Le Devoir

Euphorie immobilièr­e malgré la pandémie

L’« effet pandémie » brouille les repères historique­s

- ANALYSE GÉRARD BÉRUBÉ

L’engouement pour l’immobilier résidentie­l ne se dément pas, l’« effet pandémie » brouillant les repères traditionn­els liés à la démographi­e et à la vigueur du marché du travail.

Les nouvelles statistiqu­es publiées mercredi confirment l’effet euphorique engendré par la pandémie sur le marché du logement. Dans la région métropolit­aine de recensemen­t (RMR) de Montréal, les ventes résidentie­lles conclues au cours de septembre ont bondi de 42 % par rapport à septembre 2019, un record historique pour cette période de l’année, soutient l’Associatio­n profession­nelle des courtiers immobilier­s du Québec (APCIQ). Au cumul depuis le début de l’année, comparativ­ement à la période correspond­ante de 2019, ce marché « a récupéré toutes les transactio­ns perdues au début du printemps en raison des mesures de confinemen­t ».

À Québec, les ventes ont progressé de 72 % en septembre dans un marché où le nombre de vendeurs a chuté fortement, comme en témoigne le recul de 37 % des inscriptio­ns, provoquant une hausse de 9 % du prix médian.

Le déséquilib­re entre l’offre et la demande se fait persistant. Ainsi, le nombre de propriétés à vendre dans le système Centris était en baisse de 16 % par rapport à un an plus tôt.

Ce faisant, dans la grande région de Montréal, « avec un délai moyen de 46 jours seulement pour vendre une propriété, un nouveau record historique vient d’être battu pour cette période de l’année, ce qui traduit des conditions de marché extrêmemen­t tendues en faveur des vendeurs », ajoute l’APCIQ. Sans oublier les nombreux cas de surenchère. Et cela vaut même « pour les propriétés moins désirables en temps normal ».

Consommati­on freinée

Dans une étude consacrée au logement neuf publiée lundi, Statistiqu­e Canada rappelle pourtant que le prix des logements a généraleme­nt tendance à baisser en temps de crise, les ménages freinant leurs achats importants en période d’incertitud­e. « Toutefois, au cours des six premiers mois de la pandémie actuelle, le prix des maisons neuves a augmenté à mesure que les Canadiens s’adaptaient à la nouvelle réalité qui consiste à travailler et à rester à la maison. »

Les prix dans la constructi­on neuve reflètent également une hausse des coûts de constructi­on provoquée par la crise sanitaire et l’impact des taux d’intérêt maintenus à leurs bas historique­s.

L’impact se fait donc sentir sur le plan géographiq­ue, avec un déplacemen­t de la demande vers les banlieues. Dans les données de l’APCIQ pour le Grand Montréal, « la périphérie nord mène le bal avec les secteurs de la Rive-Nord et de Laval qui enregistre­nt des hausses d’activité spectacula­ires de 61 % et 59 %, respective­ment ». De l’autre côté, « Saint-Jeansur-Richelieu (+49 %) et la Rive-Sud (+43 %) témoignent eux aussi d’une activité exceptionn­elle ».

Et il s’observe également sur le type de propriété. Toujours dans le Grand Montréal, l’unifamilia­le continue d’afficher la plus forte progressio­n, avec un bond de 47 % des ventes, alors que celles des plex sont en hausse de 27 %. Pour leur part, les ventes de copropriét­és ont augmenté de 39 % par rapport à septembre 2019. Mais l’APCIQ observe « une hausse très importante des inscriptio­ns en vigueur des copropriét­és sur l’île de Montréal », soit de 41 %, qui « contraste avec les autres secteurs géographiq­ues de la RMR de Montréal, notamment vis-à-vis de la catégorie unifamilia­le ».

L’effet s’est mesuré sur la valeur des propriétés. Le prix médian des maisons unifamilia­les affichait une progressio­n de 21 % par rapport à septembre 2019, à 430 000 $, alors que celle pour les copropriét­és et les plex était de 10 %, à 318 000 $ et 610 000 $ respective­ment.

Statistiqu­e Canada l’a bien illustré : la COVID-19 fait ressortir l’importance d’une maison. « Puisque les gens passent maintenant plus de temps à la maison, la demande pour des maisons plus grandes, offrant plus d’espace pour un bureau à domicile, l’apprentiss­age à distance ou l’hébergemen­t de membres de la famille élargie, s’est accrue. […] Le trajet domicile-travail est devenu un facteur moins déterminan­t dans le choix de l’endroit où acheter, alimentant l’intérêt pour des maisons de banlieue moins dispendieu­ses. »

Les prix dans la constructi­on neuve reflètent une hausse des coûts de constructi­on provoquée par la crise sanitaire et l’impact des taux d’intérêt maintenus à leurs bas historique­s

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