Les citoyens de Pointe-Parent attendent toujours
Cette fois, c’est la COVID-19 qui retarde la délocalisation du village
Après des années d’attente, le dossier de la délocalisation de Pointe-Parent, sur la Côte-Nord, était sur le point d’aboutir en mars, quand la COVID-19 est entrée dans nos vies. Cinq mois plus tard, les gens sur place craignent d’être oubliés une fois de plus.
« Ça n’a aucun bon sens, ce qui se passe au Secrétariat des affaires autochtones avec le dossier de PointeParent », dénonce la députée de Duplessis, Lorraine Richard, qui représente ce coin de pays. « J’en ai même parlé au premier ministre personnellement pour le lui dire. »
Pointe-Parent est à un millier de kilomètres de l’Assemblée nationale. Les résidents de ce secteur isolé de la ville de Natashquan attendent, depuis des années, d’être relogés parce que leur territoire est enclavé dans la réserve innue voisine.
En 2018, un évaluateur mandaté par le gouvernement du Québec s’est rendu sur place pour estimer la valeur de leurs maisons et éventuellement les racheter. Mais depuis, le dossier n’est toujours pas réglé, les maisons tombent en décrépitude, subissent du vandalisme et la vie des propriétaires concernés demeure entre parenthèses.
En février, lors d’une rencontre à Sept-Îles, la secrétaire générale du Secrétariat aux affaires autochtones, Marie-Josée Thomas, s’était engagée à se rendre sur place pour soumettre aux résidents un plan. La rencontre devait avoir lieu en mars, mais le coronavirus en a décidé autrement.
Alors que la vie reprend son cours, le petit groupe de résidents de Pointe-Parent veut savoir quand aura finalement lieu la rencontre. Or le gouvernement dit ne pas être en mesure de l’indiquer.
Dans un échange de courriels avec Le Devoir, le cabinet de la ministre a mentionné qu’il n’y avait pas de date fixée pour la rencontre.
« Le gouvernement doit évaluer certaines options auprès de tierces parties et est en attente de pouvoir discuter avec elles », a répondu l’attachée de presse de la ministre, Lauréanne Fontaine, qui souligne toutefois que des rencontres devraient avoir lieu dans un avenir « très rapproché ».
L’impact de la COVID-19
Elle prévient toutefois que, dans cet enjeu comme dans tous les autres, le gouvernement Legault « doit refaire une analyse en tenant compte de la réalité économique post-COVID du Québec ».
Sur place, les propriétaires des maisons trouvent que la COVID-19 a le dos large. « Il ne se passe rien du tout dans le dossier. C’est complètement mort », déplore Nicole Lessard. Pendant le confinement, la maison qu’elle n’habite plus a une nouvelle fois été la cible de vandales. « Ils ont tenté d’y mettre le feu, mais ça n’a pas flambé complètement. »
Nancy Gauthier, elle aussi propriétaire, dit en avoir assez d’être « prise avec une maison avec laquelle elle ne peut rien faire ». « Tout le monde se cache derrière la COVID-19 pour ne pas bouger », dénonce-t-elle.
Depuis Québec où elle vit maintenant, Bernadette Landry, 86 ans, n’en revient pas qu’on parle encore de ce dossier. Elle dit que « ça fait 20 ans » que le déménagement est discuté. Elle et son mari ont élevé leurs enfants à Pointe-Parent, où ils ont aussi longtemps été propriétaires de l’unique dépanneur. « Je vieillis et je voudrais bien que le projet aboutisse avant que je parte. »
Un autre facteur alimente l’inquiétude du petit groupe : le maire André Barrette, qui connaît bien le dossier, s’apprête à quitter son poste pour des raisons personnelles. Joint mercredi, il s’est dit lui aussi très déçu de l’état des choses. « Je ne suis pas content. C’est certain que j’aurais aimé que ça se règle avant que je parte, être celui qui met le clou dans le cercueil. Ils s’en foutent pas mal, de nous, à Québec, comme c’est là. »
À compter du 30 juillet, M. Barrette sera remplacé par le conseiller municipal Jacques Tanguay, qui assurera l’intérim avant les prochaines élections, pour lesquelles aucune date n'a encore été fixée.
Il ne se passe rien du tout dans le dossier. C’est complètement » mort.
NICOLE LESSARD