Le Devoir

Les résultats de tests tardent à être livrés

- MARIE-EVE COUSINEAU

« C’est une blague ! » Après dix jours d’attente, Karine Boissonnea­ult et son fils ont finalement reçu le résultat de leur test de dépistage à la COVID-19. Son fils est positif. Pas elle. « Mon fils a reçu son diagnostic et, le même jour, la lettre pour la fin de son confinemen­t ! dit-elle. C’est n’importe quoi. »

Karine Boissonnea­ult et sa famille habitent à Saint-Augustin-de-Desmaures dans la région de Québec. Elle craint de contribuer, sans le vouloir, à la propagatio­n de la COVID-19. « Dès qu’on a eu le diagnostic, mon conjoint et mon autre garçon se sont confinés », dit-elle. Ils avaient toutefois travaillé les dix jours précédents, puisqu’ils n’avaient pas été en contact étroit avec un cas positif, contrairem­ent à eux.

« Auraient-ils pu être asymptomat­iques ? se demande Karine Boissonnea­ult. On va espérer qu’ils seront négatifs. » Ils ont passé leur test de dépistage vendredi.

« Un niveau historique »

Dans la Capitale-Nationale, la deuxième vague prend de l’ampleur. Québec a enregistré 265 nouveaux cas lundi, la plus forte hausse depuis le début de la pandémie. Au CHU-de-Québec–Université Laval, le laboratoir­e roule à plein régime 24 heures sur 24 heures, sept jours sur sept. « On fait en moyenne 3000 analyses par jour, dit sa porte-parole, Geneviève Dupuis. C’est un niveau historique. »

Pour répondre à la demande, le CHU-de-Québec–Université Laval a conclu une entente avec des laboratoir­es privés. L’un d’eux a connu des problèmes, et quelque 2000 tests ont été traités à retardemen­t, indique Geneviève Dupuis. « Nous avons reçu les derniers résultats des échantillo­ns du 20 au 24 septembre le 2 octobre en soirée », précise-t-elle. Ceux de Karine Boissonnea­ult et de son fils pourraient bien faire partie de ce lot.

Quand les résultats arrivent cinq jours plus tard, le mal est fait. C’est [une enquête de cas] beaucoup moins utile que si ça avait été fait 24 heures après le test.

MARIE-FRANCE RAYNAULT »

Selon l’Alliance du personnel profession­nel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), le CHU-de-Québec envoie actuelleme­nt 700 tests par jour à deux laboratoir­es privés. « L’un d’eux a manqué de réactifs », explique Steve St-Onge, représenta­nt national de l’APTS pour la Capitale-Nationale. Jusqu’à tout récemment, le CIUSSS du Saguenay–Lac-Saint-Jean prêtait aussi main-forte au laboratoir­e du CHU. « On envoyait entre 300 et 400 tests par jour là-bas », précise-t-il.

Toujours en attente

Le CHU-de-Québec estime que 94 % des analyses sont réalisées dans un délai de 48 heures et la quasi-totalité, en moins de 72 heures. Il reste que des citoyens attendent encore un appel du CIUSSS de la Capitale-Nationale pour connaître leur résultat. C’est le cas d’Isabel Dugas-Iregui, qui travaille dans le milieu de la restaurati­on à Québec. Elle a passé un test de dépistage le 25 septembre. « J’ai appelé trois fois à la ligne téléphoniq­ue et j’ai écrit une fois à l’adresse courriel », dit-elle.

Geneviève Dupuis souligne que le CHU-de-Québec travaille de concert avec le CIUSSS de la Capitale-Nationale pour trouver une façon de transmettr­e plus efficaceme­nt les résultats des analyses. Divers systèmes, comme le télécopieu­r, sont utilisés pour acheminer les résultats.

« Au cours des prochaines semaines, on devrait recevoir un nouvel appareil [d’analyse], ajoute Geneviève Dupuis. Mais il faudra l’installer, valider les tests et procéder au calibrage. Si tout va bien, la machine pourrait être prête le 9 ou le 15 novembre. Mais ça dépend des réactifs. » Car ces produits chimiques, nécessaire­s pour effectuer les analyses, demeurent un enjeu, selon le CHU-de-Québec et l’APTS.

Aucune rupture de stock n’est survenue depuis le début de la pandémie, « seulement des livraisons parfois réduites par rapport à la commande », écrit le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), dans un courriel. Québec explique que les fournisseu­rs acheminent des réactifs aux laboratoir­es, en fonction du volume de production de chacun, selon la formule du juste-à-temps (just in time, en anglais). « Ce fonctionne­ment vise à éviter que des laboratoir­es ne “stockent” des réactifs, créant ainsi des pénuries artificiel­les », écrit le MSSS.

Dans la CapitaleNa­tionale, la deuxième vague prend de l’ampleur. Québec a enregistré 265 nouveaux cas lundi, la plus forte hausse depuis le début de la pandémie.

Il n’y a pas que les laboratoir­es qui sont débordés dans la région de Québec. La Direction régionale de santé publique aussi.

Marie-France Thibault dit avoir reçu un premier appel de la Santé publique, pour l’informer des mesures de confinemen­t, huit jours après le résultat positif de son fils. Ce dernier fréquente l’École des Pionniers, un établissem­ent de niveau secondaire à Saint-Augustin-de-Desmaures, où des cas de COVID-19 sont survenus. Sa classe a été placée en isolement.

Le reste de la famille s’est confiné dès que la maladie a été diagnostiq­uée. « Lorsque la Santé publique nous a appelés aujourd’hui [lundi], elle nous a dit qu’étant donné que notre fils n’a pas porté de masque pendant l’isolement à la maison, on devra demeurer confinés jusqu’au 14 octobre », dit Marie-France Thibault.

La mère de deux enfants aurait bien aimé avoir été informée des mesures plus tôt. Son fils les aurait mises en applicatio­n. Au bout du compte, elle manquera près de trois semaines de travail. « Mon emploi ne me permet pas de travailler de la maison », dit-elle.

La Dre Marie-France Raynault croit que les délais dans la transmissi­on des résultats sont un « problème pour la fratrie », mais aussi pour les personnes en attente de résultat. « Quand les résultats arrivent cinq jours plus tard, le mal est fait, dit la professeur­e à l’École de santé publique de l’Université de Montréal. C’est [une enquête de cas] beaucoup moins utile que si ça avait été fait 24 heures après le test. »

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