Les délinquants seront mis à l’amende
Des salles de sport disent vouloir défier l’ordonnance qui leur interdit de rouvrir
Les salles de sport et centres sportifs qui reprendront leurs activités jeudi malgré le prolongement du confinement devront s’attendre à recevoir des constats d’infraction de la part des policiers, a prévenu François Legault.
Le premier ministre a annoncé lundi après-midi que les mesures sanitaires instaurées dans les zones rouges le 8 octobre dernier seront prolongées jusqu’au 23 novembre. Les restaurants, les bars et les salles de sport, entre autres, devront donc demeurer fermés pour quatre semaines supplémentaires, à moins que le gouvernement en décide autrement dans deux semaines à la lumière des données sur les nouveaux cas de COVID-19 et sur le nombre d’hospitalisations.
« La loi doit être respectée. On va s’assurer avec les policiers que les lois seront respectées. Donc, les gyms ne peuvent pas être ouverts. Il y aura des amendes, effectivement », a fait savoir François Legault.
Front commun
En matinée, appréhendant que le confinement soit prolongé, une coalition de quelque 200 dirigeants de salles de sport, de yoga, de danse et d’arts martiaux avait fait savoir que ceux-ci reprendraient leurs activités jeudi, peu importe la décision du gouvernement. Ils ont invoqué les bénéfices pour la santé de l’activité physique pour justifier leur position.
« On se voit comme des auxiliaires au système de santé, des gens qui peuvent aider la population avant qu’elle se rende à l’hôpital et soit susceptible d’avoir besoin de soins », a expliqué Christian Ménard, vice-président aux opérations chez ProGym à Montréal.
Selon lui, les salles de sport et autres centres sportifs ont mis en place des mesures strictes pour faire respecter les règles sanitaires avant le décret qui a entraîné leur fermeture le 8 octobre dernier. « On a prouvé qu’on n’était pas des lieux de contamination communautaire », a-t-il insisté.
Même s’il est un membre en règle des Hells Angels de la section de Sherbrooke depuis 15 ans, Christian Ménard estime que cette affiliation n’a rien à voir avec la cause qu’il défend. « Je n’ai aucun dossier judiciaire ni dossier criminel. Je suis un travailleur acharné. Je travaille depuis quatre ans au ProGym en tant que vice-président aux opérations. La seule raison pour laquelle je suis sorti publiquement aujourd’hui, c’est que mon entreprise est aux prises avec des difficultés, comme beaucoup d’autres. »
Propriétaire du SSP Barbell Club à Longueuil et membre de la coalition, Steve Dubé a soutenu avoir reçu de nombreux témoignages de membres qui ressentaient de la détresse en raison de la fermeture de son centre. « Je n’aime pas le mot “défier”. Moi, je veux juste que le gouvernement sache qu’on est essentiels et qu’on empêche des personnes d’aller dans les salles d’urgence. »
Il estime que le gouvernement doit mettre cartes sur table et prouver, avec une étude indépendante, que les centres sportifs sont des sources d’éclosion.
François Legault dit être conscient des effets psychologiques liés au confinement et à la fermeture des salles de sport. « Je comprends qu’il y a des risques pour la santé mentale des usagers, mais nous devions choisir la moins mauvaise des solutions », a-t-il dit.
Voix discordantes
La position de la coalition n’est pas partagée par tous les propriétaires de centres sportifs. Porte-parole d’un regroupement de studios d’entraînement privés, Mathieu Dumontet comprend l’exaspération de certains propriétaires, mais n’appuie pas leur initiative. « Il y a des gens qui sont désespérés et ils voudraient que le gouvernement les entende. »
Il croit cependant que les amendes élevées pourraient dissuader plusieurs propriétaires d’aller de l’avant avec la réouverture de leur établissement jeudi.
Pour sa part, le Conseil canadien de l’industrie du conditionnement physique (CCICP), section québécoise, a tenu à se dissocier de l’initiative des propriétaires de salles de sport qui comptent défier le gouvernement. « Par respect pour les Québécois et Québécoises qui suivent les consignes depuis mars dernier afin de se sortir le plus rapidement possible de cette crise, le CCICP ne participe pas à la désobéissance civile et prône le respect des consignes gouvernementales », a indiqué l’organisme dans une déclaration.
De leur côté, les restaurateurs estiment que la fermeture des salles à manger ne pourra pas être maintenue trop longtemps, car il y aura une « hécatombe », a prévenu François Meunier, vice-président de l’Association Restauration Québec. Il croit qu’une réouverture des restaurants est possible avec le maintien de règles strictes et des ajustements, si nécessaire : « Il faut qu’on nous offre un peu d’espoir pour qu’on voie une petite lumière au bout du grand tunnel dans lequel on se trouve. »
L’Association n’appuiera pas les restaurateurs qui défieraient les directives gouvernementales et rouvriraient leurs salles à manger. « Ça serait des initiatives individuelles. Nous, ce n’est pas quelque chose qu’on envisage. Ça s’appelle de la désobéissance civile », a-t-il dit.