Canada ont diminué de 22,7 % au cours des trois premiers mois de la crise sanitaire, contre une baisse de 2 % au cours de la même période lors de la crise financière mondiale. « Parmi les 10 pays disposant de données comparables, seuls l’Italie et Israël ont une baisse supérieure. »
Inégalités
Et l’impact a été inégal. Au Canada, 47 % des personnes du quartile inférieur de la distribution des revenus ont cessé de travailler, contre seulement 14 % des personnes du quartile supérieur. « Seuls 15 % des personnes du quartile inférieur peuvent travailler en toute sécurité depuis leur domicile, contre 50 % dans le quartile supérieur », précise l’Organisation.