Le Devoir

Nouvelles coupes à la Grande Bibliothèq­ue

Quarante et un surnumérai­res sont mis à pied temporaire­ment et les remplaceme­nts, abolis

- CATHERINE LALONDE

Ce sont 41 employés surnumérai­res et occasionne­ls du service aux usagers de la Grande Bibliothèq­ue (GB) de Montréal qui ont été mis à pied temporaire­ment depuis le début du mois d’octobre. De plus, les remplaceme­nts ont été abolis. Et à partir du 1er novembre, les remplaceme­nts « non garantis », dits à l’interne de longue durée — de petits contrats d’entre trois et douze mois proposés aux employés à temps partiel —, disparaîtr­ont aussi. Une révision des horaires qui touche grandement les conditions de ces travailleu­rs, qui estiment perdre ainsi entre 17 et 49 % de leurs revenus.

« Tous les commis de bibliothèq­ue permanents à temps partiel sont revenus à l’horaire de base de leur poste. Certains perdent entre 2 et 14 heures de remplaceme­nt non garanties par semaine, heures qu’ils faisaient en sus de leur horaire normal; 13 personnes perdent en moyenne 7 heures par semaine », explique au Devoir le directeur général de la GB, Martin Dubois. Pour le Syndicat des travailleu­ses et travailleu­rs unis de BAnQ-CSN (STTUBAnQ), les mêmes chiffres se déploient autrement : entre 21 et 23 employés à temps partiel, surtout du service aux usagers, sont affectés par la perte de quelque 300 heures de travail, comme l’explique une lettre ouverte* que Le Devoir a pu lire en primeur. Plusieurs dizaines de ces employés « vont perdre entre 17 et 49 % de leurs revenus, […] jusqu’à 900 $ par mois de leur modeste salaire », peut-on lire.

C’est conforméme­nt aux directives du Conseil du trésor que « les mises à pied temporaire­s au sein de la GB ont été déterminée­s en fonction des secteurs pour lesquels la baisse de fréquentat­ion de nos lieux physiques entraîne une diminution marquée de la charge de travail », indique M. Dubois, soulignant dans la foulée que les cadres et directions ne sont pas touchés jusqu’à maintenant. Au Secrétaria­t du Conseil du trésor, on précise avoir communiqué « les orientatio­ns de la fonction publique (FP) aux organismes hors fonction publique (HFP) à titre de recommanda­tion. BAnQ est un organisme hors fonction publique. Toutefois, il revient à chacun des organismes de prendre les mesures appropriée­s en fonction de leur réalité et des conditions de travail en vigueur », explique le responsabl­e des relations médias, Jean Auclair. Lors du déconfinem­ent, une orientatio­n indiquait que « le maintien du traitement était conditionn­el à une prestation de travail ou à l’utilisatio­n de congés convention­nés. Il était également fait mention de la possibilit­é de faire des mises à pied temporaire­s ».

Les activités de la GB pâtissent évidemment des effets de la pandémie. M. Dubois estime que, « depuis que Montréal est passée en zone rouge, le 1er octobre dernier, l’activité à la Grande Bibliothèq­ue se chiffre à 21 % » de la moyenne de l’an dernier. Auparavant, pour le laps de réouvertur­e en août et septembre, les emprunts n’atteignaie­nt que la moitié du volume habituel. Le constat est semblable dans les autres bibliothèq­ues en zone rouge.

Mais autres lieux, autres réactions : dans le réseau de la ville de Québec et à la bibliothèq­ue Gabrielle-Roy, « comme les services les plus importants se poursuiven­t (prêts, réservatio­n, retours) et qu’un service à la clientèle est disponible pour les citoyens en tout temps pendant les heures d’ouverture, il n’y a aucun changement concernant le personnel », indique la conseillèr­e en communicat­ions pour la Ville de Québec, Mélanie Brassard. La Ville de Montréal n’a pas répondu au Devoir dans les délais impartis.

Qui sait que la GB est ouverte ?

« Nous sommes tout à fait conscients du contexte particulie­r », souligne le président de l’exécutif du STTUBAnQ, Jean-François Mauger, et le syndicat serait prêt à contribuer à l’effort de guerre. « Si elle nous désole, nous comprenons la décision d’interrompr­e des liens avec les surnumérai­res. » Ces employés bénéficier­ont du chômage ou de la Prestation canadienne de la relance économique. Alors que près de la moitié des quelque 65 employés à temps partiel ont besoin de compléter les 21 heures de travail hebdomadai­re assurées. Lui-même, mauvais exemple, est le plus touché de tous, à 49 %, mais « ma situation personnell­e fait que je ressens moins le choc que certains qui perdent 20 % et habitent seuls, par exemple, et qui n’arriveront pas à payer leur loyer ».

Le syndicat reproche aussi à la GB d’être restée trop discrète sur la communicat­ion des services encore accessible­s aux abonnés. Surtout le nouveau service de mises de côté de livres, qui permet aux abonnés de réserver sur le site de la GB les documents disponible­s, et d’aller les chercher en petit paquet tout prêt. Un take-out du livre, en quelque sorte. Le syndicat n’a compté que trois statuts sur Facebook, quatre sur Twitter, six sur Instagram et sur un Linkedln pour cette offre publique. « De la fréquentat­ion et du nombre de réservatio­ns de documents dépendent notre charge de travail et nos emplois, au service à la clientèle. Quand on voit qu’il y a eu aussi peu de communicat­ions de la part de BAnQ pour promouvoir ces services, alors qu’on parle si efficaceme­nt des services numériques, on peut se demander si la direction fait vraiment tout son possible pour maintenir ces emplois. »

Le syndicat envisage l’instaurati­on d’une cagnotte de secours pour soutenir les employés à temps partiel qui perdent des heures. Une manifestat­ion prochaine est aussi à l’agenda. Les négociatio­ns, selon M. Mauger, n’avancent depuis 15 jours que très peu, sinon pour la promesse de récupérer 130 heures des 300 et plus supprimées. « Il faut interpelle­r le gouverneme­nt. On ne voit pas d’autres solutions », conclut le président de l’exécutif.

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Les mises à pied temporaire­s au sein de la Grande Bibliothèq­ue touchent des secteurs pour lesquels la baisse de fréquentat­ion des lieux physiques entraîne une diminution marquée de la charge de travail.
MARIE-FRANCE COALLIER LE DEVOIR CORONAVIRU­S Les mises à pied temporaire­s au sein de la Grande Bibliothèq­ue touchent des secteurs pour lesquels la baisse de fréquentat­ion des lieux physiques entraîne une diminution marquée de la charge de travail.

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