Le Devoir

Des examens de fin de session à l’hôtel

À l’instar de Polytechni­que Montréal, Québec envisage de louer des salles de réunion pour loger des classes de cégep et d’université

- MARCO FORTIER

La ministre Danielle McCann envisage d’utiliser des espaces vacants dans les salles de réunion d’hôtel ou dans les centres de congrès, délaissés en raison de la pandémie, pour loger des classes de cégep ou d’université. Cette solution permettrai­t d’offrir davantage de cours ou d’examens en présence pour motiver les étudiants découragés par l’enseigneme­nt virtuel.

« C’est certaineme­nt quelque chose qu’on va explorer. Spécialeme­nt en zone orange, c’est quelque chose qu’on regarderai­t rapidement », a affirmé la ministre de l’Enseigneme­nt supérieur dans une entrevue au Devoir cette semaine.

« Les hôtels n’ont pas beaucoup de clients à ce moment-ci. Ça serait une façon de les soutenir et de soutenir nos étudiants », a-t-elle précisé dans une de ses premières entrevues de fond depuis sa nomination à l’Enseigneme­nt supérieur, en juin dernier.

Polytechni­que Montréal est une des rares université­s québécoise­s à recourir à cette solution pour offrir le plus d’examens possible en présence. L’établissem­ent a loué des espaces au Palais des congrès pour tenir les examens de fin de session « de manière sécuritair­e et conforme aux directives de la Santé publique ». Ces locaux pourront accueillir 1000 personnes avec une distanciat­ion de deux mètres, a confirmé Polytechni­que (voir encadré).

Ce type de mesure est plus facile à mettre en place en zone orange, rappelle la ministre McCann, mais Polytechni­que Montréal démontre qu’il est possible d’innover même en zone rouge — où se trouvent 80 % des étudiants de cégep ou d’université.

Logiciel de surveillan­ce

Dans l’hypothèse improbable où les examens finaux devraient se tenir à distance à cause de la situation sanitaire, Polytechni­que Montréal surveiller­ait les étudiants à l’aide d’un logiciel suivant à la trace les mouvements des personnes et de leur écran. Les examens des programmes de certificat et ceux des étudiants étrangers retenus dans leur pays d’origine feront aussi l’objet d’une télésurvei­llance.

La ministre McCann se réjouit que Polytechni­que compte recourir « de façon très circonscri­te » à la télésurvei­llance. Et que l’utilisatio­n de logiciels de surveillan­ce ne soit pas plus répandue dans les cégeps et les université­s québécoise­s. « On va souhaiter que ça ne prenne pas plus d’ampleur et qu’on arrive à d’autres modalités d’évaluation », dit-elle.

Les données recueillie­s par le logiciel de télésurvei­llance seront détruites après 30 jours et seront stockées sur un serveur situé au Canada, a précisé Polytechni­que. « Dans un cas de suspicion de tricherie, le stockage des données pourrait aller jusqu’à cinq mois supplément­aires, le temps que le comité de plagiat de Polytechni­que Montréal s’y penche et prenne la décision finale », a précisé Chantal Cantin, directrice des communicat­ions de l’établissem­ent.

Polytechni­que a aussi convenu de n’utiliser qu’une caméra de surveillan­ce plutôt que deux, comme annoncé au début de la session d’automne.

Danielle McCann dit être sensible au point de vue des associatio­ns étudiantes, qui trouvent ces logiciels intrusifs. La ministre indique que la tricherie dans les examens à distance « n’apparaît pas comme une préoccupat­ion majeure » de la Fédération des cégeps et du Bureau de coopératio­n interunive­rsitaire — malgré un reportage du Devoir ayant révélé le recours important à la triche dans les cégeps lors de la dernière session d’hiver, qui a été terminée à distance à cause de la pandémie.

Cégeps anglais

La ministre McCann a aussi confirmé que l’équilibre des places entre les cégeps anglophone­s et francophon­es du Grand Montréal fait partie de la vaste révision des « devis scolaires » des établissem­ents, lancée par son ministère.

« Ce qu’on regarde, c’est effectivem­ent de mettre un genre de limite au niveau des cégeps anglophone­s. […] On veut vraiment que la trajectoir­e [des étudiants francophon­es] se passe davantage au niveau des cégeps francophon­es », dit-elle.

Le ministre Simon Jolin-Barrette réfléchit aussi à la question dans le cadre de sa réforme de la Charte de la langue française, mais il est trop tôt pour dire quelle forme prendra l’action du gouverneme­nt pour limiter la croissance des cégeps anglais, selon la ministre. Une des solutions envisagées est de geler le nombre de places dans les cégeps anglais, indique-t-on à Québec.

Danielle McCann ne s’inquiète pas pour l’avenir des cégeps francophon­es du Grand Montréal, qui se préparent à une véritable explosion des inscriptio­ns dans les 10 prochaines années. Le boom démographi­que qui fait déborder les écoles primaires et secondaire­s ajoutera entre 20 000 et 30 000 étudiants francophon­es au secteur collégial à Montréal et dans les banlieues, souligne la ministre.

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JOHN MACDOUGALL AGENCE FRANCE-PRESSE Un reportage du Devoir a révélé le recours important à la triche dans les cégeps lors de la dernière session d’hiver, qui a terminée à distance à cause de la pandémie.

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