Legault exige un effort supplémentaire
Les Québécois devront prendre leur mal en patience : le gouvernement a prolongé le « défi 28 jours » de quatre semaines. Les mesures sanitaires visant à freiner la propagation de la COVID-19 demeureront en vigueur jusqu’au 23 novembre en zone rouge, a tranché le premier ministre, François Legault, se donnant pour règle de « dire la vérité aux Québécois » tout en leur donnant « un peu d’espoir ».
« On a encore un gros défi devant nous. On ne peut pas continuer à avoir 800 à 1000 [nouveaux] cas par jour. Ça amène une dizaine de décès de plus par jour [et] je ne pense pas qu’il y a [quelqu’un] qui souhaite ça », a-t-il déclaré lors d’un point de presse lundi soir.
Le chef du gouvernement a évoqué la possibilité de « relâcher » un certain nombre de mesures restrictives dans deux semaines, mais seulement si une « baisse soutenue » des cas, des éclosions et des hospitalisations est constatée. Il n’a pas été en mesure de chiffrer l’objectif à atteindre, puisque la situation fluctue trop d’une région à l’autre. « À Québec ou dans Chaudière-Appalaches, il y a plus de travail à faire qu’à Montréal » a-t-il donné en exemple.
La situation sanitaire commande, selon lui, que la vie sociale se résume à « aller au travail et aller à l’école ». « Même ces deux activités-là, il faut être plus prudents », a ajouté M. Legault insistant sur l’augmentation des éclosions en milieu de travail. Québec entreprendra un « blitz » de vérifications, se donnant le droit de fermer les entreprises qui ne corrigeraient pas leurs lacunes.
Salles de restaurants, bars et casinos devront ainsi rester fermés jusqu’à nouvel ordre. Idem pour les salles de spectacles, les cinémas, les théâtres, les musées ainsi que les centres sportifs. Les rassemblements privés, à l’intérieur comme à l’extérieur, sont aussi toujours interdits.
Si les mesures d’aide aux entreprises touchées seront aussi prolongées, cette annonce reste un coup dur.
« On s’y attendait. Dès le début, on ne croyait pas pouvoir rouvrir le 28 octobre », laisse tomber Pierre Thibault, président et fondateur de la Nouvelle association des bars du Québec. L’association travaille présentement sur des solutions à proposer au gouvernement. «On a des idées à partager. On voudrait au moins s’entendre sur une date de réouverture pour se préparer en conséquence, même si c’est après le 23 novembre. »
De son côté, David Laferrière, président de l’association de diffuseurs de spectacles RIDEAU se dit « déçu » du maintien des mesures restrictives. « C’est quatre nouvelles semaines de représentations à annuler, à rembourser et à reporter à une date qu’on ignore encore », déplore-t-il, assurant que les protocoles sanitaires mis en place cet été rendent les lieux culturels « sécuritaires ». « On met notre énergie à bâtir une programmation d’hiver, on garde espoir de reprendre en janvier. »
Horaire alterné
Pour limiter encore plus les contacts en zone rouge, les élèves de troisième secondaire seront attendus en classe une journée sur deux à compter de lundi prochain. Le gouvernement étend la formule d’enseignement en alternance « école-maison » — déjà suivie par les élèves de quatrième et cinquième secondaire depuis le 8 octobre — à la demande de la Santé publique, a précisé M. Legault lundi.
Depuis le début de la pandémie, le gouvernement a recensé quelque 4340 enfants de 0 à 9 ans positifs à la COVID-19, comparativement à 9285 personnes de 10-19 ans. « Il y a plus de nouveaux cas chez les élèves du secondaire un peu plus âgés. En plus, selon la science, les enfants un peu plus vieux sont plus transmetteurs du virus. »
La nouvelle consigne n’est pas de nature à rassurer les enseignants, dont plusieurs sont gagnés par l’épuisement, estiment la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ) et la Fédération autonome de l’enseignement (FAE). « C’est vraiment très préoccupant chez les profs qui ont une double tâche, comme les profs de 4e et 5e secondaire qui enseignent à la fois en présence et à distance. L’annonce pour la 3e secondaire augmente encore la charge de travail. Les profs auront tous besoin de souffler, ça commence à presser », soutient la présidente de la FSE-CSQ, Josée Scalabrini.
Un avis partagé par le président de la FAE, Sylvain Mallette. « Quand je suis en classe virtuelle, ce n’est pas comme si j’étais en présentiel avec les élèves. Les suivis sont plus difficiles à faire. » Il transmettra une série de recommandations au ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, afin de faciliter la tâche des enseignants et de favoriser l’apprentissage des élèves au temps de la COVID-19. Un meilleur soutien technique fera partie du lot. « Aujourd’hui, c’est nous qui soutenons techniquement les élèves et les parents. Ça représente un défi. Et tout le matériel n’est pas disponible », signale-t-il.
Les services professionnels destinés aux élèves vulnérables continueront d’être offerts individuellement ou en groupes d’au plus six élèves, promet le gouvernement.
Situation stable
Le défi des 28 jours, lancé par le gouvernement le 1er octobre, n’a donc pas été relevé, mais ne représente pas un échec pour autant, selon M. Legault. « Quand je compare avec la France, qui a six fois plus de nouveaux cas que nous autres, je me dis qu’on a bien réussi ces 28 jourslà. On a réussi à stabiliser, par contre, on n’a pas réussi à baisser [le nombre de contaminations]. »
Le nombre de nouveaux cas quotidiens de COVID-19 oscille autour de 1000 depuis le début du mois. Lundi, 808 nouveaux cas et 10 nouveaux décès, dont 2 dans les 24 heures précédentes, ont été enregistrés.
« Il faut dire la vérité aux Québécois, mais il faut aussi donner un peu d’espoir — donner de l’espoir entre autres pour le temps des Fêtes », a conclu M. Legault.